Une affaire de port d'un niqab au volant fait un grand bruit en France.
Les faits interviennent en plein débat en France sur le projet de loi
d'interdiction du port de voile intégral décidé par le gouvernement. Le 2 avril
dernier, dans une rue de Nantes, une Française de 31 ans, une femme portant un
niqab, avait été verbalisée par la police, alors qu'elle conduisait une
voiture. S'estimant «lésée», la jeune femme décide de médiatiser l'affaire.
Cette dernière a organisé, jeudi dernier, une conférence de presse pour
contester son amende de 22 euros. La conductrice verbalisée a estimé éprouver
un «sentiment d'injustice» et a déclaré que le policier «n'avait pas le droit
de la verbaliser», soulignant qu'elle n'aurait jamais conduit avec ce voile, si
celui-ci avait représenté un danger. La riposte du ministre français de
l'Intérieur ne s'est pas fait attendre. Brice Hortefeux juge que la
contravention avait été dressée «à juste titre» et agite la menace d'une
déchéance de la nationalité française du conjoint de la femme voilée, qu'il
soupçonne de polygamie et de fraude aux aides sociales. Hortefeux a demandé à
son collègue Eric Besson, en charge de l'immigration d'enquêter sur la
situation du mari de la femme verbalisée. Selon le ministre français de
l'Intérieur, le mari de cette dernière est «né à Alger et ayant acquis la
nationalité française par mariage en 1999, appartiendrait à la mouvance
radicale du ?Tabligh' et vivrait en situation de polygamie, avec quatre femmes
dont il aurait eu douze enfants». «Ces quatre femmes, poursuit Hortefeux dans
un courrier à Eric Besson, bénéficieraient de l'allocation de parent isolé et
porteraient le voile intégral». Et le ministre de conclure: «j'ai demandé au
préfet de la Loire-Atlantique de faire, sans délai, toutes les diligences
utiles, auprès du parquet et des services sociaux, pour réprimer, le cas
échéant, les faits de polygamie et de fraude aux aides sociales qui ont été
signalées», écrit encore Hortefeux. «Je vous serais très reconnaissant de bien
vouloir faire étudier les conditions dans lesquelles, si ces faits étaient
confirmés, l'intéressé pourrait être déchu de la nationalité française», écrit
encore Hortefeux à Besson. La veille, la jeune femme avait relaté devant les
médias les circonstances dans lesquelles elle a été verbalisée. «Je ne sais pas
comment cela se passe dans votre pays, mais chez nous on ne conduit pas comme
ça», lui a dit un policier, raconte la jeune Nantaise au niqab. «Je lui ai dit:
chez vous, c'est aussi chez moi, parce que je suis Française», a-t-elle
rétorqué. Et cette dernière d'ajouter: «J'ai ensuite remis mes papiers au
fonctionnaire, enlevé mon voile pour identification et m'est vue alors dresser
un procès-verbal.» Le PV est basé sur l'article 412-6 du code français de la
route: 22 euros d'amende pour «circulation dans des conditions non aisées», le
policier considérant que le champ de vision de la conductrice était étroit. «Si
c'était dangereux, je n'irais pas m'aventurer à conduire, a affirmé la femme
voilée. «Cette amende est injustifiée puisqu'elle n'a aucun lien avec la
sécurité routière. Elle constitue une atteinte aux droits de l'Homme... et de
la femme», a estimé de son côté, son avocat, Jean-Michel Pollono, soulignant
que le champ de vision de la conductrice «n'était nullement entravé».
L'avocat a adressé jeudi une
lettre de protestation au ministère public, dans laquelle il expliquait que sa
cliente n'est «pas une femme soumise, mais une intellectuelle», née en
Loire-Atlantique et d'origine métropolitaine. «Si le voile avait posé un
quelconque danger au volant ces dernières décennies, on n'aurait pas vu de
religieuses conduire», a-t-il ajouté. Le conjoint de la femme risque, quant à
lui, d'être expulsé du territoire français.