Où va la Tunisie ? Les pronostics sont ouverts.
Une chose est sûre, l'économie tunisienne ne va pas perdre à la levée de
la confiscation des libertés
individuelles et collectives. Il est trop tôt pour estimer l'impact de révolte
tunisienne sur l'économie. Mais on peut déjà s'attendre à la suite de
l'extinction, aussi peu glorieuse de celle de son gendre, de l'étoile de Sakher
El Materi, qu'il y aura, au niveau du monde des affaires, quelques comptes à
rendre ou à régler. El Materi, nouveau et déjà « ex » coactionnaire de Qtel
dans Tunisiana, a sombré avec le clan familial. Il incarne en partie ce modèle
tunisien qui s'effrite alors que s'ouvre une nouvelle page que les acteurs
politiques de ce pays vont devoir écrire. Pour eux-mêmes sans le moindre doute,
pour les autres aussi peut-être. Mais la Tunisie débarrassée de son sommet qui
la serrait jusqu'à l'étouffement ne part pas du néant dans le domaine
économique. Le professeur Bouzidi le note : l'économie tunisienne fonctionne
malgré ses fragilités notamment une logique d'endettement des classes moyennes
par le biais de crédit à la consommation et une accumulation de créances
douteuses des banques publiques prises en charge par l'Etat. On finira bien par
savoir dans quel état financier Ben Ali a laissé son pays. Mais, la Tunisie, ce
n'est pas que cela. Une génération de cadres formés à bonne école, expérimentés
et compétents, contribue à faire tourner le pays. En Algérie, les compétences
ne sont pas valorisées. Le constat est commun. On est dans une logique de
nivellement par le bas, surtout dans le secteur public où les experts insistent
sur la valorisation du travail de chacun par des rémunérations en rapport avec
la compétence et les résultats. Les compétences existent. Dans les secteurs
privé ou public, mais elles sont en butte à divers obstacles dont celui d'une
Banque d'Algérie qui semble confondre inaction et prudence. Le développement
des réseaux bancaires est entravé, les exportations hors hydrocarbures
entravées sans parler de l'interdiction pour les opérateurs d'investir à
l'extérieur. Il nous reste - alors que les pouvoirs publics deviennent soucieux
de nos humeurs au moment de payer les achats quotidiens - à rêver de Tunisie en
nous consolant avec les promesses de minotiers privés assurant que la farine ne
devrait plus poser problème. Il faudrait juste ne pas oublier que la rue dans
une trentaine de wilayas, il y a quelques jours, a roulé tout le monde dans la
farine, et, qu'en Tunisie, contre toute attente, elle a renversé un président
réputé indéboulonnable.