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Le ministre algérien des Affaires religieuses se prononce dans un journal
français sur un débat -douteux- français. Erreur de casting?
De nombreux intellectuels d'origine maghrébine se sont bien gardés d'interférer dans le débat parisien sur le «niqab» ou la «burqa», s'agissant, à l'évidence, d'une vaste opération de diversion commanditée par la sphère politico-médiatique dominante. La dramatisation outrancière du phénomène, au vu du caractère statistiquement négligeable du nombre des femmes qui portent le «niqab» en France, suscite une suspicion légitime. Beaucoup n'y voient qu'une manœuvre politicienne par temps de crise. Des intellectuels algériens établis en France, considèrent cette affaire, manifestement entretenue et montée en épingle comme un piège grossier, refusant de cautionner une polémique sans substance et de servir ainsi d'alibi à la diversion. Bien peu ont accepté d'embarquer sur la galère des batailles d'opinion artificielles. L'indifférence de la majorité des intellectuels français en dit long sur la nature d'un débat de façade, foncièrement insincère et sans grande articulation avec les réalités sociopolitiques. Le recours aux peurs millénaristes et aux phantasmes n'est pas nouveau. Nul n'a oublié que le peu glorieux débat sur «l'identité nationale», exutoire ad hoc -tradition européenne oblige- aux réels problèmes de fractures socio-économiques, a été le prétexte à la libération de la parole raciste, y compris chez des personnalités officielles. Le gouvernement français, à nouveau mis en garde par le Conseil d'Etat sur l'absence de fondement juridique incontestable à une interdiction générale du «niqab», n'entend pas lâcher son petit thème de diversion dans un contexte d'incertitudes et de crise s'exacerbant. L'affaire des musulmans de France Dans un environnement aussi trouble, était-il avisé pour un ministre algérien des Affaires religieuses de se mêler de cette affaire ? L'imam Malek, interrogé un jour sur un sujet délicat faisant problème dans une autre contrée, avait suggéré à son interlocuteur d'aller poser sa question à un religieux du pays intéressé... Le ministre des Affaires religieuses algérien Bouabdallah Ghlamallah, aurait pu s'inspirer de l'imam en indiquant que ce problème concerne les musulmans de France et que c'est à cette communauté qu'il appartient d'exprimer éventuellement ses points de vue. Cet accoutrement sectaire menacerait-il vraiment la République et ses valeurs proclamées ? En tout état de cause, il reviendrait naturellement aux musulmans français de se prononcer ou non sur ces problématiques locales, aussi périphériques soient-elles. Le ministre aurait pu répondre par un classique -et très algérien- refus d'ingérence dans les affaires des autres. On comprend sans ambiguïté que M. Ghlamallah n'est pas un partisan du «niqab» -très contesté effectivement par de nombreux religieux- et si cette déclaration avait été faite sous nos cieux, à l'ENTV où dans un journal algérien, cela n'aurait pas posé problème. S'exprimer de la sorte dans un journal français -et donc entrer dans un débat français- est beaucoup plus incertain car l'affaire du «niqab» ou de la «burqa», ne masque pas du tout les arrière-pensées électoralistes de ses initiateurs. Une islamophobie qui ne se voile plus L'interview de Ghlamallah au «Progrès de Lyon» -il participait au 2e séminaire régional de la grande mosquée de Lyon, consacré aux imams et prédicateurs- se prête en effet aisément à instrumentalisation. Il estime que «la France a de nombreux problèmes à résoudre, plus importants que celui du voile intégral. La crise économique internationale ou le projet d'Union pour la Méditerranée en font partie». Sur le fond, il ne considère pas que l'interdiction du «niqab» dans l'espace public soit une «erreur» mais il ne voit pas où est «l'urgence». C'est, dit-il, «un comportement marginal, qui n'a rien à voir avec une prescription religieuse, mais part d'une attitude individuelle extrême. Exactement comme quand des gens se promènent nus!». Mises sur le marché français, ces déclarations, au-delà du souci de la nuance et de l'insistance sur le caractère peu prioritaire de la loi anti-niqab, servent de fait à justifier la démarche en cours en France dans le cadre d'une entreprise soutenue et coordonnée de stigmatisation des populations d'origine maghrébine et africaine. En l'occurrence, la mise à l'index du «niqab» ou de la «burqa» sert moins à défendre la dignité des femmes qu'à stimuler une fibre islamophobe qui ne se voile plus, ni en France, ni dans le reste de l'Europe. Le reste n'est que littérature? |
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