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La stratégie internationale de Sawiris entravée par l'affaire Djezzy

par Oussama Nadjib

Naguib Sawiris est en quête d'une fusion avec un opérateur de taille moyenne afin de constituer un groupe qui pourrait entrer dans les cinq premiers mondiaux. Des négociations démenties au début, puis confirmées par la suite, sont en cours avec le russe VimpelCom. Mais l'hypothèque Djezzy entrave les démarches du milliardaire égyptien.

Orascom Telecom est bel et bien en pourparlers avec le groupe russe VimpelCom en vue d'une fusion. Le groupe égyptien avait démenti, il y a deux semaines, des rumeurs récurrentes sur un rachat partiel, par échange d'actions de la holding Orascom par la société de télécommunication russe VimpelCom. Un démenti mou que le patron, Naguib Sawiris, a définitivement enterré en confirmant au journal canadien Globe and Mail l'existence de discussions entre sa holding, Weather Investment, et le groupe russe. «Nous ne leur parlons pas seulement à eux: nous parlons à tout le monde», a déclaré le milliardaire égyptien. Selon Reuters qui cite des sources bancaires, Sawiris négocie une opération de rapprochement dont le montant atteindra les 6,5 milliards de dollars. Le patron ayant parlé, le groupe Orascom a cessé de cultiver le secret sur ses tractations avec VimpelCom en précisant que les discussions n'étaient qu'à une phase préliminaire et que l'on était encore loin d'un accord final. Les responsables d'Orascom Telecom ont justifié leur refus de donner des informations sur le sujet par le souci de ne pas influencer le cours de l'action qui pèse beaucoup dans l'indice de la Bourse égyptienne. Dans la presse russe, la nouvelle était connue depuis la mi-aout. Le journal Vedomosti avait en effet annoncé que Vimpelcom Ltd négociait l'achat de 51% d'actions du holding égyptien Orascom et de 100% de l'opérateur italien Wind.

Le «problème algérien et un bon partenaire»

Un éventuel accord devrait assurer au groupe égyptien de 20 à 23% des droits de vote dans le nouvel ensemble. Un accord permettrait de constituer un groupe de 200 millions abonnés qui entrerait ainsi dans le cercle des cinq plus grands opérateurs mobiles dans le monde. Les analystes notent ainsi que Sawiris cherche à fusionner avec un opérateur de moyenne dimension afin de constituer une nouvelle entité capable de s'étendre vers de nouveaux Etats, principalement en Europe. Mais les démarches du milliardaire égyptien restent handicapées par le sort de sa filiale algérienne qui, normalement, ne peut être incluse dans la transaction en cours avec Vimpelcom. L'écart entre l'estimation de Djezzy faite par Naguib Sawiris, soit 7,8 milliards dollars, et celle qui, à Alger la situe entre 2 et 3 milliards, entrave la recherche d'un partenaire. Le milliardaire égyptien dans sa déclaration au journal canadien établit clairement un lien entre les deux aspects. « Nous avons deux sujets à l'ordre du jour en ce moment: résoudre le problème algérien et, ensuite, trouver un bon partenaire pour le groupe ». Il est clair que ses prétentions dans le cadre d'une fusion avec Vimpelcom ou avec d'autres opérateurs dépendent clairement de l'évolution du dossier algérien. L'agence Reuters fait d'ailleurs état des craintes d'analystes et de banquiers de «voir l'intervention des autorités algériennes faire capoter une nouvelle tentative, Djezzy, principal contributeur au chiffre d'affaires d'Orascom, étant considéré comme la filiale plus intéressante». Pourtant, le gouvernement algérien ne fait pas mystère de sa volonté de racheter la totalité de Djezzy tout en s'abstenant d'indiquer ce qu'il en fera plus tard. Les tractations d'OTH avec Vimpelcom ne changent rien du point de vue du gouvernement algérien. Le ministre algérien de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication, Moussa Benhamadi l'a clairement rappelé jeudi dernier «Nous nous intéressons à Orascom Telecom Algérie qui est une entreprise de droit algérien. Le propriétaire de celle-ci veut vendre l'entreprise et l'Etat, conformément à la loi, a le droit de préemption et c'est ce droit qu'elle envisage d'appliquer».

Pas de pub pour Djezzy !

Du coté algérien, les choses semblent avancer. Une évaluation de la valeur de Djezzy commandée par le gouvernement serait sur le point de livrer ses conclusions. Moussa Benhamadi, ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication a fixé le deadline de l'opération de rachat de Djezzy à la fin de l'année 2010. Il reste que la décision, inexpliquée, de la télévision algérienne de ne plus diffuser les annonces publicitaires d'Orascom Télécom Algérie (Djezzy) peut être considérée comme un mauvais signal qui s'ajoute, du point de vue d'Orascom Telecom à la lenteur de la négociation sur Djezzy. Ce mauvais signal intervient alors qu'OTH a enregistré un bilan négatif au deuxième trimestre 2010. Le groupe a en effet annoncé une perte inattendue après une provision de 120 millions de dollars pour pertes de change latentes. OTH a signalé une perte nette, hors intérêts minoritaires, de 66,1 millions de dollars contre un bénéfice net sur cette base de 111,8 millions de dollars pour la même période de l'année précédente. Le chiffre d'affaires trimestriel est en léger recul à 1,06 milliard de dollars contre 1,28 milliard pour la même période de l'année dernière. Djezzy, la filiale la plus rentable a enregistré un revenu de 849 millions de dollars au premier semestre 2010, en baisse de près de 10% par rapport au premier semestre 2009. Djezzy reste soumise à un blocage des transferts par la Banque d'Algérie. Pour certains spécialistes, la quête d'un partenaire de la part d'Orascom Telecom reste tributaire de la résolution de son «problème algérien».