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Le week-end semi-universel, l'activité culturelle et les Oranais

par El Kébir A.

La vie culturelle oranaise essaye, ces derniers temps, de sortir quelque peu de ses décombres.

Doucement mais sûrement, la culture à Oran tente de renaître de ses cendres et de reprendre pleinement le prestige qu'il lui est dû et qu'il lui est légitime. Même si, pour cela, beaucoup reste encore à faire! La multiplication des activités culturelles à El Bahia, émanant la plupart du temps de l'initiative des associations, des centres culturels, ou parfois de la direction de la Culture, est presque palpable. Le public est le premier à s'en rendre compte: projection de films par-ci, conférence par là, théâtre, concerts de musique...bref, autant dire qu'on assiste, toute proportion gardée évidemment, à une sorte d'effervescence de la vie culturelle.

 Mais pour que cela puisse durer, le tout n'est pas simplement d'organiser, tous azimuts, toutes sortes d'activités, encore faut-il qu'il y ait du répondant de la part du public! Et comme chacun le sait, les gens, dans la majorité des cas, sont plus enclins à se rendre à quelque évènement culturel durant le week-end plutôt que par les jours de semaine. Pour ce qui est, à titre d'exemple, de l'année dernière (l'année académique 2008-2009), le problème ne se posait pas : toutes les manifestations de cet ordre avaient lieu le jeudi, c'est-à-dire premier jour du week-end. Quant au second jour, le vendredi, les gens le consacraient au repos, ceci afin d'attaquer la semaine suivante «les batteries pleines». Or, le hic est que depuis la dernière rentrée sociale, un chamboulement, pour le moins magistral, a lieu au niveau de ce secteur. En effet, depuis l'application par l'Algérie du week-end «semi-universel», les organisateurs de ce genre d'évènements se montrent pour le moins agacés: il n'est plus possible d'organiser les activités le jeudi, ce jour étant devenu un jour de semaine ordinaire. Dans le même temps, le vendredi ne change pas à son habitude de «journée morte». Partant de là, les organisateurs se sont rabattus sur le seul jour qui restait «disponible» : le samedi. Mais le problème est que le samedi est le jour précédant la nouvelle semaine. Et dans la norme, les gens sortent pendant le premier jour de week-end et se reposent le second jour, afin d'être d'attaque le jour d'après. Or, que constatons-nous? Les gens dépensent leur énergie, qu'elle soit physique ou intellectuelle, la veille de la reprise du boulot !

 L'exemple le plus édifiant est celui du samedi 6 mars dernier: en ce jour, à l'occasion de l'approche de la célébration du 8 mars, au matin, les associations «Fard» et «Bel Horizon» ont organisé une randonnée pédestre : «sur les traces des femmes algériennes dans l'Oran patrimonial». Durant l'après-midi, le CCF abritait le monologue de Clair Thaous Khassem, intitulée «Rim la gazelle», alors que simultanément, une projection du film documentaire «Lettre à ma sœur» a eu lieu à la cinémathèque, en présence de la réalisatrice avec qui un débat a, par la suite, été ouvert. Pour couronner le tout, aux alentours de 18h, le théâtre régional d'Oran, à l'initiative de l'institut Cervantès, a abrité un concert de musique classique. «C'est bien beau d'assister à tant d'activités en un seul jour, nous dit un habitué, mais à la longue, ça épuise... et le problème est qu'on bosse le lendemain!»

 Un autre, plus pragmatique, va droit au but: «ou bien on doit s'habituer à organiser ce genre d'évènements le vendredi, ou alors, il va falloir songer à adopter le week-end universel... à ce moment-là, on sera peinards!»

 Seulement, pour ce qui est d'imposer le vendredi comme étant le jour devant abriter les évènements culturels, autant dire que ce n'est pas une mince affaire. Pour rappel, la cinémathèque d'Oran, en 2008, a bien essayé d'ouvrir ses portes les vendredis, et il lui a suffi à peine quelques semaines pour qu'elle se rende compte que c'était une erreur: personne ne venait en ce jour, ou alors si peu. «Ce n'est pas que le domaine culturel qui a été touché par ce changement de week-end, nous dit un autre, je suis sûr que tous les autres secteurs ont été chamboulés.

 Avant, il y avait une véritable animation le premier jour du week-end, les rues grouillaient de monde, les cafés pleins à craquer, les magasins ouverts... et aujourd'hui, le vendredi c'est mort, et le samedi, c'est confus ! Les gens sortent certes, mais malgré cela, on n'assiste plus à cette ambiance effervescente qu'on avait avec le jeudi!»

 Ceci dit, même éprouvant de la nostalgie, aucun de nos interlocuteurs n'a émis le souhait de revenir à l'ancien week-end. Loin s'en faut ! «Le mieux serait tout simplement d'adopter le week-end universel et plus de confusion à ce moment-là!», nous a-t-on dit.