|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Annoncé depuis plusieurs jours, le projet de brûler le 11 septembre le
Coran par le chef d'une petite église évangélique américaine est vivement
dénoncé à travers le monde.
Des Etats, des organisations et des personnalités condamnent et mettent en garde contre les conséquences de l'exécution d'un tel projet. Avec son projet grégaire et « satanique », le pasteur américain Terry Jones, chef d'une église fondamentaliste d'une cinquantaine de personnes basée en Floride à Gainesville, s'est mis sur les devants de l'actualité. Il a réussi à se faire connaître mondialement et à diffuser - à moindre coût - ses idées fanatiques. Aux quatre coins du monde, on craint que s'il mettait à exécution son projet cela engendrerait des réactions violentes de la communauté musulmane d'autant que le forfait coïnciderait avec la célébration de l'Aïd El-Fitr. De hauts dignitaires religieux américains se sont joints à la condamnation de l'initiative de cette église évangélique de Floride qui veut brûler un exemplaire du Coran pour l'anniversaire des attentats du 11-septembre. Pour certains de ces responsables chrétiens, musulmans et juifs, cette affaire est liée au projet de construction d'une mosquée à proximité de Ground Zero, le site où se trouvaient les tours jumelles du World Trade Center détruites lors des attaques du 11 septembre 2001. Pour eux, l'initiative du pasteur fait partie d'une «frénésie anti-musulmane» et de la «désinformation et de la totale intolérance» dans le débat sur le bien-fondé du projet de mosquée. Plusieurs hauts dignitaires, dont l'archevêque catholique émérite de Washington, le cardinal Theodore McCarrick, et le Dr Michael Kinnamon, du Conseil national des Eglises, se sont dits très inquiets et «effarés par tant d'irrespect pour un texte sacré». «Attaquer une religion aux Etats-Unis c'est une violence à l'encontre de la liberté religieuse de tous les Américains», disent-ils dans un communiqué également signé par le rabbin David Saperstein, chef de l'Union pour le judaïsme réformé, et le rabbin Julie Schonfeld, de l'Association des rabbins conservateurs. «La menace de brûler des copies du saint Coran ce samedi est une offense particulièrement extrême qui appelle la condamnation la plus ferme possible de la part de tous ceux qui accordent de la valeur à la politesse dans la vie publique et veulent honorer la mémoire sacrée de ceux qui ont perdu la vie le 11 septembre», poursuit le texte. Le sentiment antiaméricain L'initiative censée «glorifier» le souvenir des victimes de ces attentats porte le risque de susciter des troubles là où il y a une présence américaine, estiment de nombreux observateurs. L'Administration américaine, au nom de la liberté, n'évoque même pas l'hypothèse de l'interdiction de ce projet évangélique. Elle a ses propres préoccupations. La Maison Blanche se soucie de ses soldats. Ce projet est «source d'inquiétude» et «place nos troupes en danger», a déclaré la Maison Blanche, appuyant les craintes soulevées par le général David Petraeus, commandant des forces internationales en Afghanistan. «Je suis très inquiet des répercussions possibles», a déclaré le haut gradé, qui a estimé que cela servirait la propagande des talibans en Afghanistan et renforcerait le sentiment antiaméricain dans le monde musulman. Après avoir envahi l'Irak et l'Afghanistan tout en soutenant sans aucune réserve Israël, on ne peut pas dire, effectivement, que le pays de l'Oncle Sam ait la cote auprès d'environ un milliard et demi de musulmans. Ce n'est pas le problème du pasteur de la localité de Gainesville qui visiblement veut attiser ce sentiment. Terry Jones a assuré sur la chaîne CNN que les «paroles du général étaient prises très au sérieux», mais qu'il était «fermement résolu» à mener son projet à bien. Pour sa part, la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a déclaré lors d'un dîner de rupture du jeûne (Iftar) organisé au département d'Etat: «Je suis encouragée par la condamnation claire et sans équivoque de ce geste irrespectueux, qui est venue des chefs américains de toutes les religions ainsi que des dirigeants américains laïques et des leaders d'opinion». «Au feu !» L'Iran a conseillé «aux pays occidentaux d'empêcher l'exploitation de la liberté d'expression pour insulter les livres saints» au risque de provoquer des réactions «incontrôlables». En Indonésie, pays musulman le plus peuplé du monde, la minorité chrétienne craint des «tensions» et l'Union des 20.000 églises chrétiennes protestantes d'Indonésie a écrit au président Barack Obama pour l'exhorter à intervenir. Cheikh Abdel el-Moati el-Bayoumi, un des principaux responsables d'Al-Azhar, a pressé le gouvernement du président Barack Obama - venu au Caire en juin 2009 pour un important discours de conciliation envers le monde musulman - de stopper ce projet. «Si le gouvernement (américain) ne parvient pas à l'arrêter, cela constituera la dernière manifestation en date du terrorisme religieux, et cela ruinera les relations de l'Amérique avec le monde musulman», souligne Cheikh el Bayoumi. Le Vatican a joint sa voix, hier, à ce concert de condamnations estimant que l'initiative du pasteur Terry Jones constituait un acte «scandaleux». Dans un communiqué, le Saint-Siège explique qu'il n'est pas possible de répondre aux attentats du 11 septembre en commettant «un acte scandaleux et grave contre un livre jugé sacré par une communauté religieuse». La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a, à son tour condamné le projet d'un groupe évangélique américain de brûler le Coran et affirmé «respecter toutes les croyances religieuses». Le ministre américain de la Justice Eric Holder a reçu mardi soir 16 associations religieuses toutes croyances confondues afin d'examiner «les mesures que l'administration peut prendre contre les attaques anti-musulmanes». Va-t-elle trouver une procédure pour empêcher ce sacrilège ? Rien n'est moins sûr, eu égard à la sacralisation de la liberté aux Etats-Unis d'Amérique. Dans un billet intitulé «Au feu !», le journal français Le Monde souligne que ce pasteur évangélique «veut absolument figurer dans le Guinness Book, ignorant que le record de la connerie n'y est pas encore homologué». |
|