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«Il n'y a que deux
grands courants dans l'Histoire de l'humanité: la bassesse qui fait les
conservateurs et l'envie qui fait les révolutionnaires». Les Goncourt.
Il a fallu les charges affectives et de l'irrationnel autour de l'EN de foot, pour que les Algériens, gouvernés et gouvernants, découvrent, une fois de trop, l'inexistence d'un audiovisuel national. Alors, une fois de plus, il faut inventer une diversion et trouver un bouc émissaire, sinon un ennemi de la patrie «Mahgoura». Avec le Mondial, ces rôles sont dévolus à «Al Djazira», originaire d'un pays «ami», «frère» et «frère en religion». On apprend, une fois de trop, une évidence: dans une relation commerciale, les Etats et les entreprises n'ont pas de «frères» ou «d'amis», mais uniquement des intérêts. Il y en a qui savent les défendre, d'autres pas encore ou pas du tout. Les images, les droits relatifs à la Coupe du monde qui brasse des milliards relèvent du commerce, de l'audience et du rayonnement des T.V qui veulent diffuser l'évènement. La chaîne Qatarie a acheté, auprès du premier et décisif vendeur (la FIFA), des droits âprement négociés, avec une armée d'avocats et d'experts, par le vendeur et l'acheteur. Ce dernier pèse par sa frappe financière, ses zones d'influence en une ou plusieurs langues, que Al Djazira a conquises rapidement. C'est sa corbeille de média à rayonnement planétaire. Elle a le monopole par l'envergure de son offre sur des satellites (musique, sports, information, enfance, jeunesse, débats en direct) sur la majorité des mondes arabe et musulman avec plusieurs langues. Aucune T.V arabe ne peut rivaliser avec les grilles des programmes du bouquet qatari. L'ENTV a normalement signé un contrat analysé à la loupe par le staff algérien, ses experts et avocats, sachant les délais et que la FIFA détient les droits et les clés de la négociation avec les groupes et les chaînes intéressés. Après la signature du contrat et le début de la compétition, l'ENTV fait un courrier, qui n'est nullement un avenant, dans lequel est évoqué? le président de la République. Or ce dernier n'est pas un acteur juridique dans une transaction commerciale entre un EPIC algérien et Al-Djazira. Cette dernière, c'est de bonne guerre, défend ses intérêts financiers, fidélise, pour l'après Mondial, des audiences, des annonceurs et veut garder une place de leader dans le monde arabe et au-delà. Si elle a triché, il y a des tribunaux plus efficaces que des jérémiades humiliantes. «Hagrouna» devient une «constante». Une des seules vraies questions posées est de savoir comment radio et T.V algériennes ont négocié le Mondial. Ensemble ou chacune pour soi? Etait-il possible d'imaginer un contrat dans lequel les deux médias se partagent les coûts et basculent le son T.V sur les radios nationales, en évitant, bien entendu, des commentateurs qui tiennent un meeting nationaliste à l'antenne en débitant l'histoire de l'EN et ses vedettes du passé que ceux qui ont entre 20 et 30 ans n'ont jamais vu jouer? On a même reproché à la FAF d'avoir traité avec CANAL+ et Al Djazira. La Fédération a très bien fait d'avoir voulu et obtenu des recettes en vendant des droits à ces chaînes. Nedjma est bien sponsor major de l'EN et puis une entreprise publique nationale. Gagner des sous sans compter exclusivement sur l'Etat est-il désormais un délit dans le monde du sport où l'argent a son importance? La FIFA est le premier grand gagnant car elle sait financièrement ce que valent le rêve, l'émotion, les nationalismes chauvins et l'utilisation du foot dans des pays où ce sport est enrôlé pour des joutes politiques, où des clubs se font grands électeurs à chaque scrutin. La énième et insignifiante guérilla entre l'Algérie et Al Djazira révèle simplement, une fois de plus, l'inexistence d'un puissant audiovisuel algérien (public/privé) professionnel, performant et conquérant chez lui et partout ailleurs, au moins dans trois langues. Dans l'espace méditerranéen, l'Algérie est le pays le moins fourni en offres, comparée à l'Espagne, l'Italie, la Turquie, la Tunisie, l'Egypte, la France. Le pays ne fait pas le poids avec une seule chaîne qui a un statut juridique (EPIC), face aux grands groupes méditerranéens privés et publics qui exercent un maillage serré de l'espace concerné. Les groupes les plus proches de nous, en termes de langues, sont français et d'autres arabes. Le premier rideau des groupes de France est constitué par la COPEAM (Conférence permanente de l'audiovisuel méditerranéen). Or celle-ci est dominée par France Télévision (5 chaînes autonomes). Avec des milliers d'heures produites par année, des participations financières sur des films français, européens, des évènements artistiques de grande envergure, une grande couverture des évènements mondiaux, des reportages aux quatre coins du monde, France Télévision est la locomotive de la COPEAM derrière laquelle de nombreux wagons font de la