Le Sommet extraordinaire de l'UE, tenu à Bruxelles jeudi et vendredi, et
réservé au diagnostic de la crise grecque et les moyens de l'aider, a été
surpris par l'ampleur des dégâts. Pas seulement en Grèce. Inquiétant.
Réunis en Conseil extraordinaire,
jeudi et vendredi à Bruxelles, les 27 chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE
ont fait plus dans le constat et l'expertise de la situation de faillite
économique et financière de la Grèce que de la mise en place d'un plan de
sauvetage précis de ce pays. Le dilemme est de taille pour l'UE : si l'aide à
la Grèce tarde, ce sont d'autres pays de l'UE qui seront touchés. La réaction
en chaîne de l'effet de crise est inévitable tant les économies des pays de
l'UE sont interdépendantes, en particulier celles des 16 pays ayant l'euro en
monnaie commune et dont la Grèce en fait partie. Par ailleurs, la certitude de
l'ampleur de la crise grecque n'est pas réellement évaluée dans la mesure où le
niveau des déficits n'est pas certifié. Des 8 % annoncés le mois dernier par le
gouvernement grec sortant (conservateur) Bruxelles découvre que le déficit
public (par rapport au PIB) a atteint 12,7 % et la dette publique plus de 120
%. C'est en langage courant une situation de cessation de paiement. Qu'ils sont
loin les critères de convergence et de stabilité énoncés par le Traité de
Maastricht et confortés par celui de Lisbonne, et qui fixent le plafond des
déficits publics à 3 % du PIB et la dette à 60 %. Pourtant, il va bien falloir
courir au secours de la Grèce. Tout le problème est de s'entendre sur les moyens
et la méthode. Exit la Banque centrale européenne (BCE), puisque le Traité de
Lisbonne (qui est entré en application depuis janvier dernier) l'interdit.
Jeudi soir à Bruxelles, le président du FMI a fait savoir que son Institution
était disposée à secourir la Grèce. Que non ! Ce serait un non-sens qu'un pays
membre de l'UE (première économie mondiale) et membre de l'euro groupe en
arrive à se mettre sous tutelle du FMI. Que faire ? Vendredi, les 27 premiers
responsables de l'UE ont laissé entendre quelques pistes : prêts financiers
bilatéraux ; mise sous tutelle (contrôle) de l'économie grecque par la
Commission européenne ; garantie par les pays de la zone euro d'emprunts
obligataires à la Grèce etc. En contrepartie, un plan de rigueur drastique est
demandé au nouveau gouvernement socialiste grec : gel des salaires, coupes
budgétaires dans le budget de l'Etat ; réductions des offres sociales etc. Même
si rien de précis n'a été arrêté ce vendredi à Bruxelles, il n'en reste pas
moins que l'UE ne peut, en toute logique, laisser tomber un de ses membres,
partie prenante de l'euro groupe. La grande interrogation qui taraude les
spécialistes de l'UE est la suivante : à qui le tour après la Grèce ? On cite
le cas du Portugal et ses 8 % de déficit public. Bien sûr, mais la France qui
pointe le doigt vers ce pays accuse un score plus grave : 8,12 %. L'Espagne et
l'Italie ne sont pas loin avec un peu plus de 7 % de « découvert » public. Cela
pour dire que même si les uns et les autres de ces pays disposent de quelques
garanties supplémentaires (industries) pour emprunter, il leur sera difficile
d'éviter le FMI et autres aides bilatérales. La leçon (non dite) de ce premier
sommet, sous patronage du 1er président « stable » du Conseil européen, est que
la crise financière débarquée à l'été 2008 en Europe n'est pas encore dépassée
et n'a pas fini en conséquences dramatiques sur les économies réelles des pays
européens. C'est que malgré les aides colossales des Etats aux banques, malgré
la multiplication des rencontres du G 20 et les déclarations moralisantes de
circonstance, le marché financier mondial continue son jeu spéculatif et sa
course folle vers le profit maximum. Dans ces conditions, il n'y a pas place
pour la solidarité de principe, seules comptent les garanties de gains que peut
avancer tout demandeur de prêts. La Grèce en présente peu, et avec cette
logique capitalistique ultra libérale, aucun pays européen n'est à l'abri de ce
genre de crise. Les clignotants sont au rouge en France, en Espagne, au
Portugal, en Italie? Qui a dit que la crise financière mondiale de 2008 est
maîtrisée ? Et si elle commençait seulement à frapper à la porte de l'UE ?