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PRIME A LA CASSE A L'ENVERS ?

par El-Houari Dilmi

Echaudé par une application presque à la hussarde du nouveau code de la route, l'automobiliste algérien, le bon comme le mauvais, est comme contraint de remiser son véhicule au garage de toutes nos pannes.

 L'augmentation des tarifs de l'assurance automobile, notamment dans son segment de la responsabilité civile, ajoutée au renchérissement quasi rédhibitoire des frais généraux d'exploitation d'un véhicule particulier (entretien, pièces de rechange, vignette, contrôle technique, etc.) finit par donner au marché automobile dans notre pays des allures d'un véritable marché de dupes. Au motif peu convaincant de «rééquilibrage technique» entre les recettes et les dépenses pour les compagnies d'assurances, pourquoi décider sans crier gare d'une augmentation qui n'est pas supportable par tous les tarifs d'assurances, lorsque les automobilistes algériens ne sont pas tous responsables de l'hécatombe des accidents de la route et des retombées effrayantes au double plan humain et matériel ?

 Le marché des assurances, toutes branches confondues, étant encore vierge en Algérie si on le compare avec nos seuls pays voisins, et la gamme des produits d'assurances si réduite, pour quelle(s) raison(s) valable(s) se concentrer sur le seul produit (le plus rentable de tous ?) de l'assurance automobile, obligatoire pour tous au demeurant, lorsqu'on sait qu'en terme d'enjeux financiers, obliger par la loi tous les Algériens à assurer leurs habitations contre les catastrophes naturelles ou autres rapporterait dix fois plus, sinon davantage, aux compagnies d'assurances et si peu à l'assuré ?

 La «solution de facilité» qui consiste à «punir» tout le monde sans distinction aucune, alors que tous les automobilistes ne sont pas «égaux» face aux accidents enregistrés chaque jour sur nos routes et, partant, aux dépenses certes importantes consenties par les compagnies d'assurances, pourquoi ne pas faire payer le prix fort à celui qui utilise son véhicule comme une arme à feu plutôt qu'à celui dont le seul «tort» est d'emprunter la route, en ne commettant aucune faute, et donc ne coûtant presque rien à son assureur?

 L'expérience, dont l'efficience est prouvée avec succès sous d'autres cieux, pourrait bien s'appliquer chez nous, qui consiste à dresser un fichier national des chauffards récidivistes (et ils sont nombreux), ces derniers devant logiquement supporter plus que tous les autres usagers de la route les frais d'une véritable hécatombe, pas seulement pour les compagnies d'assurances mais aussi pour la santé publique et la Caisse nationale des assurances sociales, qui dépensent, il est vrai, des sommes faramineuses pour la prise en charge des accidentés de la route.

 Parce que l'augmentation «mécanique» des tarifs de l'assurance automobile, deux fois en l'espace de deux années seulement, ne garantit en rien un meilleur équilibre financier pour les assureurs ; prendre le problème par le mauvais côté revient à mettre tout le monde dans le même panier, ce qui est une violation flagrante du principe intangible d'égalité de tous les citoyens devant la loi. A moins de se résoudre à faire comme les autres mais dans le mauvais sens : allouer une sorte de prime à la casse en augmentant de façon quasi exponentielle des frais d'acquisition et d'exploitation d'un véhicule, jusqu'à obliger tout le monde à se débarrasser de ses «pieds», selon le bon vieux adage populaire, et revenir carrément à l'ère des machines à vapeur, bien plus économiques il est vrai et surtout plus écologiques. Cela juste pour se mettre dans l'air du temps?