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Youcef Yousfi: L'Algérie a de l'uranium pour son nucléaire

par R.N.

Le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, a qualifié hier les faits reprochés aux responsables de Sonatrach de «sérieux et inadmissibles», en soulignant toutefois qu' «il faut laisser la justice faire son travail».

Invité sur les ondes de la chaîne III de la radio nationale à commenter les affaires de corruption qui ont éclaboussé Sonatrach, le ministre a réitéré ses mêmes propos tenus il y a cinq jours. Se basant sur une enquête menée par les services de sécurité, le magistrat instructeur du tribunal d'Alger a mis sous contrôle judiciaire l'ex-PDG Mohamed Meziane et a placé sous mandat de dépôt son intérimaire et vice-président de l'activité Aval, Abdelhafid Feghouli. M. Yousfi a affiché, il y a deux jours devant les députés, sa détermination à «œuvrer, dès 2010, au renforcement du contrôle financier interne de Sonatrach, dans le cadre d'une lutte sans merci contre les pratiques illégales». Le ministre a également affirmé que son département veillera de très près sur les dossiers liés aux embauches et à l'octroi des marchés publics dans toutes ses phases liées à la constitution des appels d'offres et des cahiers des charges. M. Yousfi a affirmé que la majorité des salariés de Sonatrach est constituée de travailleurs honnêtes.

 Concernant le bilan des recettes d'hydrocarbures, le ministre a révélé que l'Algérie a engrangé 55,7 milliards de dollars à la fin de l'année 2010, soit une progression de 25 % par rapport à 2009. La production de gaz et de pétrole a accusé en 2010 «un léger repli et non pas une régression», a analysé M. Yousfi. Pour le ministre, «ce qui compte c'est la valeur des exportations et non pas les volumes exportés». Sonatrach tablait sur une production d'hydrocarbures estimée à près de 220 millions de tonnes équivalent pétrole (Tep) en 2010. Ce groupe énergétique avait produit 222,5 millions de Tep en 2009, dont 56,8 millions de tonnes de pétrole brut et 150,9 milliards de m3 de gaz. Ce chiffre est en léger repli par rapport à 2008. M. Yousfi a évalué la part des groupes étrangers à 6% du montant global des exportations d'hydrocarbures. «Les groupes étrangers participent à 50% dans la production de pétrole. Leur part du revenu global ne dépasse pas 6 % des recettes», a-t-il détaillé. Le ministre a affirmé que «70 % du sol algérien est encore inexploré» et a fait état d'une hausse de 40 % de l'exploration pétrolière en 2011. «En 2010, nous avons réalisé 29 découvertes d'hydrocarbures», a-t-il rappelé, annonçant le lancement des opérations d'exploration du gaz non conventionnel.

 Dans le domaine minier, le ministre a déclaré que « l'Algérie pourrait aussi exploiter ses mines de charbon, si cela s'avère nécessaire», a-t-il indiqué. Youcef Yousfi a, dans la foulée, affirmé que son ministère s'apprête à prendre des sanctions contre certaines entreprises étrangères qui n'ont pas respecté leurs engagements en matière d'exploitation minière.

 Sur un autre chapitre, répondant à une question sur l'énergie nucléaire, le ministre dira que son département «est en pleine phase d'étude pour l'implantation, à moyen terme, d'une première centrale nucléaire en Algérie». «Il nous faut, explique-t-il, dix à quinze ans pour lancer la première centrale». L'Algérie compte déjà deux réacteurs expérimentaux situés à Draria (3 mégawatts ) et à Aïn Oussera (15 MW). Le prédécesseur de Yousfi avait annoncé en 2009 que la première centrale sera lancée en 2020 et que l'Algérie se dotera par la suite d'une centrale nucléaire tous les cinq ans. Selon l'actuel ministre de l'Energie, des recherches sont actuellement menées par des ingénieurs algériens pour évaluer le potentiel national en uranium. «Nous avons de quoi alimenter largement nos centrales nucléaires à l?avenir. Nous faisons le bilan de notre potentiel», a-t-il affirmé. L'Algérie compterait un potentiel de 26 000 tonnes d'uranium.

 Evoquant le domaine des énergies alternatives, le ministre a affirmé que l'Algérie n'a pas donné son feu vert au projet allemand de production de l'électricité solaire. «Nous n'avons pas encore opté pour un quelconque choix. Nous avons dit qu'il faut d'abord établir notre programme. Nous allons travailler avec Desertec, Transgreen ou avec d'autres organismes, avec tous ceux qui partagent nos objectifs. Mais, d'abord il faut mobiliser nos propres forces et nos propres moyens», a-t-il déclaré.

 «Desertec est une idée d'industriels. Le gouvernement allemand n'a rien à voir avec ce projet. Le gouvernement algérien n'a dit ni oui ni non à ce projet. Nous discutons avec l'ensemble des partenaires qui peuvent participer à la réalisation de notre programme», a affirmé M. Yousfi.

 Le chef de l'Etat en visite officielle en Allemagne, début décembre dernier, avait déclaré que «l'Algérie et l'Allemagne travaillent ensemble dans le domaine des énergies renouvelables à travers un projet colossal que nous allons approfondir d'un commun accord». Youcef Yousfi a annoncé, par ailleurs, qu'il présentera aujourd'hui, au Conseil du gouvernement, le plan national de développement des énergies renouvelables. «Notre but est d'arriver, d'ici à 20 ans, à produire 40 % de notre électricité à partir de l'énergie solaire et éolienne», a-t-il expliqué. Et de préciser que ce plan se déclinera en trois phases. «La première qui s'étalera sur trois ans sera consacrée à l'expérimentation de toutes les techniques: défricher le terrain à la fabrication locale des équipements et mobiliser la communauté scientifique. La seconde phase sera consacrée à la construction des infrastructures nécessaires. La troisième phase verra le lancement de la production proprement dite. Il y a une soixantaine de projets qui sont déjà identifiés. Cela nécessite une importante subvention de l'Etat et la mobilisation des industriels tant du public que du privé», a-t-il indiqué. Une usine de silicium, produit entrant dans la production des panneaux solaires, sera prête en 2013, a-t-il encore déclaré. M. Yousfi a affirmé que l'Algérie vise à exporter, d'ici 2020, 2000 mégawatts d'électricité solaire en partenariat avec des Européens. «Si l'Europe ouvre ses portes et si les conditions sont réunies, on peut arriver à exporter jusqu'à 10 000 mégawatts vers 2030», a-t-il souligné. Enfin, le ministre n'a pas exclu l'éventualité d'une révision à la hausse mais progressive des tarifs de l'électricité. «A moyen terme, le consommateur doit participer au coût», a-t-il considéré.