figuration-participation. Sachant l'importance de chaque audiovisuel au sein de la COPEAM, M.E. Hogg (président de la COPEAM) souhaite voir naître, dans la foulée de l'UPM, une chaîne méditerranéenne multilingue. Il ne faut être grand expert pour savoir, à ce jour, qui a les capacités technologiques, la liberté de création, les formations de pointe, les savoir-faire, le nombre de diffuseurs à même d'alimenter, de coproduire et de produire en direction de cette éventuelle future chaîne qui sera comptabilisée au crédit de l'UPM. Et c'est ce que souhaite la COPEAM. Le deuxième rideau offensif est constitué par des dizaines de chaînes publiques et privées sur satellite bien connues dans les mondes arabe et méditerranéen. Ce n'est pas un hasard si des chaînes françaises ont diffusé (en direct et en clair des rencontres d'équipes africaines, dont l'EN, pendant que la chaîne unique algérienne revoit par «courrier» un contrat dont l'opinion et les institutions ignorent l'ensemble des clauses. Demain, plus tard et régulièrement, certains repartiront pour des guerres (perdues d'avance) contre Al Djazira, des chaînes françaises ou autres qui travaillent avec succès (comptez les paraboles en Algérie) pour fidéliser des audiences, recruter les meilleurs chez nous et au Maghreb au point qu'une débutante comme Nesma T.V donne de l'urticaire à beaucoup. Pour mieux pédaler dans la semoule et éviter de débattre uniquement des avantages d'un audiovisuel national à deux têtes (privé/public) avec des managers jeunes, compétents, inventifs qui ont envie de proposer une révolution pacifique, planifiée pour le cinéma et le paysage audiovisuel, on ressort la T.N.T., recette miracle et panacée irremplaçable! On oublie que cette technologie, en l'occurrence celle simple de la T.N.T, ne produit pas, ne co-produit pas, ne libère pas. Elle transporte par compression numérique des signaux. Point à la ligne. Elle ne remplace pas des absences. Des entreprises et des experts de France viennent en Algérie pour «vendre» la T.N.T. Soit. Dans l'Hexagone, 17 émetteurs ont émis avec cette technologie le 31 mars 2005 à 19 heures. Fin 2011, en fonction d'une montée en cadence réfléchie, tout le territoire, du moins à 95%, aura quitté la diffusion-réception analogique. A la fin du cycle, le citoyen français aura accès à près de trente chaînes gratuites. La TNT, c'est une offre, pas une seule chaîne à l'intérieur de laquelle sont bricolés des programmes. La TNT, encore une fois, c'est une offre large et diversifiée de plusieurs diffuseurs (publics et privés) pour laquelle les ménages doivent engager des dépenses justifiées par l'offre. Il faut des téléviseurs équipés pour ou bien avec un adaptateur à part. Mais là, on met la charrue avant les bœufs. On pense à l'achat d'un nombre suffisant d'émetteurs terrestres équipés pour les émissions TNT. Et l'Algérie, vaste territoire, peut aiguiser l'appétit autour de marchés à ce niveau. Les conditions techniques nécessaires à une réception de qualité par satellite par des antennes collectives ou individuelles ne rentreraient pas dans l'espace d'un article, mais il faut une offre large pour justifier des équipements publics coûteux et des frais pour les foyers. Un audiovisuel national ! L'offre, c'est l'ouverture médiatique. Les solutions sont simples et inventées ailleurs, il y a longtemps. Une chaîne d'info présente dans le monde avec 2 langues est faisable rapidement. Avec de jeunes équipes, elle fera ce que font les concurrents (Djazira, France 24, LCI, Euronews, etc) en toute liberté, loin des protocoles qui font le bonheur de la concurrence. Des chaînes privées et publiques (thématiques, généralistes), régies par la loi et des cahiers des charges durement négociés sont possibles maintenant. Avec des jeunes, des capitaux (l'Algérie a de l'argent pour le moment), de l'audace, de la liberté d'expression et de création, il sera possible d'offrir aux citoyens et au monde des offres du niveau des concurrents ou mieux. Une chaîne dédiée à l'Histoire (monde arabe, Algérie, Afrique, Maghreb, mouvements nationaux, guerres de libération, Méditerranée?) trouverait de larges publics ici et ailleurs. Les livres de Kafi, Stora, Reda Malek, Saïd Sadi, Yacef Saâdi, Ferhat Abbas et ceux à venir seraient débattus par des chercheurs, les auteurs, des experts et érudits en présence de jeunes qui poseraient des questions? Pour le moment, les rêveries sont improbables. Il y a trop d'apparatchiks, de rentes de situation, de courtisans à la recherche d'un décret, d'une retraite améliorée, de chasseurs de marchés, de bénéficiaires de proximité clanique ou sectaire pour barrer la route à un puissant audiovisuel national (privé/public) comme ceux que nous comptons dans toutes les langues. Que manque-t-il? Une puissante volonté politique et l'envie de changer un paysage univoque, tristounet qui a fait expatrier les imaginaires et les regards de millions d'Algérie. |
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