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Lorsqu'un internaute visualise ou clique
sur une publicité dans un site web algérien, il a 9 chances sur 10 de tomber
sur une annonce placée par la régie publicitaire numéro un en Algérie, Med and
Com, que dirige son jeune et ambitieux fondateur Nassim Lounès. Un succès qui
ne doit rien au hasard. La vision d'affaires est très précise, sur un marché en
croissance très forte. 5% de la pub va à internet, progression de 104% en un
an.
A 32 ans, Nassim Lounès est à la tête d'une entreprise qui emploie une vingtaine de personnes. Dans «l'open-space» très studieux, au siège de Med and Com, aucun des nombreux écrans d'ordinateur n'affiche la même chose. Et pour cause, en plus de gérer la publicité de plus de 35 sites internet algériens, l'entreprise est aussi éditrice de plusieurs sites internet à services et d'un magazine gratuit, web et papier, autour des nouvelles technologies. Après des études à l'école supérieure des banques d'Alger et une petite expérience dans une banque publique, Nassim décide de se «réorienter» professionnellement. Il boucle en 2006 en France une maîtrise en science de gestion spécialité communication et marketing dans les services. Du cyber de BachDjerrah au marketing web? Avant de quitter l'Algérie, Nassim a géré un cybercafé à Bachdjerrah en 2001. De son propre aveu, l'affaire a coulé pour cause de mauvaise gestion. Le 26 janvier 2006 quand il décide de rentrer avec son cousin devenu son associé, ses méthodes ont beaucoup changé. Il a cette fois un business-plan solide. Aussitôt arrivé, il entame les démarches pour la création d'une régie internet et le lancement d'un magazine autour des nouvelles technologies. «Le 8 mars 2006, j'avais mon registre de commerce, on a très vite mis notre plan en marche ; un plan de développement sur deux ans, en commençant par le magazine, puis la régie publicitaire qu'on avait imaginé autrement au départ, plutôt comme une web agency (création de site internet)». L'idée de la régie publicitaire est venue par hasard, se rappelle Nassim Lounès en raccrochant pour la énième fois son téléphone suite à la demande d'un client qui voulait qu'on lui achète une bannière publicitaire. «C'est là que je me suis rendu compte qu'il n'existait pas de régie publicitaire spécialisée internet en Algérie» «Au début on a fait un benchmark (une comparaison) par rapport au Maroc et la Tunisie. Le Maroc s'est mis au web marketing en 2005. On a essayé ensuite de prendre les meilleures pratiques en France où l?activité existait depuis la fin des années 90. C'est à partir de là que nous avons établi une grille tarifaire. Nous avons ensuite convaincu les annonceurs avec des chiffres grâce à une étude Webdialna (Notre Web est un service que propose l?entreprise, la dernière étude a coûté plus d?un million de dinars)». L'étude qui a été réalisée par l'entreprise et distribuée gratuitement établissait, pour la première fois, le profil de l'internaute et l'usage d'internet en Algérie. Elle a fait tilt chez les annonceurs. «Nous avons commencé par leur expliquer l'intérêt de communiquer sur internet et très vite nous avons a eu des success-stories qui ont servi d'exemples. Ensuite, l'effet concurrence a fait boule de neige» 5% de la pub va à internet, progression de 104% en un an Pour Nassim Lounès, Internet est le seul média qui peut avoir un ciblage très précis du consommateur mais aussi une quantification des retombées des campagnes en termes d'affichage et de clic. «Aujourd'hui, les grandes entreprises consacrent 5% de leur budget communication à internet. L'évolution des investissements publicitaires sur internet est de 104% de 2009 à 2010. C'était zéro, il y a quelques années. Notre objectif est que les annonceurs consacrent en moyenne 15%, ce qui est la moyenne internationale». Pour cela il faudra s'appuyer à la fois sur la communication classique, le display «bannière, habillage, format innovants comme les interstitiels, des messages publicitaires qui apparaissent avant même le lancement du site» mais aussi sur le «search» «achat de mots clés sur les moteurs de recherche» ou encore le e-marketing direct (utilisation de l'email comme moyen de communication). Du développement en perspective. Pour le search par exemple «nous travaillons pour qualifier des bases de données d'internautes et de consommateurs algériens que nous mettons à la disposition de nos clients pour des opérations très ciblées» Des trafics hauts pour des tarifs encore bas Dans la pratique il faut parfois s'adapter pour trouver le bon