L'enfant prodige
de Ghazaouet,Abdelkader Secteur, a fait un triomphe, vendredi dernier, à la
salle «Mascara» du Sheraton d'Oran. Avec un spectacle qui a duré plus d'une
heure et demie, il a réussi la prouesse de déclencher les zygomatiques de
l'assistance de façon quasi-permanente. La salle où s'est joué le spectacle, ne
pouvant contenir plus de 800 places, a été à ce point débordée qu'une
cinquantaine de personnes au moins, sinon plus, ne trouvant plus de places
assises, se sont résignés à rester debout, mais à ne rien rater de ce show
hilarant, dont le titre est : «vie de chien». Pendant plus d'une heure et demie
donc, l'humoriste a fait rire aux larmes une salle pleine à craquer, conquise
d'avance et charmée à l'écoute de telles galéjades. Pourtant, si les vannes
lancées à l'assistance incitaient à rire à gorge déployée, les thèmes abordés,
eux, ne se prêtaient pas du tout à l'humour? et c'est seulement à partir de là
qu'on peut reconnaître le génie de cet artiste : réussir à faire rire, voire à
faire hurler de rire? avec du triste ! Telle est d'ailleurs, faut-il le
rappeler, la devise du grand humoriste français d'origine algérienne, Guy Bedos
! Abordant tour à tour des sujets sérieux, tel la situation difficile des
sans-papiers algériens, voire carrément des sujets morbides, tel le déroulement
d'une cérémonie funèbre à la sauce algérienne et, tour à tour, abordant des
sujets plus légers, telle la nervosité légendaire et innée des Algériens, et sa
comparaison subtile avec la politesse systématique des Français où, à chaque
fois, le «bonjour monsieur» est de mise. Abdelkader Secteur a voulu coller le
plus possible à la réalité de son pays, mais à la condition toutefois de la
tourner en dérision. Et autant dire que le pari a été gagné : cette façon de
grossir les traits du caractère algérien, de pointer du doigt nos défauts afin
de mieux nous corriger, de choisir l'autodérision comme forme d'humour
dénonciateur des tares de cette société où la misère sociale est encore de
mise? cela peut très bien s'assimiler à ce qu'on peut appeler, pourquoi pas ! à
du néo-réalisme algérien ! C'est en 1998, à l'occasion d'une panne
d'électricité lors d'un mariage à Ghazaouet, qu'Abdelkader, histoire de faire
marrer ses potes, s'est improvisé humoriste, et c'est là que la mayonnaise a
pris ! «Tout a débuté par les mariages, nous a-t-il dit lors d'un entretien,
ensuite, ça a pris petit à petit de l'ampleur avant que je ne sois invité, en
2005, à la radio de Tlemcen? là, j'ai commencé à être très connu dans cette
région, je me suis alors attaqué à d'autres villes, comme Oran et Alger ;
parallèlement, il faut dire que youtube m'a été d'une grande aide : grâce à
lui, j'ai pu faire connaître mes sketchs à l'étranger? C'était une sorte de
fenêtre sur le monde !». Et c'est grâce à Youtube justement que Jamel Debbouze
le découvre en 2009 et l'invite en France pour participer au «Jamel Comedy
Club», l'émission sur canal plus qui met sous le feu des projecteurs de jeunes
talents comiques spécialisés dans le «stund-up». Son passage au «Jamel Comedy
Club» marquera un tournant dans sa carrière : le voilà à présent reconnu par le
milieu professionnel ! Né le 21 juillet 1965 à Ghazaouet, Abdelkader Secteur
est marié et père de trois filles. Avec «Vie de chien», il signe son premier
one-man-show, et a déjà obtenu, grâce à lui, un succès foudroyant. Cette
mini-tournée l'ayant conduit jeudi dernier au Hilton d'Alger, et vendredi
dernier au Sheraton d'Oran, a été concoctée par les deux boîtes Chaos
Productions et Thinks Box. Karim, son manager, nous a assuré qu'il y aura
bientôt une tournée générale à travers toute l'Algérie, à des prix plus
accessibles pour un plus large public. Cette tournée doit débuter, si tout se
passe bien, à partir du mois de juin prochain.