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Le communiqué provocateur

par Kharroubi Habib

Le communiqué provocateurLa détermination qui anime les grévistes du complexe véhicules SNVI de Rouiba n'a nullement été entamée par la répression dont ils ont fait l'objet et le désaveu que leur a opposé la centrale UGTA. Ils l'ont prouvé en décidant hier la poursuite de leur mouvement revendicatif.

 A vrai dire, leur décision n'est pas pour surprendre car le comportement des autorités et la prise de position de l'UGTA, au lieu de les pousser vers la voie de l'apaisement et du dialogue, les ont contraints à ce choix. Leur fronde va donc se poursuivre avec l'élément nouveau qu'elle va très certainement faire tache d'huile dans la très sensible zone industrielle de Rouiba. D'autres collectifs de travailleurs d'entreprises publiques et même privées ont d'ores et déjà exprimé leur solidarité avec les grévistes de la SNVI et annoncé leur intention de rejoindre activement leur action revendicative.

 Si cela se concrétise, c'est la zone industrielle de Rouiba qui risque d'être paralysée. Un scénario que Sidi Saïd et la centrale UGTA ont eu présent à l'esprit quand ils ont rédigé leur communiqué désapprouvant le débrayage spontané des travailleurs du complexe véhicules SNVI.

 A bien décrypter ce message que l'UGTA a adressé, non aux concernés mais à «l'ensemble des travailleurs et de la famille syndicale», l'on ne peut qu'y voir une tentative de stigmatisation des grévistes accusés en sous-entendu de n'être pas reconnaissants des mesures favorables décidées au profit de leur entreprise par le président de la République et les pouvoirs publics. Autrement dit, la centrale somme les autres travailleurs et ses affiliés de ne pas voir de la légitimité dans les revendications des grévistes de la SNVI. C'est tout juste si le secrétaire général de l'UGTA n'a pas dénoncé ceux-ci comme ayant agi au détriment de ce redressement de leur entreprise que les mesures gouvernementales prises en sa faveur font entrevoir.

 Le communiqué du patron de la centrale UGTA est tombé à plat. Son plaidoyer pour la politique gouvernementale n'est pas ce que les grévistes et l'ensemble des travailleurs attendaient de lui à l'occasion de ce conflit social qui a éclaté au complexe SNVI. Ils ont voulu et veulent encore qu'il se prononce clairement sur les deux revendications phares qui en sont les déclencheurs. A savoir des augmentations de salaires d'une autre consistance que celle entérinée par la tripartite de décembre 2009 et le maintien du dispositif actuellement en vigueur des départs en retraite. Ce que Sidi Saïd a refusé d'aller discuter avec les grévistes et auxquelles il a fait juste référence dans son communiqué, en promettant, pour la première, une vague perspective de négociation sur le sujet dans le cadre des conventions collectives de branches et d'entreprises et, pour la deuxième, le maintien du dispositif de retraite en vigueur jusqu'à promulgation du nouveau texte de loi.

 Il n'y a plus grand monde pour croire aux promesses de l'UGTA et les travailleurs de la SNVI l'ont prouvé en déclenchant leur protesta en dehors de son cadre organique. Et ils sont suivis par les salariés des autres entreprises qui ont décidé de rejoindre leur mouvement dans les mêmes formes.

 Dans ce conflit, la balle est dans le camp des pouvoirs publics. Le pourrissement qu'ils veulent lui faire subir en faisant la sourde oreille à la demande de dialogue des grévistes est porteur de dangereux développements, comme le montrent les affrontements s'étant déjà produits à Rouiba et l'extension de la protesta à d'autres entités industrielles de la zone de Rouiba.

 Sa persistance dans le temps et d'éventuels dérapages peuvent être les ingrédients d'une fronde sociale à la dimension nationale.