A la filiale algérienne du géant mondial de l'acier, Arcelor Mittal, le
bras de fer continue entre le syndicat d'entreprise et la direction générale.
C'est à un véritable feuilleton à rebondissements que les observateurs de ce
conflit social assistent depuis le début de l'année. Quarante huit heures après
la confirmation par le syndicat d'entreprise de la grève générale illimitée, qui
débutera le 21 juin, décidée jeudi dernier lors d'une assemblée générale, la
direction générale d'Arcelor Mittal Annaba réagit, contre ce débrayage qu'elle
estime «illégal». «La grève annoncée pour le 21 juin est illégale, car toutes
les démarches entreprises ne sont pas conformes à la loi et à notre convention
collective», avait affirmé la direction dans un bulletin «infos-usine»
spécialement édité avant l'arrêt de travail et rendu public hier mardi. En
outre, la direction générale du complexe d'El Hadjar souligne que «l'inspection
du travail n'a pas délivré de procès-verbal de non conciliation» et «nous
continuons à discuter avec le syndicat». Réagissant à l'assemblée générale
convoquée par le syndicat d'entreprise, dirigé par Smain Kouadria, qui avait voté
pour une grève générale à l'appui de revendications salariales, la direction du
complexe relève que cette assemblée générale tenue le 10 juin «n'était, ni
demandée par le syndicat, ni autorisée par la Direction Générale». Mieux, la
direction relève que «le processus d'approbation de la grève était irrégulier
car il n'y a pas eu de vote à bulletin secret» et que l'assemblée «n'a regroupé
que 800 des 6.200 employés de l'usine. Nous considérons que la grève annoncée
sera donc illégale». Jeudi dernier au niveau du complexe d'El Hadjar, la
presque totalité des travailleurs avait voté à main levée pour un débrayage
illimité pour amener la direction à négocier une nouvelle mouture de la
convention de branche. Selon M.Kouadria, «cinq mille salariés ont participé (à
cette assemblée générale) et se sont prononcés à l'unanimité en faveur du
principe d'une grève illimitée». Le vote, s'est déroulé en présence d'un
huissier de justice, et, dimanche, un préavis de grève générale à partir du 21
juin prochain avait été déposé par le syndicat auprès de l'inspection du
travail de Annaba. Le gros du conflit entre le syndicat des travailleurs et la
direction générale porte sur l'application d'un avenant à la convention de
branche signée entre la Fédération des travailleurs de la mécanique, de
l'électricité et de l'électronique (FNTMEE) et la Société de gestion des
participations de l'Etat Translob, actionnaire à hauteur de 30% dans
ArcelorMittal Annaba, précise M.Kouadria. Pour le syndicat l'objectif est clair
: obtenir «un rabais» en matière d'augmentations des salaires sur le sillage
des conventions de branche mises en place au cours du 1er trimestre par la
tripartite, alors que le syndicat et la direction générale avaient déjà signé
en juillet 2009 une nouvelle grille des salaires. De son côté, la direction
générale avance des arguments «techniques» pour convaincre et tenter d'éviter
un débrayage inéluctable. Dans une lettre transmise aux travailleurs mardi
dernier, le patron du complexe Vincent le Gouic y affirmait que «le salaire de
base moyen a été augmenté de 25% depuis janvier 2005 et sera augmenté de 5% le
1er juillet prochain». Présentant un bilan «encourageant», il ajoutera dans sa
lettre que «la productivité est passée de 75 tonnes par personne et par an à
118 tonnes par personne et par an» à fin 2009.
Cerise sur le gâteau, la
production s'est améliorée, passant de 487.000 tonnes à 714.000 tonnes, en
rythme annuel, alors que théoriquement elle est de 2 millions de T/An. Mais,
les arguments de la direction ne semblent pas avoir eu l'effet escompté, le
climat tendu qui règne au sein du complexe semble aller vers le pourrissement,
à moins d'une intervention qui viendrait calmer les esprits, tout en permettant
aux deux parties de ne pas perdre la face. Au mois de janvier dernier, une
grève générale de 9 jours avait coûté à la filiale algérienne d'Arcelor Mittal
quelque 6 millions d'euros.