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Algérie - USA  : Un conseiller principal d'Obama à Alger

par Yazid Alilat

Le conseiller principal du Président américain Barack Obama pour la lutte antiterroriste effectue, depuis hier dimanche, une visite de travail de deux jours en Algérie.

Reçu dimanche par M. Abdelkader Messahel, ministre délégué aux Affaires maghrébines et africaines, puis par Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, John Brennan devrait également rencontrer de hauts responsables algériens, notamment ceux de la sécurité et le conseiller du président Bouteflika pour les droits de l'homme.

 Selon un communiqué officiel de l'ambassade américaine à Alger, «cette visite s'inscrit dans le prolongement des relations profondes entre les Etats-Unis et l'Algérie, surtout en matière de coopération sécuritaire et militaire». La même source poursuit que «cette visite sera une occasion de passer en revue l'état des relations bilatérales et d'étudier les voies et moyens de les consolider davantage», précisant que «les échanges de visites de haut niveau en matière de coopération sécuritaire entre les deux pays ont été intensifiés au cours des deux dernières années». En fait, plusieurs hauts responsables militaires américains ont effectué une visite de travail en 2010 en Algérie, centrée sur la lutte antiterroriste.

 L'arrivée de John Brennan à Alger dans des circonstances politiques et économiques stressantes, avec en prime le départ précipité du Président tunisien, donne une autre envergure à sa présence dans la région. Car la rue en Tunisie a eu raison de 23 ans de règne brutal et féroce du clan Ben Ali, les clameurs également de la rue algérienne restent encore fraîches, alors que des moments de grandes indécisions entourent d'un halo sombre le quotidien au Maghreb. La situation chaotique en Tunisie ainsi que la menace toujours persistante des groupes terroristes d'Aqmi sont par ailleurs autant de facteurs explicatifs de la présence rapide des Etats-Unis au Maghreb. Alger étant une destination privilégiée pour les «sécuritaires» américains, il est dès lors facile de déduire que l'Algérie reste toujours une des plaques tournantes régionales et africaines, pour les Etats-Unis, dans la lutte contre le terrorisme. Et, le changement de pouvoir qui s'opère graduellement en Tunisie, la question des droits de l'homme au Maghreb, dont le reniement a toujours provoqué des mouvements populaires de protestations, et la menace terroriste toujours présente sont autant de sujets d'inquiétude pour les Américains. L'Algérie, avec ses hydrocarbures, la Tunisie avec son système politique qui a toujours réprimé, le Maroc qui joue la carte de l'ouverture économique ainsi que la Libye devenue «docile» sont autrement des objets privilégiés de la diplomatie US et de ses intérêts économiques de ce côté de la Méditerranée. Il n'est pas étonnant, dès lors, que l'on voie débarquer à Alger, pratiquement au lendemain de l'installation d'un président par intérim en Tunisie, le conseiller du Président américain pour la lutte antiterroriste.

 John Brennan est rentré à la CIA en 1980 et devient vite (1982-84) chef de l'antenne de Djeddah (Arabie saoudite), puis rejoint Langley pour travailler (1984-1989) au bureau du Proche-Orient et de l'Asie du Sud à la direction du Renseignement (CIA), et en 1990-1992, il est chargé de l'analyse du terrorisme au Centre contre le terrorisme à Washington DC. Il travaillera pratiquement sous les ordres de tous les directeurs de la CIA, dont G.Tenet, de 1990 à 2002, et occupera plusieurs postes de responsabilités au sein de la centrale US, dont celui de vice-directeur exécutif en 2001. Grand spécialiste de la lutte antiterroriste, mais surtout du renseignement, il devra à son retour à Washington dresser un état des lieux précis au Président US sur les grandes perspectives politiques et sécuritaires au Maghreb et au Sahel. Et, surtout, les types de menaces qui pourront émerger dans la région après la révolution du «jasmin» en Tunisie. Les effets collatéraux, notamment sur les groupes terroristes et la stabilité politique des pays de la région, de ce changement politique brusque et violent en Tunisie sont en réalité une des préoccupations des Américains dans les moments actuels.