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Comment les Tunisiens regardentils l'avenir après
s'être risqués à se débarrasser d'une «stabilité» très admirée par les amis et
encore plus par les frères ?
Ils sont, selon un sondage réalisé par Sigma, à 97,6% optimistes pour l'avenir de la Tunisie. Ils sont encore plus nombreux (98,7%) à se sentir plus fiers d'être tunisiens, ils se disent prêts à faire beaucoup de sacrifices pour la Tunisie (97,2%) et ils sont à 92,1% prêts à ne consommer que tunisien pour aider l'économie du pays. Que nous renseignent ces chiffres ? D'abord que les Tunisiens prennent un sacré coup de jeune et qu'ils ont gagné une assurance en eux-mêmes qui montre que le patriotisme se nourrit de liberté. Cela est une réponse à ceux qui, ici ou ailleurs, se lamentent sur la «perte du sens patriotique», alors qu'ils n'en finissent pas de s'accrocher à ce flambeau qui n'est jamais vraiment transmis. Quand près de 99% de sondés se sentent fiers d'être tunisiens, il faut bien admettre que la révolution du jasmin a donné un sacré coup de fouet au moral de la nation. La révolution démocratique ne va pas résoudre tous les problèmes ? celui qui le prétend est un charlatan ? mais elle a créé les conditions de la recherche des vraies solutions avec l'implication libre des citoyens. Avec un bon moral, on avance plus sérieusement, plus résolument. Et avec une démocratie et une séparation des pouvoirs, on se donne le moyen de corriger au lieu de s'entêter dans l'erreur. Le sentiment patriotique ne s'étiole que s'il est confisqué par un groupe ou par un parti. Il a besoin de liberté et de citoyenneté pour vivre et se renouveler dans le respect des différences. Il n'est pas anormal de découvrir chez les Tunisiens, alors qu'ils accomplissent les premiers pas vers la démocratie, cette certitude que les choses seront meilleures pour eux. Et qu'ils sont prêts d'ailleurs à faire en sorte que cela soit le cas en privilégiant, par exemple, l'achat de produits locaux plutôt qu'importés. Cela est faisable quand ceux qui se font les vecteurs sont crédibles et s'adressent à des gens libres. Ce sentiment que l'avenir sera meilleur se retrouve même chez les catégories aisées, qui en général n'aiment pas trop les changements et craignent l'irruption des classes réputées dangereuses sur la scène politique. Et de fait, les Tunisiens ? on l'espère pour eux et pour les Egyptiens aussi, qui font face à de gigantesques pesanteurs géopolitiques ? peuvent espérer mieux s'ils se donnent les moyens de rester dans une dynamique vertueuse permettant le renouvellement des personnels et des idées. C'est un pas considérable même si, nécessairement, des désabusements naîtront chez les plus pauvres qui ont été le fer de lance de la révolution. Les sondés font preuve d'une acuité remarquable en donnant la couleur sociale du moteur de la révolution : les jeunes, les chômeurs et les démunis. Mais ce qui est sûr est que ces démunis savent que le discours dominant qui opposait le développement social à la démocratie est faux. Les démunis ont plus de chance de se faire entendre et d'influer sur les politiques publiques dans un système démocratique. Et quand on apprend, de Tunisie encore, l'immense manque à gagner pour l'économie dû au système autoritaire de Ben Ali, la boucle est bouclée. Les Tunisiens ont de très bonnes raisons d'être optimistes. Les Algériens doivent soutenir l'économie tunisienne en allant encore plus nombreux y passer des vacances. Car, c'est sûr, la Tunisie est encore plus belle après la liberté reconquise. |
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