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La LADDH accuse Zerhouni et répond à Ksentini

par M. Aziza

Le troisième Congrès de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (LADDH) s'est déroulé jeudi dernier, et ce, malgré « les inattendus et l'attendu ».

Prévu initialement à la Mutuelle de construction de Zeralda, le congrès a été déplacé par les membres de LADDH vers la Maison des syndicats à El-Harrach, et ce, après le refus de la wilaya d'Alger de l'autoriser. Pourtant, disent les organisateurs de ce congrès, la demande d'autorisation a été déposée le 24 février dernier, et la réponse négative n'a été donnée que la veille de la tenue du congrès, aux environs de 20h10.

 Les membres de la ligue ont pu tout de même tenir leurs assisses nationales en présence de 105 congressistes, de l'ambassadeur d'Espagne en Algérie et représentant de l'Union européenne, les représentants de l'ambassade du Canada, des Etats-Unis, de France ainsi que des militants des droits de l'Homme tunisiens et le représentant du réseau euro-méditerranéen pour les droits de l'Homme. Maître Mustapha Bouchachi, président de LADDH a dénoncé cette interdiction «non justifiée décidée par un régime totalitaire qui veut étouffer toute voix discordante».

 Maître Ali Yahia Abdenour, président d'honneur de la Ligue a pointé du doigt le ministre de l'Intérieur. «En tentant d'empêcher le tenue de ce congrès, Yazid Zerhouni agit comme un consul romain d'il y a 22 siècles», a-t-il lancé en précisant «que notre pouvoir n'a pas encore compris que l'Algérie de 2010 n'est pas l'Algérie de 1962, ou celle des années 80 et des années 90». Il poursuit «il faut que tout le monde comprenne que le peuple algérien a évolué, l'Algérien veut être traité comme un citoyen et non pas comme un sujet». Le représentant de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme a condamné «l'attitude inadmissible des autorités algériennes». Celui du Conseil national des libertés et de la protection des droits de l'Homme tunisien dira, pour sa part, «qu'en Tunisie les choses sont plus complexes». Il ajoute que si la ligue algérienne a pu tenir son congrès dans des conditions difficiles, la ligue et le conseil des droits de l'Homme en Tunisie n'ont pu avoir cette chance. «On se bat depuis 10 ans pour la tenue de notre congrès, mais on n'arrive pas», a?t-il dit en précisant que les membres de la ligue et du conseil n'ont même pas le droit d'accéder à leurs bureaux, qui sont encerclés par la police tunisienne 24h/24. Et d'affirmer que les plus tenaces parmi les Tunisiens contre les intimidations et les pressions policières, sont appelés «Algériens». Le porte-parole de la Ligue algérienne des droits de l'Homme, Aissa Rahmoune, a affirmé que deux agents tunisiens en civil se sont déplacés à la Maison des syndicats pour suivre les travaux des assises nationales, mais ils ont quitté les lieux après le refus des organisateurs du congrès de les autoriser à assister. Condamnant à l'unanimité l'interdiction de la tenue du congrès « sans motifs », les congressistes et certains invités ont abordé quelques « points noirs qui ne font pas l'honneur d'un pays qui a sacrifié un million et demi de martyrs pour son indépendance ».

 Mustapha Bouchachi a réclamé au nom des défenseurs des droits de l'Homme, la levée de l'Etat d'urgence en Algérie, affirmant qu'il n'a pas sa raison d'être », d'autant que les choses se sont beaucoup améliorées du point de vue sécuritaire. En de s'interroger sur les raisons du maintien de cette mesure ? « On ne peut pas tourner la page sans connaitre la vérité » Mustapha Bouchachi a évoqué en outre « la torture exercée encore dans les prisons et dans les commissariats de police ». Bouchachi a affirmé que « la torture est beaucoup moins pratiquée par rapport aux années précédentes et par rapport aux années sanglantes, mais elle existe encore». Il poursuit, « du moment que l'Algérie a ratifié de nombreux traités et conventions contre la torture et autres peines, traitement inhumains ou dégradants, elle est obligée de bannir à jamais ces pratiques». Revenant sur l'interruption du processus électoral et « les violations des droits de l'Homme», il dira qu'aucun pays ni en Afrique, ni en Asie, n'a enregistré autant de morts (200 000 morts) après un arrêt de processus électorale». Tout en reconnaissant qu'il n'y a plus d'exécutions extrajudiciaires, et de disparitions forcées, Bouchachi affirme que le pouvoir en place doit régler des dossiers épineux comme celui des disparus « resté en suspens ». Tout en rendant hommage aux familles de ces derniers, il a affirmé que sans vérité sur le sort des victimes, personne ne pourra « tourner la page ». Et Ali Yahia Abdenour d'enchaîner « sans vérité et justice personne ne peut tourner la page ». Ali ajoute que le pouvoir algérien a mis la paix avant la justice, alors qu'il fallait commencer par la justice pour asseoir une paix « durable ». Des représentants de familles de disparus, présents au congrès, ont qualifié les dernières déclarations de Farouk Kesentini selon lesquelles « il est impossible de connaître la vérité en raison de l'absence des fichiers des disparus» de contradictoires. «Il n'y a pas longtemps, il avait affirmé que la gendarmerie a un fichier de 7.000 disparus», ont-ils déclaré. Et d'ajouter «nous avons remis au service concerné 24 dossiers ficelés avec tous les détails, mais sans réponse. Ils nous demandent de tourner la page». Ils poursuivent «on ne peut tourner la page sans connaître la vérité». Les travaux du congrès se sont poursuivis hier, tard dans la soirée, avec des débats sur notamment le droit économique et social et sa relation avec les droits de l'Homme, développement et stratégie de LADDH, et l'adoption d'un statut et règlement intérieur.           Une conférence de presse sera animée aujourd'hui samedi par la LADDH.