équilibre et un développement sûr. La facturation n'est pas encore aux normes voulues pour Nassim Lounès. «La pratique au niveau mondial est une facturation au nombre d'affichage ou au nombre de clic du site, un site qui réalise 10 millions d'affichages par mois gagne 10 fois plus qu'un site qui n'en réalise qu'un million par mois et pour cela il faut introduire les méthodes en vigueur internationalement, comme le CPM (le coup par millier d'affichage) et le CPC (le coup par clic). Trés utilisées dans le domaine du search, ces deux méthodes permettent aux annonceurs de consommer rationnellement le budget publicitaire et d'octroyer la plus importante partie aux sites qui génèrent le plus de clic? En Algérie, pour le moment, le mode de tarification est à la semaine ou à la durée. Un système pénalisant pour certains annonceurs qui mettent le même prix sur des sites qui font des dizaines de milliers de visiteurs et d'autres plus spécialisés qui en font beaucoup moins. Pour un site spécialisé il faut au moins 2000 visites jours, pour un site grand public il en faut 10000 par jour pour prétendre vendre de l'espace publicitaire. Le mode de paiement pourra être résolu en redistribuant plus équitablement les recettes publicitaires. «Nous travaillons en ce moment à professionnaliser les méthodes et proposer aux annonceurs le mode de fonctionnement international» Un cercle vertueux pour développer des contenus algériens Les entreprises s'intéressent de plus en plus à ce moyen de communication. La principale raison, selon le dirigeant de Med and Com, est une question de coût. «C'est un avantage en Algérie. Nous restons très bon marché par rapport aux autres médias et les autres pays du monde. A titre d'exemple, pour une campagne d'une grande entreprise qui dure un mois, faire 30 à 40 millions d'affichages sur le net, coûterait en Algérie environ 2 millions de dinars sur 15 ou 20 sites, alors qu'en Europe, pour ce budget, vous n'aurez que 4 à 5 millions d'affichage?». Il y a aussi une autre donnée qui aide beaucoup, le grand trafic des sites algériens «Au Maroc, il y a un manque de supports publicitaires, l'Algérie dispose de sites internet à très grand trafic, notamment des sites d'information, beaucoup plus importants que chez nos voisins, où, à titre d'exemple, la majeure partie de leur budget de communication sur internet va à des sites étrangers. En Algérie, c'est le contraire. La grande majorité des budgets internet est distribuée aux sites algériens (environ 90%), ce qui va permettre le développement du contenu en Algérie, un cercle vertueux qui va aider à développer des sites.» Les «pure players» entrent en jeu Du côté de l'édition, Med and Com édite le magazine N'tic ; Prodelapresse.com, le site qui met en liaison la presse et les acteurs économiques ; Joowala.com, une plateforme pour les agences de voyages ; et Dzsoog.com, spécialisé dans le marché automobile. Nassim Lounès compte bientôt séparer l'activité de l'édition de l'agence de publicité. «En tant que régie, on s'en sort pas mal, nous avons 80 à 90% de la publicité internet en Algérie, mais en tant qu'éditeur de sites, nous ne sommes pas encore rentables. Il est aisé de créer un site mais pour le rentabiliser demande vraiment de la patience, du travail et beaucoup d'investissement. Les grands sites de presse ont bénéficié de la notoriété qu'ils avaient avec le papier, les autres comme Ouedkniss.com (site des petites annonces commerciales) n'ont pas gagné un sous pendant plus de 2 ans, Emploitic.com est une entreprise qui s'est créée grâce à un crédit Ansej? c'est des pure players (acteurs économiques qui proposent des services exclusivement via internet) qui ont su persévérer» selon Nassim. Ces «pure players» ne sont pas encore nombreux en Algérie. Le business autour du web restera cependant petit s'il n'y a pas un développement plus rapide d'internet sur tout le territoire. Nassim est optimiste : «le constat positif que nous avons fait de 2006 à 2010, c'est celui d'une propagation plus rapide de l'internet dans les autres wilayas qu'Alger. Le nombre d'internautes connectés de la wilaya d'Alger représentait en 2006, 40 % des connectés de tout le territoire et à l'ouest il n'était qu'à 5 %. En 2010, Alger est descendu à 27%, à l'Ouest, il a grimpé à 15%... Ceci en attendant la 3G qui connaît un boom en Tunisie et au Maroc depuis quelques mois». L'Algérie est en attente d'un vrai décollage de la «E-économie». Nassim Lounès a pris, avec Med and Com, une bonne longueur d'avance. |
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