
Quand les bruits de couloirs ne sont plus audibles, nous nous faisons un
plaisir de vous les faire parvenir. Musique.
Finalement, l'Union européenne a, elle aussi, des secrets bien gardés.
Parfois même des secrets de famille «honteux». Et pour une fois, ce n'est pas
le site WikiLeaks de Julian Assange qui est à l'origine de la révélation du
«Secret». Ce n'est rien moins qu'une fuite émanant des services de?l'Otan et
qui note clairement que les Etats membres de l'UE étaient au courant, depuis
2004, de la proximité du Premier ministre kosovar, Hashim Thaçi, avec les
milieux de la mafia albanaise et du crime organisé. Le rapport des services de
renseignements de l'Otan déduit que les Etats de l'UE ont fermé les yeux sur la
nature du pouvoir kosovar au nom de la sécurité et de la stabilité politique
dans la région des Balkans. C'est le journal londonien de gauche «The Guardian»
qui a révélé, mercredi dernier, la fuite de l'Otan. Cependant, curieusement la
veille, soit le 25 janvier, a été le jour où l'Assemblée parlementaire du
Conseil de l'Europe (47 Etats) a adopté à l'unanimité le rapport de son
délégué, le suisse Dick Marty, par lequel il accuse, directement, le 1er
ministre kosovar d'avoir été à la tête d'un trafic d'organes prélevés sur les
prisonniers serbes au temps de la guerre contre la Serbie entre 1996 (création
de l'armée de libération du Kosovo - UCK) et juin 1999, date de la fin du
conflit dans la région. Le Conseil de l'Europe a adressé, ce même jour, un
appel (recommandation) au Conseil européen et à la Commission pour doter de
tous les moyens humains (experts), matériels et financiers la mission EULEX,
chargée du suivi et de la mise en place d'Institutions démocratiques au Kosovo
indépendant. Etant une mission relevant du département de la Politique
extérieure de sécurité et de défense commune de l'UE (PESD), la réaction de la
représentante de l'Union à la politique extérieure, Mme Catherine Ashton, ne
s'est pas fait attendre : «Nous prenons au sérieux, comme d'ailleurs la
Commission européenne, le contenu du rapport de Dick Marty. Nous attendons les
preuves», a déclaré sa porte-parole, Maja Kocijancic. Par ailleurs, le
rapporteur du Parlement européen (PE) sur le déroulement des dernières
élections législatives (décembre), l'Autrichienne Ulrike Lunacek, a émis des
doutes sur la stabilité politique du Kosovo, et dans la région, pour le proche
avenir. «Ces élections pèseront sur l'avenir et il y aura des problèmes»,
a-t-elle déclaré en substance. La raison en est la fraude constatée lors de ces
élections et le climat de peur qui menace les témoins des activités criminelles
des partisans du 1er ministre Hashim Thaçi. Cinq villes du Kosovo ont dû voter
une deuxième fois le 9 janvier dernier, plus la ville de Kosovska-Mitrovica
dont les électeurs ont revoté ce 23 janvier. Cela montre bien le climat
politique tendu qui règne au Kosovo. Mais si les inquiétudes sur la nature
mafieuse de l'Etat du Kosovo ne sont pas nouvelles, ce qui est interpellant par
contre est le soutien de l'UE au régime politique du 1er ministre kosovar et de
son parti, le parti démocratique (PDK). Au nom de la stabilité politique et la
sécurité dans la région des Balkans, l'UE s'est tue sur les activités
criminelles (selon le rapport de l'Otan et celui du Conseil de l'Europe) du maître
de Pristina et de ses amis. Depuis 2004, la Commission et le Conseil européens
savaient, affirme le rapport qui a «fuité» des services de l'Otan. Du coup,
cela veut dire que l'Otan aussi savait et gardait le «Secret». Donc, voilà
l'Europe - officielle - démocratique, libre et chantre de la justice et des
droits de l'homme soutenant la mise en place d'un nouvel Etat européen, le
Kosovo, sur des bases plus que douteuses. Peut-on croire à la pérennité d'un
système fondé sur la violence, le déni de droit et le mensonge ? Mais l'Otan
c'est les USA, d'abord. Les Américains savaient et ne réagissaient pas. Est-ce
parce que le Kosovo a offert, dès la proclamation de son indépendance, une très
importante base militaire aux forces US ? Celle du camp Bondsteel en
l'occurrence. L'on se rappelle l'empressement avec lequel les USA de George W.
Bush avaient reconnu l'indépendance du Kosovo et appelé le reste du monde à
faire pareil. Aujourd'hui, seuls 72 Etats sur les 195 Etats du monde ont
reconnu l'indépendance unilatérale du Kosovo. Si la légitimité de l'Etat
indépendant du Kosovo est acquise pour les Occidentaux en particulier, celle de
sa morale et de sa nature, si elles s'avèrent si graves que le disent les
rapports en question, ne peuvent être tues indéfiniment. L'hypocrisie et le
mensonge ne servent jamais la paix.