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L'Institut Pasteur d'Algérie (IPA) vit des moments difficiles, et il a
besoin d'un sérieux coup de rabotage pour le remettre sur rails.
La cure de jouvence qu'il a subie il y a quelques années après l'installation dans les nouveaux locaux de Dely-Ibrahim, ceux des Annassers, près du Jardin d'Essai du Hamma devenant plus que centenaires (l'institut a été créé en 1894), n'a pas suffi. Après la valse des nominations de deux directeurs généraux en l'espace de neuf mois, la rupture de sérums, vaccins et réactifs, c'est au tour du nouveau ministre de la Santé, M. Djamel Ould Abbès, de revenir sur la situation que certains qualifient de «délicate», de l'Institut Pasteur d'Algérie. Et Ould Abbès souhaite une réforme complète de la gestion de l'IPA. Jeudi devant son conseil d'administration, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière a estimé «important de redynamiser l'activité de l'Institut Pasteur d'Algérie (IPA), notamment en terme d'organisation et de gestion». Si dans les années 60-70 et jusque vers les années 80, l'IPA était une référence médicale régionale et mondiale, car fonctionnant selon les standards médicaux internationaux, M. Ould Abbès relève que «cet établissement, hélas, a connu par la suite des turbulences». «Nous savons que les compétences et les moyens matériels existent. Nous devons seulement réfléchir sur l'organisation et le fonctionnement de l'Institut, et ce à travers une politique fondée sur le dialogue et la cohérence entre les acteurs du secteur de la santé», a encore estimé M. Ould Abbès. Pour lui, il faut «réfléchir sur les voies et moyens à mettre en place afin d'aboutir à des solutions pour redynamiser l'Institut Pasteur d'Algérie, qui est capable, a-t-il dit, de fabriquer l'ensemble des vaccins et d'assurer une autosuffisance en terme de produits pharmaceutiques». Et, «ces solutions doivent être trouvées ensemble», ajoute le ministre de la Santé, dont l'intervention devant les premiers responsables de l'Institut Pasteur annonce sans aucun doute de prochains réaménagements dans le fonctionnement et la composante humaine de cet établissement. Gestion, talon d'Achille de l'IPA Signe de cette volonté des pouvoirs publics de faire le ménage et de reprendre la main au sein de cet important établissement médical, où sont notamment testés ou fabriqués les sérums, vaccins et réactifs, le ministre n'a pas manqué d'annoncer «la volonté de l'Etat de lutter contre la mauvaise gestion dans le secteur de la santé d'une manière générale», confirmant, en même temps, la détermination de l'Etat à «diminuer progressivement jusqu'à l'éradication totale de l'importation des sérums, vaccins, réactifs et des médicaments». L'Etat veut reprendre les choses en main dans le secteur névralgique de la production et de la distribution de sérums, vaccins et réactifs, une des grandes missions dévolues à l'IPA, qui a connu une période difficile ces dernières années. En pleine crise de la pandémie de la grippe porcine, l'IPA n'arrivait pas à ajuster une politique cohérente pour la distribution des vaccins, alors que la période de vérification de l'efficacité de ces vaccins importés d'Europe avait mis tellement de temps que des doutes étaient apparus même au sein de la corporation. Au point que les médecins avaient, malgré les assurances de l'ex-ministre Saïd Barkat qui s'était vacciné en premier, refusé de se faire vacciner. En fait, la gestion de la pandémie de la grippe porcine avait montré un visage peu rassurant d'un institut censé servir de bouclier contre les grandes pandémies et les pathologies conjoncturelles, comme la grippe, la tuberculose ou le paludisme que certains Algériens attrapent lors de voyages en Afrique. Autre grief, et non des moindres contre l'IPA : la pénurie ou la rupture de stocks de réactifs, de sérums et de vaccins, des produits vitaux pour le fonctionnement de l'ensemble de la chaîne de traitement des grandes pathologies au niveau des structures hospitalières, des polycliniques et des officines. Depuis deux années, l'IPA fonctionnait à reculons : sa gestion était devenue tellement aléatoire que deux directeurs ont été nommés en l'espace de 9 mois. Le premier, M. Abbadi, aurait été «viré» neuf mois après son installation pour, officieusement, une gestion anarchique des stocks de vaccins, réactifs et sérums, et leur non-renouvellement. Mais, M. Abbadi s'est défendu de ces accusations de «mauvaise gestion» en soulignant que ces pénuries sont le résultat direct de «l'application des nouvelles mesures relatives au commerce extérieur, notamment le crédit documentaire». Les maux de l'IPA La loi de finances complémentaire pour 2009 (LFC 2009) avait, en effet, réintroduit le crédit documentaire pour toute opération d'importation. L'IPA est-il une des nombreuses victimes du Credoc ? Toujours est-il qu'à la fin janvier 2010, l'IPA a été doté d'un nouveau directeur général, le professeur Mohamed Tazir, médecin microbiologiste, qui avait déjà géré l'IPA de 1994 à 2000. Selon des sources proches de l'Institut Pasteur, citées par la presse nationale, «l'IPA enregistrait au milieu des années 2009, une grave pénurie de réactifs, produits réservés à l'analyse des échantillons de sang utilisés pour les patients atteints du virus H1N1", et cette pénurie touchait également les réactifs, et par ricochet de nombreux malades atteints d'hépatites virales. Même les associations de malades pointaient du doigt «la mauvaise gestion» au niveau de l'IPA. Abdelahmid Bouallag, président de SOS hépatites, avait même prévenu au début de l'année que «les ruptures de réactifs peuvent durer des mois et pénaliser les malades atteints d'hépatites virales B et C». Des milliers de malades souffrent le martyre à cause de cette situation. Pour autant, la mauvaise gestion sera-t-elle résolue à travers un simple discours et de bonnes intentions ? |
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