Après les semaines plutôt chaudes que nous
avons vécues durant les mois de janvier et février, mars est venu nous rappeler
que nous étions toujours en hiver et que ces températures, plus que clémentes
étaient exceptionnelles. Ainsi et après les pluies et le froid qui se sont
installés depuis le début de la semaine dernière, sur tout le nord du pays, les
montagnes de l'Atlas blidéen ont revêtu leur manteau blanc des grands jours
fastes. Bien entendu, c'était une quantité de neige importante. Depuis les
«Deux bassins» sur la RN8, en allant vers Tablat, aux «Oreilles du chat», sur
les hauteurs de Hammam Mélouane et Megtaa Lazreig, aux monts merveilleux de
Bouinan, pour arriver jusqu'à Chréa, tout était blanc et le froid mordant
arrivait jusque dans les villes. Et bien entendu, la neige constitue une
curiosité et un moyen d'évasion sans pareil pour les citadins stressés et
toujours pressés. Ils trouvent là une blancheur immaculée qui tranche avec leur
vie, au propre comme au figuré et tous ressentent le calme et le silence les
envahir et leur faire oublier les difficultés quotidiennes. Et comme la neige
est tombée la veille du week end, ils étaient des milliers à se rendre à Chréa,
en voiture ou en bus. La route qui monte vers les hauteurs enneigées est prise
d'assaut et la circulation y est plutôt difficile. Il faut d'ailleurs plusieurs
heures pour parcourir les quelque 18 km, jusqu'à Chréa. La plupart des familles
s'arrêtent en cours de chemin, les enfants étant trop impatients de gambader
dans la neige. Ils étaient d'ailleurs les plus nombreux et leurs cris stridents
et joyeux étaient emportés au loin par l'écho, dans un froid glacial qui
faisait rosir leurs oreilles. Les femmes marchaient prudemment tout en
surveillant leur progéniture d'éventuelles chutes. Toute la journée du jeudi et
jusqu'au crépuscule, les policiers, gendarmes et pompiers ont eu fort à faire
pour canaliser cette véritable marée humaine qui s'est dirigée vers Béni Ali et
Chréa, comme si ces gens avaient besoin du romantisme des lieux pour se
rapprocher et s'aimer davantage. Durant la journée du vendredi, le même
spectacle s'est répété, avec d'autres gens, d'autres voitures, d'autres enfants
qui ont oublié, pour une heure ou deux les vicissitudes de la vie, les examens,
les grèves et même le froid, tout en y étant en plein. Avec ces chutes de neige
accueillies dans la joie et l'espoir, ce sont aussi les agriculteurs qui ont
retrouvé le sourire en voyant le spectre de la sécheresse s'éloigner et en
comptant déjà les dividendes qu'ils vont tirer de leurs terres.