Pour présenter
son premier roman Zouaoui Guerfi «Azza», a choisi sa ville natale Biskra. Dans
la petite salle de conférences de la maison de la Culture Rédha Houhou,
agréablement rénovée, les passionnés du livre et de la culture se sont
rencontrés pour rallumer cette bougie qui continue malgré, l'indigence
spirituelle qui enveloppe le quotidien biskri, d'éclairer le paysage culturel
de la ville. Ce premier roman de Zouaui Guerfi est né dans la douleur, une
douleur qui aura duré 10 ans! «Dix ans d'attente pour se faire publier dans son
propre pays, c'est trop!» dira l'auteur, déçu par la déréliction dans laquelle
certains éditeurs privés mettent leurs clients. Cependant, connu pour sa
ténacité, Guerfi déposera sur conseil de ses amis, une copie de son roman dans
cette petite ouverture que le ministère de la Culture a créée pour les nouveaux
auteurs algériens. Il sera enfin édité à l'ENAG. Sous une pochette sobre,
l'ouvrage, dans un format de poche de près de 200 pages, fait un travelling sur
la vie d'un Algérien, Saïd, né en France et qui renoue avec son pays. Né du
scénario d'un film (Equations Sahariennes) dont le tournage, entamé dans les
années 90, n'a pu s'achever «Le travelling du crabe» est devenu un roman où les
dimensions spatiales et temporelles sont éclatées en de multiples fragments
pour être recomposés selon leurs teintes et leurs sonorités particulières.
Empruntant à Alain Robbe-Grillet sa technique du roman puzzle et à Balzac la
description minutieuse, l'auteur dévoile aussi des qualités artistiques de
peintre, de cinéaste et de journaliste reporter subjugué par la ville de
Ghardaïa où «le réel et l'imaginaire peuvent quelquefois coïncider parfaitement».
Exprimant sa déchirure profonde sur le sort réservé à la ville où lui et ses
parents sont nés, il parlera de Ghardaïa, une ville dont il est «tombé amoureux
dès la première visite». Symbole d'une société organisée et solidaire où «le
tous pour un et un pour tous» n'est pas un vain slogan. «Je pense dira le
romancier, que quelque part l'écrivain ou l'artiste ont un rôle très important
à jouer pour au moins freiner cette décrépitude incessante qui s'installe dans
nos villes». Pendant plus de deux heures, Zouaoui Guerfi a réussi à captiver un
auditoire, loin de lui être acquis au départ, mais cassant les tabous et
froissant les protocoles, il déclenchera cette étonnante spontanéité chez un
public animé d'un désir fou de parole libre. Nombreux au cours de la séance de
dédicace lui ont demandé la date de sortie du prochain roman.