
Sans
tomber dans la veulerie égyptienne après le match du Soudan, le chroniqueur qui
n'a pas une grande culture sportive a dû vérifier: est-ce vrai que la CAF
(Confédération africaine de football) se trouve en ex-Egypte ? Réponse, oui.
Elle aussi, comme presque tous les sièges des organisations dites arabes
unionistes, qu'elles soient celles des médecins, des avocats ou des fabricants
de boutons de chemise. La CAF se trouve en ex-Egypte et avec le même schéma
connu: un personnel égyptien, une adresse égyptienne et, comme de coutume, un
Egyptien aux commandes depuis l'époque où Amr Moussa chassait les mouches avec
une cuillère pour s'amuser en attendant d'avoir dix ans. Comme pour l'union des
médecins qui doit subir un coup d'Etat hygiénique dans quelques semaines, l'un
des patrons est un Egyptien qui est là depuis son enfance. A vie presque. Le
poste de secrétaire général de l'instance est égyptien depuis 1961. L'actuel SG
de la CAN, Mustapha Fahmy, est ainsi en poste depuis 1982. On apprend aussi
qu'il a succédé à son père, Mourad Fahmy, qui a occupé le poste de 1961 à 1982.
Dans la pure tradition du «c'est à moi parce que c'est à mon père» qui perpétue
l'héritage de Nasser sous la forme d'un livret de famille des «Arabes purs», à
savoir les ex-Egyptiens. Ce Fahmy est donc un autre acteur du même personnage
égyptien chargé de mission de mettre toutes les institutions arabes sous la
coupe de ce pays. On croyait Amr Moussa cas unique, sous-informés que nous
étions, et nous voilà en train de découvrir que presque toutes ces carcasses
mangeuses de budgets sont égyptiennes de fait. L'union des médecins a longtemps
subi le ridicule d'un SG égyptien à vie, signataire de subventions pour les
zones rurales de son propre pays. C'est le cas pour tout le reste.
Pourquoi en parler maintenant ? Parce que
s'il y a un une leçon à tirer et un acte à faire aujourd'hui, c'est bien
d'ouvrir le dossier de ces privatisations égyptiennes et de ces détournements
de fonds et de missions des instances arabes corporatistes ou politiques. Il
est évident que l'on s'est fait avoir, du Golfe à l'Océan, par cette sorte
d'impérialisme culturel qui a fait passer tout ce qui est égyptien pour étant
arabe et vrai arabe, et qui nous a imposé d'accepter comme capitale Le Caire et
comme adresse permanente de nos sièges ce pays et comme SG baveux et
ventriloques ces cadres égyptiens. «L'Egypte n'est pas ma mère, je ne l'accepte
même pas comme épouse et encore moins comme seconde épouse», explique un
personnage imaginaire qui s'adresse à ses propres ancêtres. Le ridicule ne tue
pas en effet, mais il rend la vie disgracieuse: car on ne sait pas s'il faut
rire ou pleurer de voir que le secrétaire général de la CAF est là depuis plus
de 25 ans, depuis sa puberté et qu'il a hérité de ce poste de son propre père
pendant que nous, peuples du Maroc à l'Irak, nous applaudissions l'arabité
pendant que eux ils s'en goinfraient. Et s'il faut en parler aujourd'hui, c'est
pour que cela cesse. Pour que les corporations, les métiers et les politiques
se réveillent à cette arnaque et choisissent soit de claquer les portes de ces
clubs qui nous apportent rien, de la Ligue arabe à celui de la CAF, soit peser
de toutes les forces de la diplomatie, de l'argent et des corporations de
métiers, pour démocratiser ces espaces et les assainir. En attendant, le
chroniqueur n'arrive pas à l'admettre: comment cela fait-il qu'on a pu fermer
les yeux sur ces Ali Baba de la légitimité, capables de secrétariats à vie sans
honte et sans recul, à la tête de ce qui nous appartient à tous ? Comment
avons-nous fait pour être aussi naïfs et depuis des décennies ? A cause de nos
régimes ? Oui, un peu, mais aussi à cause du cinéma égyptien et du cadavre de
Nasser.