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Il était l'initiateur du Musée de «l'œuvre française en Algérie»: Georges Frêche est mort

par Moncef Wafi

Georges Frêche, le «commanditaire» du Musée de l'histoire de la France en Algérie, celui de la mémoire, comme aiment l'appeler les nostalgiques du colonialisme, s'est éteint, ce dimanche après-midi dans son bureau à Montpellier, terrassé par une crise cardiaque.

 Maire de Montpellier de 1977 à 2004 puis président du Conseil régional de Languedoc-Roussillon depuis 2004, Georges Frêche s'est fait notamment connaître et dénoncer, entre autres, après ses interventions qualifiées de «racistes» sur la composante «majoritairement black» du Onze français, ce qui lui a valu d'être exclu du Parti socialiste en 2007 et en traitant des harkis de «sous-hommes». Pourtant, et dans un souci purement électoral, quoiqu'il s'en est toujours défendu, l'homme initiera le projet, en réponse à une «vieille» promesse faite à l'importante communauté des rapatriés que compte la ville, et qui représente 20% de l'électorat local, d'un Musée de la mémoire. L'arrêté municipal est adopté en février 2003 alors que l'hôtel Montcalm, acquis pour 2 millions d'euros, en 2002, est choisi pour l'abriter. En juin 2004, un conseil scientifique était créé, constitué d'universitaires mais le remplacement de Georges Frêche par Hélène Mandroux à la tête de la mairie, aurait donné un coup d'arrêt à un musée qui devait raconter «l'œuvre française en Algérie ». La socialiste Hélène Mandroux refuse d'endosser le projet et reçoit l'appui des Verts et des communistes, qui qualifient le musée de «monument à la gloire du colonialisme». Le projet ne fait pas, non plus, l'unanimité à Paris, le Quai d'Orsay et l'Elysée souhaitant tourner la page du conflit franco-algérien, travaillait à l'époque, à la signature, d'un «traité d'amitié» entre les deux capitales.

 Alger avait déjà condamné, une loi «portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés», adoptée le 23 février 2005, à l'initiative de parlementaires, qui recommandait d'enseigner «en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord», et Abdelaziz Bouteflika assimilait l'œuvre coloniale française au nazisme. Il avait tenu à rappeler que son pays était prêt à «signer avec l'Etat français un traité de paix et d'amitié», mais qu'il «ne saurait en aucun cas cautionner, même par son silence, une prétendue mission civilisatrice du colonialisme». Le musée est pourtant toujours d'actualité et devrait ouvrir ses portes en 2011, malgré un refus de cautionnement signé par des élus communistes du Conseil régional de Languedoc-Roussillon, en 2006. Une opposition ferme au projet, justifiée par l'absence de garanties devant être apportées par un comité scientifique composé d'historiens algériens et français.

 Il est à rappeler également le désistement de certains universitaires devant former le conseil scientifique pour ne pas cautionner la mémoire coloniale. Professeur d'histoire à l'université Paris-VIII, Daniel Lefeuvre claque la porte en novembre 2005. «Nous ne sommes pas là pour servir la soupe aux politiques ni aux rapatriés», avait-il tenu à s'expliquer.