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Une «croissance molle» à caractère d'«évanescence» et ancrée dans une
«économie de rente». C'est sans doute ce qu'il faut retenir de l'allocution du
président du CNES, Mohamed-Seghir Babès, à l'ouverture des travaux du Conseil
national économique et social, jeudi dernier.
Deux rapports étaient au menu de ces travaux. «L'état économique et social de la Nation de l'année 2008» et les «Perspectives de conjoncture pour l'année 2009». Au-delà des chiffres présentés et des lectures qui peuvent en êtres faites, l'économie algérienne reste marquée par la dépendance de facteurs exogènes, non maîtrisables par définition. Le plus importante étant le prix du baril de pétrole dont la dégringolade a provoqué une baisse drastique des recettes en devises. Comme pour relativiser son propos, M. Babès explique que les investissements engagés par les pouvoirs publics étaient nécessaires et que «ce n'était pas évident que l'argent qui a été dépensé le soit de cette manière», malgré «quelques dégâts collatéraux». A propos des «dégâts collatéraux», il n'en dira pas plus. Il explique, plus loin dans son intervention, qu'il était nécessaire de consentir de tels investissements après «plus de 25 ans de désinvestissement». Il rappelle qu'il était préférable de lancer des gros projets pour «établir une base matérielle» nécessaire pour la construction d'une «véritable croissance», plutôt que de suivre «certaines voix» qui poussaient vers la création de «Fonds souverains». Mais «il faut passer à autre chose. A une vraie économie d'offre» pour «s'installer dans la durabilité», ajoute-t-il. Il propose de s'intéresser de près à la qualité des emplois créés car, dit-il, «pour avoir un emploi durable et de qualité, il faut un autre genre de croissance». Risque sur la balance des paiements pour 2009 Dans son document sur les «Perspectives de conjoncture pour l'année 2009», le CNES estime que les répercussions de la crise financière «ont été plus sensibles au premier semestre 2009», qui a été caractérisé par la chute des prix du pétrole. «Les recettes de l'Algérie ont baissé de 42% et l'excédent de la balance commerciale ne s'élève qu'à 1,01 milliard de dollars, augurant un probable déficit de la balance des paiements en 2009», constate le rapport. Ce dernier prévoit que l'excédent commercial, qui a atteint 4 milliards de dollars en novembre 2009, «ne pourra pas compenser le manque engendré par les importants transferts de devises liées au rapatriement des sociétés étrangères». «Il convient de souligner, précise le CNES, que le déficit annuel serait d'environ 3% du PIB, selon le FMI». Néanmoins, ajoute le CNES, «l'Algérie jouit toujours d'une position confortable grâce à des réserves internationales appréciables évaluées à 146 milliards de dollars» à fin septembre 2009. Un montant qui permet au pays de «couvrir quatre années d'importations». Sans compter la «manne financière déposée au Fonds de régulation susceptible d'éponger les déficits budgétaires pendant au moins deux ans». Toujours dans le chapitre des résultats de l'année en cours, le Conseil constate une baisse de 10% du volume des exportations des hydrocarbures et de 45% de leur montant global durant les 11 premiers mois de l'année. Côté importations, leur montant global durant la même période a atteint les 35,27 milliards de dollars, soit une légère baisse de 2,17%. Cette baisse a été essentiellement portée par celle des produits alimentaires, dont les importations ont régressé de 26%, ce qui correspond à 5,35 milliards de dollars contre 7,24 milliards durant la même période de 2008, et celle du groupe des «demi-produits» a également reculé en passant de 1,3 milliard à 651 millions, soit - 50,2%. Dans ce chapitre des «équilibres internes», le rapport du CNES a passé en revue les mesures prises dans la loi de finances complémentaire 2009, ainsi que le budget public arrêté pour ce même exercice. «L'évolution de la conjoncture économique internationale, au cours de l'année 2009, a suscité la prise de mesures correctives et des réajustements appropriés dans le cadre de la loi de finances complémentaire, à l'effet d'une revalorisation des engagements budgétaires de l'Etat et donc des équilibres internes de la Nation», affirme le rapport. Le CNES fait état du recul de plus de 35% du niveau de la fiscalité pétrolière au 1er semestre 2009, qui