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La loi de finances complémentaire pour
2010 n'a pas encore provoqué de réactions publiques dans les milieux
économiques. Les congés du mois d'août et du ramadan n'y sont pas étrangers.
Mais pas seulement. Les acteurs économiques algériens et étrangers se sont
résignés à regarder les décideurs alourdir la tendance au «patriotisme
économique» et au «protectionnisme», alors même que les indicateurs - IDE,
importations - tardent à en montrer l'efficience.
La LFC 2010 n'a pas encore fait réagir le patronat algérien. Elle va pourtant «un peu plus loin» que celle de l'été 2009 qui avait provoqué un «choc national» en interdisant le transfert libre dans le règlement des importations, le crédit à la consommation et en rendant obligatoirement majoritaire les partenaires algériens dans tout investissement étranger. Les grandes décisions de la LFC 2009 sont donc renforcées avec l'extension du droit de préemption de l'Etat algérien dans le secteur bancaire, de même que la soumission des nouvelles banques étrangères souhaitant s'établir en Algérie à la disposition des 51%-49%, qui donne la majorité à ses partenaires algériens. En parallèle l'assouplissement du recours exclusif au crédit documentaire dans les importations paraît presque anecdotique. Il concerne certaines catégories de PME dans des importations de pièces de rechange ou des intrants dans la limite de deux millions de dinars par an. Le Forum des chefs d'entreprise (FCE) avait fortement critiqué à la fin de l'année dernière les incidences sur la chaîne d'approvisionnement que provoquait le recours exclusif au crédit documentaire, une situation qui s'est aggravée en 2010 avec l'instauration du visa statistique par wilaya, pour chaque opération d'importation. L'instauration d'une taxe sur l'importation des véhicules lourds et engins de travaux, à l'image de celle appliquée en 2008, sur l'importation des véhicules légers, affiche en revanche, sur un segment en pleine expansion, la volonté du gouvernement de recourir aux barrières tarifaires pour tenter de contenir les importations (37 milliards de dollars en 2009). «Un malentendu sur le bilan de la LFC 2009» Les mesures de LFC 2010 qui touchent l'investissement étranger accentuent la tendance du retour de l'Etat comme acteur économique. L'extension du droit de préemption et du 51%-49% au secteur bancaire laisse dubitatifs les quelques spécialistes disponibles sur la place. «Il existe un gros malentendu sur l'interprétation de la première année de règne de la LFC 2009, estime Nabil Rouani, financier. Peut-on dire que c'est un succès pour décider d'en élargir le champ d'application ? A mes yeux, si dans le secteur des assurances la Macif et peut-être bientôt le groupe AXA ont accepté le principe des 51%-49%, c'est sans doute à cause de la spécificité de cette branche au très gros potentiel. Est-ce que cela va être accepté dans le secteur bancaire et financier ? Il faut voir si le principe du 51%-49% a enregistré des arrivées d'investisseurs étrangers dans les secteurs comme l'industrie où la concurrence est mondiale et les besoins de l'Algérie très forts. Pas à ma connaissance». Concrètement, la dernière mesure de la LFC 2009, rendrait nulle une acquisition ? à l'ordre du jour début 2009, beaucoup moins aujourd'hui ? de la Société Générale par BNP Paribas. En application de la LFC 2010, il y aurait en lieu et place de deux réseaux de banques privées étrangères, une nouvelle banque publique algérienne. L'autre conséquence de la mesure est que la quinzaine de dossiers de demande d'agrément déposés, depuis parfois plusieurs années, auprès du Conseil de la monnaie et du crédit (CMC) de la Banque d'Algérie (BA) est frappée de nullité. «L'Etat veut reprendre la main, mais il n'a pas encore montré comment il en serait capable sur le plan managérial. Ahmed Ouyahia ne propose pas de solution pour exercer le droit de préemption sur Djezzy et n'est pas près d'en trouver. Alors l'extension du droit de préemption va surtout servir à faire fuir les investisseurs» estime un patron de PME de la Mitidja, qui note au passage que la décision de reprendre les actifs cédés préalablement est «unique dans le monde». Cette autre mesure «patriotique» de la LFC paraît, pour d'autres observateurs, cibler directement ArcelorMittal, à El Hadjar depuis que des désaccords stratégiques sont apparus dans la conduite de cette privatisation. Partenaire national obligatoire dans les travaux publics La LFC 2010 a donc fait le dos rond face à la conjoncture : rupture d'approvisionnement, graves tensions sur les médicaments de première urgence clinique, baisse des indices de production dans les filières de forte logistique (assemblage), 04 projets seulement d'investissements étrangers agréés en 2009 et très forte détérioration du climat des affaires altérant un peu plus l'image économique du pays auprès de ses partenaires dans le monde. Le gouvernement persiste et espère sans doute « être compris » dans la durée. Une mesure de la LFC dans la batterie des mesures « étatistes » a des chances de lui attirer les grâces des acteurs économiques nationaux. La LFC impose aux soumissionnaires étrangers dans les contrats de travaux publics de prendre obligatoirement un partenaire algérien avec eux. La mesure va plus loin que celle de la loi de finances pour 2010 qui aménageait des avantages de «préférence nationale» dans les marchés publics ouverts à la concurrence étrangère. Elle était attendue de longue date par les organisations patronales. Les prochains appels d'offres de la grande Mosquée d'Alger, de la réalisation des tramways des villes moyennes, de l'extension de la ligne 01 du métro d'Alger et de la pénétrante autoroutière vers Béjaïa, devraient en toute logique impliquer des entreprises nationales dans des consortiums multinationaux. |
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