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Code du travail : Le «fameux» article 87 bis

par Ghania Oukazi

Le dernier relèvement du salaire national minimum garanti (SNMG) n'aura pas d'incidence notable sur les salaires en raison de sa connexion directe avec le salaire de base et l'ensemble des primes et indemnités accordées aux travailleurs.

« Il n'est pas question d'abroger l'article 87 bis mais de l'amender et de l'inclure dans le nouveau code du travail», a déclaré, la semaine dernière, le ministre du Travail aux journalistes en marge de la réunion du comité exécutif du FLN.

 Le secrétaire général de l'UGTA qui a de tout temps revendiqué son abrogation, nous explique le procédé autrement. «L'abroger, l'amender, le réviser, les termes m'importent peu, je me suis engagé à lui enlever les blocages qui pèsent lourdement sur son évolution et je le ferais», nous a déclaré Abdelmadjid Sidi Saïd à ce sujet. Le patron de la centrale syndicale veut «aller, nous a-t-il dit, vers un SNMG universel». Il rappelle que l'article 87 bis est contenu dans les lois sociales 90-11 régissant les relations de travail. Il a été ainsi élaboré pour, nous disent les juristes de l'UGTA, détourner «quelque peu» les conditionnalités du FMI et leurs terribles conséquences sur le monde du travail en terme «de fermeture d'entreprises et de mise au chômage de milliers de travailleurs pour raisons économiques avec la garantie de 32 ans d'activité pour prétendre à la retraite». Dès les années 90, il avait donc été décidé à travers cet article, de connecter les différentes primes et indemnités au salaire de base.

 Pour cette fois, la nouveauté que les partenaires sociaux veulent apporter à cet effet est d'inclure en premier l'article en question dans le code du travail qui en lui-même est une première pour le monde du travail. Proposé en 2006, les dispositions de ce nouveau code continue depuis d'être «mâchées» par un groupe de travail composé de représentants des partenaires sociaux. «C'est quelque chose de lourd», se défend Sidi Saïd à propos de ces longues années pour un travail qui n'a toujours pas été finalisé. La centrale syndicale prévient d'ores et déjà que «le code du travail prendra toute l'année 2010 parce que la révision de l'article 87 bis et le calcul du SNMG n'en sont qu'une infime partie. On a aussi le travail temporaire, le travail force, le travail des enfants...». D'ailleurs, la question d'un SNMG universel n'est toujours pas tranchée. «On table plutôt sur un salaire national minimum d'activité qui, lui contrairement au SNMG, comportera différentes références pour un ensemble de choses y compris pour les retraités», nous explique Sidi Saïd.

 Sur un simple calcul, des cadres du ministère du Travail reconnaissent que le dernier relèvement du SNMG n'aura qu'une incidence infime sur les salaires. «Prenons par exemple la catégorie des retraités, avec un SNMG à 15 000 DA dès le 1er janvier 2010, ceux des moudjahidine percevront en plus 7000 DA alors que les retraités des autres secteurs n'auront en plus que 1200 DA, ce qui est loin d'être un indice d'équité entre les travailleurs.» L'on affirme ainsi que même bousculé, le SNMG n'aura aucune influence sur la globalité du salaire susceptible d'atténuer de la dégradation du pouvoir d'achat. «Il ne rattrape rien», a avoué un cadre du ministère du Travail. Le SG de l'UGTA affirme que «c'est le 87 bis qui gêne, il faut donc absolument qu'on évacue les primes du salaire de base pour que le SNMG ait son importance». Sidi Saïd estime pour cela qu'il est nécessaire de compter les primes en dehors pour qu'elles n'amortissent pas le gain en cas de relèvement du SNMG et pour qu'on puisse jouer dessus pour faire arriver les salaires à un seuil respectable. Ce qui implique que toutes les primes et indemnités perçues jusque-là par les travailleurs qui vont être revues. Le calcul de certaines d'entre elles prendra en compte, entre autres, la production et la productivité. «Le tout sera calculé sur la base d'un certain nombre de paramètres universels retenus par le Bureau international du travail», nous dit Sidi Saïd. Le groupe de travail qui aura la tâche de conformer les textes législatifs et réglementaires nationaux aux normes du BIT devra, selon l'UGTA, «préparer une batterie de propositions sur le SNMG et la révision de l'article 87 bis».

 Sidi Saïd est convaincu que le nouveau code du travail, une fois adopté, sera obligatoire pour les secteurs publics et privés, sans aucune distinction. «Ce nouveau code obligera tout le monde à appliquer les conventions de branches, qu'ils soient dans le public et ou dans le privé», nous disent les syndicalistes. Une aubaine pour l'UGTA qui se dit prête à prendre son bâton de pèlerin pour veiller à sa bonne application à travers l'ensemble du territoire national. Sidi Saïd confirme cette ambition et souligne que «le code du travail va réglementer tout ce qui se passe dans le monde du travail, tout passera par la force de la loi». Il est plus question, dans ce sens, de faire plier les patrons dans le secteur privé «pour qu'il y ait moins de tricherie», relèvent les syndicalistes. Le SG de l'UGTA affirme en effet qu'«après l'adoption du nouveau code, aucun patron privé n'opposera à ses dispositions une fin de non-recevoir. Il y va de la stabilité des ayants droit.»