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Avec un score sans précédent dans l´histoire électorale de la Bolivie,
Evo Morales, qui fut le premier président d´origine «indigène», a conquis haut
la main le 6 décembre, pour la seconde fois, la magistrature suprême. Quelque
63 % des cinq millions d´électeurs l´ont plébiscité, le principal candidat de
la droite, Manfred Reyes Villa, du parti «Plan progreso para Bolivia -
convergencia nacional» (PPB-CN) n´ayant obtenu que 24 % des suffrages. En
outre, les partisans de Morales occuperont désormais les deux tiers de la
chambre des députés et du sénat, permettant ainsi au leader du MAS (Movimiento
al Socialismo) de confirmer sa volonté d´approfondir sa «révolution socialiste
et indigène» commencée au cours de son premier mandat (2006-2009). Aucun des
prédécesseurs n´avait obtenu un tel résultat législatif dans l´histoire de la
démocratie bolivienne. En outre, depuis 1964, c´est la première fois qu´un
président est réélu en Bolivie. Comme le permet la nouvelle constitution.
«De nouveau le peuple bolivien écrit l´histoire... La participation des Boliviens à ces élections démontre qu´il est possible de changer notre Bolivie», déclarait Evo Morales, euphorique, une fois connus les premiers résultats qui ne laissaient aucun doute sur une victoire que tous les instituts de sondage avaient prévue dans un pays andin à majorité indienne. Une majorité restée hélas ! dans la pauvreté face à une minorité latine plus fortunée, héritière de la colonisation hispanique et qui avait de tous temps monopolisé le pouvoir politique et économique... jusqu´à l´apparition d´Evo Morales ces dernières années. D´une superficie de 1.084.390 km² (soit deux fois l´Espagne), la Bolivie compte une population de quelque dix millions de personnes. Très montagneuse, dominée par les Andes, la Bolivie comprend aussi de fertiles plaines tropicales dites amazoniennes très agricoles mais également riches en hydrocarbures. Elle partage avec le Pérou voisin le lac Titicaca, le plus élevé de la planète pour être situé à 3.805 mètres d´altitude. Au XIXème siècle, une guerre malencontreuse avec le Chili lui fit perdre son débouché sur l´océan pacifique, source de friction continuelle avec le voisin chilien. 65 % de la population se dit indienne parlant aymara, quechua ou guarani au même titre que l´espagnol hérité de la colonisation. Considéré comme le pays le plus pauvre d´Amérique du Sud, la Bolivie survit grâce aux revenus provenant de ses exportations de gaz, dont elle possède la seconde réserve de la région après le Venezuela, et de différentes matières premières telles que le zinc, le plomb, l´antimoine, l´argent. La grande majorité de la population vit en milieu rural où la culture de la feuille de coca est prédominante. Cette culture reste au milieu des débats socio-politiques. Evo Morales sera un leader syndicaliste et le porte-parole des pauvres producteurs d´une plante très controversée. Pour les uns, au stade végétal il s´agit d`une feuille dont la mastication quotidienne est une pratique millénaire respectable. Pour d´autres, c´est la source d´un trafic de drogue aux conséquences funestes à travers le monde. Principale victime de la transformation de la coca en cocaïne, les Etats-Unis d´Amérique avaient par le passé financé des plans d´éradication des plantations de coca. Aujourd´hui, les relations diplomatiques entre La Paz et Washington sont gelées. Evo Morales ne cesse de réclamer le respect des traditions culturelles de ses compatriotes très dépendants de la culture de la feuille de coca. Fils d´une très modeste famille Aymara de Cochabamba, il reste très marqué par ses antécédents paysans. Autodidacte, n´ayant connu que l´école primaire dit-on, il s´est lancé dans le syndicalisme rural qui lui permit de conquérir son espace politique dans la capitale et de tenter dès 2002 de conquérir la présidence. Mais cette année-là il est battu par un homme d´affaires, Gonzalo Sanchez de Losada. En 2006, les vents tourneront en sa faveur. En janvier 2010, Evo Morales inaugurera son second mandat qu´il mettra à profit pour poursuivre ses objectifs socialisants. Mais par-delà les difficultés économiques inhérentes à un pays plongé dans la pauvreté, le Cacique Aymara devra résoudre des problèmes institutionnels. Il reste confronté aux tentations autonomistes des provinces amazoniennes très opposées au centralisme de la capitale. Les amendements à la constitution permettront sans doute de lâcher du lest et de permettre aux neuf départements du pays de mieux participer à la gestion locale. Mais les autonomistes des plaines où se trouvent les hydrocarbures brandissent des menaces de sécession qu´ils ne pourront concrétiser face au poids démographique indien favorable à Evo Morales et à sa politique «indigéniste». |
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