passé à - 47% à la fin du 3e trimestre du même exercice. Cependant, le rapport estime que ce recul de la fiscalité pétrolière a été «en partie compensé» par la fiscalité ordinaire, qui a enregistré une hausse de «plus 20% sur les onze mois de 2009». Part «insignifiante» des IDE et une bonne performance pour le privé Dans le chapitre consacré au «climat des affaires», le CNES estime que malgré les «efforts soutenus pour améliorer» l'attractivité des investissements directs étrangers (IDE), «notre pays continue de reculer en terme de classement» en matière de «climat d'affaires». Il est fait référence à des «référents internationaux» qui «nous donnent peu attractifs», notamment en ce qui concerne la «création d'entreprise, le transfert de propriété, l'obtention des prêts, la protection des investisseurs et le dépôt de bilan». «La part des IDE dans l'ensemble des investissements réalisés dans notre pays, pour la période allant de janvier à fin juin 2009, reste très marginale, pour ne pas dire insignifiante», affirme le CNES. En effet, sur un montant total, évalué à 1.163,691 milliards de dinars (MDA) d'investissements effectués durant cette période, 78% ont été financés par le budget d'équipement de l'Etat (909,2 MDA). Le reste a été investi dans le cadre des IDE réalisés au titre de l'ANDI, à hauteur de 80,772 MDA (soit 7%), dont 68,104 dans le secteur de l'énergie et des mines. Les 15% restants ont été réalisés par le secteur privé national pour un montant de 173,719 MDA. Les dépenses publiques dopent la croissance hors hydrocarbures Evaluant les «agrégats économiques», le Conseil national économique et social relève qu'avec 10,5 à 11%, la croissance hors hydrocarbures réalisée durant l'année 2009 «continue d'être tirée par les dépenses publiques massives dans le secteur du BTPH». De manière générale, la production industrielle nationale «reste tout juste moyenne» et «ne profite pas assez des avantages que lui offre le marché local», affirme le rapport. Par secteurs, le taux de croissance a été «de l'ordre de 3,5% à fin novembre 2009» pour la production industrielle du secteur public, de 7% pour l'énergie (production et distribution de l'électricité et gaz) et de 9% pour les mines. Ces deux secteurs subissent également «l'effet d'entraînement de croissance du BTPH». La surprise est venue des industries sidérurgiques, métalliques, mécaniques, électriques et électroniques (ISMMEE), qui «nous ont habitués à une évolution négative», en réalisant une croissance de 23%. Dans le même sillage, le textile a réalisé lui aussi une hausse de 4,3%. Les contre-performances sont du côté de l'agroalimentaire (-9,3%), les industries du bois, liège et papier (-25,6%), la chimie et caoutchouc (-9,3%), et les industries diverses (-22%). Des salaires déconnectés de la productivité et de l'inflation Abordant la récente hausse du SNMG, qui est passé de 12.000 à 15.000 dinars lors de la dernière tripartite, le CNES estime que les différentes revalorisations «s'effectuent d'une manière cyclique, et sans rapport direct avec la productivité du travail et l'inflation», et considère, par conséquent, qu'il y a lieu de relancer «la question plus globale des revenus salariaux et des critères qui contribuent à leur détermination et à leur augmentation». Selon le rapport, les trois réévaluations du SNMG intervenues entre 2000 et 2008 se sont traduites par un accroissement de 9,8% en moyenne annuelle, alors que pour la même période, «l'inflation a augmenté à un rythme moyen annuel de 3,02%». En conclusion, «le pouvoir d'achat du SNMG s'est donc amélioré au cours de la période 2000-2008, mais sans contrepartie équivalente en gain de productivité». Dans le chapitre de l'emploi et du chômage, le Conseil prévoit un taux de 10,9 à 11% pour l'ensemble de l'année 2009, contre 11,3% en 2008. «Cette baisse s'explique essentiellement par les performances des activités hors hydrocarbures, dont le taux de croissance pourrait atteindre 11%, selon les premières estimations du ministère des Finances», estime le rapport du CNES. La même source considère qu'au cours du premier semestre 2009, «la création d'emploi reste dominée par les emplois d'attente». Il est également constaté que le taux de chômage est assez élevé chez les jeunes de moins de 30 ans, qui représentent les 3/4 quart des sans-emploi. |
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