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L'apport moral et matériel d'Enrico Mattei à la cause nationale a été au
centre du colloque international qui s'est tenu hier à l'hôtel Aurassi.
Organisé par l'ambassade d'Italie et le centre national des archives sous le
haut patronage du président de la République, ce colloque qui a réuni plusieurs
personnalités nationales, ministres et ex-chefs du gouvernement, anciens
membres du Ministère algérien des liaisons générales (MALG), a été consacré au
président de l'ENI (Ente Nazionale Idrocarburi) et sa contribution matérielle
et morale à l'Algérie combattante (1954-1962). Une page méconnue, selon
Gianpaolo Cantini, ambassadeur d'Italie à Alger. Après la présentation des
thèmes du colloque par Maria Battaglia, chargée culturelle au niveau de
l'ambassade, c'est Daho Ould Kablia qui est intervenu. Membre du MALG, ce
témoin des négociations et de la signature des accords d'Evian, a souligné dans
son intervention l'apport de Mattei dans le dossier relatif à l'exploration et
l'exploitation du pétrole du Sahara algérien. Un dossier qui était, selon lui,
des plus compliqué pour la délégation algérienne dès lors que la France voulait
«reconduire» ses intérêts pétroliers par le biais des lois qui régissaient
alors l'exploitation de cette ressource.
Enrico Mattei dont les prises de positions favorables à l'indépendance de l'Algérie étaient connues avait prêté main-forte, selon Ould Kablia, pour ficeler ce dossier. En effet, selon l'actuel ministre de l'Intérieur, cela a été possible grâce à ses suggestions et conseils de professionnel et aussi pour ce que contenait sa vision anticipatrice. Ould Kablia soulignera les points sur lesquels il ne fallait pas céder lors de ces négociations. Le dossier était tellement ficelé, selon cet intervenant, que les membres de la délégation algérienne avaient réponse à tout face aux négociateurs français pour que les intérêts pétroliers de l'Algérie soient préservés. L'enjeu des négociations était aussi «d'asseoir notre souveraineté sur nos richesses», a-t-il ajouté. Homme important et puissant, il traitera avec les pays du Moyen-Orient d'égal à égal, en acheteur de pétrole et s'attirera l'ire des grandes compagnies qui dominaient le secteur des hydrocarbures et où les producteurs de cette source d'énergie n'avaient droit qu'à des miettes. Pas seulement. Enrico Mattei a pu faire basculer la classe politique italienne pour la mettre aux côtés de la cause algérienne et des relents de sympathie se sont créés à travers la péninsule. L'universitaire Bruna Bagnoto, spécialiste de Mattei et de la révolution algérienne, a souligné le tiraillement de l'Italie entre ses engagements atlantique et européen à cette époque et son engagement anticolonialiste en faveur de l'indépendance de l'Algérie dont, soulignera-t-il, l'apport de Mattei qui était un principal acteur. Mattei aurait, selon les services de renseignement français, fourni des armes aux combattants algériens. Abdelmadjid Chikhi, directeur des archives nationales, soulignera dans son exposé l'importance des richesses nationales et les maintes tentatives de la France coloniale qui voulait isoler le Sahara du reste du pays pour garder une mainmise sur les richesses souterraines. Et pour évacuer ce dossier de la table des négociations. Le colloque s'est achevé par la projection du film «L'affaire Mattei» dont le réalisateur Francisco Rosi estime que la mort du président de l'ENI dans un accident d'avion le 27 octobre 1962 près de l'aéroport de Milan est suspecte. Rosi déclare à propos de cette personnalité pendant la préparation du film qui a décroché une Palme d'or au festival de Cannes en 1972 : «un aspect m'intéresse, c'est la lutte que Mattei a menée contre les grandes compagnies de pétrole américaines et l'intuition qu'il avait eue de se mettre du côté dans lequel allait l'histoire, c'est-à-dire du côté du tiers monde». |
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