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L'ESQUIVE DE LADY ASHTON

par M. Saâdoune

Le droit international, on le sait, est à géométrie variable. Les grands défenseurs occidentaux des droits de l'homme, si prompts à vilipender les Chinois ou les Iraniens, ne pipent pas mot lorsqu'Israël légitime la torture et tue des Palestiniens. Le triste spectacle offert par les diplomates européens, pour ne pas parler des Américains qui, eux, sont officiellement alignés sur Israël, lors de l'arraisonnement sanglant de la flottille de la paix, est un rappel de la veulerie et du double langage passé dans les usages.

 Le droit international brandi par la communauté du même nom - c'est ainsi que les Occidentaux s'auto-désignent - n'est invoqué que contre les Arabes lorsqu'il faut les envahir ou les menacer. La collusion américaine avec les ultras israéliens au pouvoir, une version encore plus raciste, si possible, de l'OAS, s'est encore manifestée avec le feu vert donné par Washington à la poursuite de la colonisation et à la judaïsation de Jérusalem.

 C'est dans l'ordre des choses car, derrière les non-dits et les apparences, les Etats-Unis sont à peu de chose près une arrière-cour israélienne. Ce qui est encore moins supportable, en termes d'hypocrisie et de cynisme, est l'attitude des Européens. Le maximalisme des dirigeants de Tel-Aviv n'a rencontré que le silence gêné des dirigeants du vieux continent et de leurs médias très encadrés. Les distributeurs de prix Nobel de la paix et donneurs universels de leçons, oublieux de leur histoire sanglante, font profil bas devant le sort fait aux Palestiniens par une entité belliqueuse, surarmée, qui n'a d'autre programme que la guerre et l'agression.

 Ce silence et cette passivité insupportables ont fait réagir une vingtaine de personnalités, d'anciens ministres des Affaires étrangères notamment, qui ont enjoint, dans une lettre transmise vendredi dernier, l'Union européenne d'adopter une approche plus ferme envers Israël dans le processus de paix au Proche-Orient. Les signataires de cette adresse invitent l'UE, entre autres, à prendre plus fermement position sur l'arrêt par Israël des constructions dans les colonies juives.

 Catherine Ashton, haute représentante pour les Affaires étrangères de l'UE, a répondu en bottant en touche. La baronne Ashton indique qu'elle a eu des échanges avec la «société civile» de Jérusalem-Est, à qui elle aurait fait part de sa réprobation devant la fin du moratoire sur la construction de colonies. Ce qui pourrait passer pour une forme d'humour, si tant de malheurs et de drames ne recouvraient le quotidien de l'occupation. La baronne Ashton précise que «l'UE n'accorde pas de traitement préférentiel aux produits provenant des colonies». La courageuse position des Européens a dû faire frémir les colons !

 La preuve de la détermination européenne est fournie en France, où ceux qui appellent au boycott des produits israéliens originaires des territoires occupés sont poursuivis par la justice sur instruction publique de l'exécutif.

 L'autorité de Ramallah, livrée à elle-même et à une vertigineuse descente aux enfers de la compromission, se retrouve dos au mur et sans autre soutien que ses propres illusions. Il ne se trouvera aucun dirigeant européen en fonction pour déclarer nettement qu'Israël doit respecter le droit international.

 Ce qui n'empêchera nullement les mêmes démocrates de l'Europe civilisée, à chaque fois que de besoin, de célébrer l'amitié millénaire avec les Arabes et l'héritage commun de la Méditerranée.