Les Etats-Unis se sont officiellement invités dans la question de la
militante sahraouie des droits de l'Homme, Aminatou Haidar, qui observe, depuis
le 16 novembre dernier, une grève de la faim dans un aéroport espagnol pour
protester contre la décision des autorités d'occupation marocaines de la
laisser entrer à Layoun. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a
manifesté vendredi son inquiétude sur cette affaire qui plonge un peu plus le
Maroc dans une position inconfortable vis-à-vis de la communauté
internationale. Hillary Clinton a montré au ministre marocain des Affaires
étrangères, M. Taïeb Fassi-Fihri, son inquiétude pour le sort de Aminatou
Haidar, en grève de la faim. Selon son porte-parole Ian Kelly, Mme Clinton a
évoqué dans un entretien téléphonique «notre inquiétude pour la santé de Mme
Haidar et notre souhait que l'on essaie de résoudre cette situation dès que
possible». L'intervention directe du chef de la diplomatie américaine dans
cette question, qui embarrasse au plus haut niveau politiques et gouvernement
espagnols, est un signe qui donne une idée de l'extrême pourrissement de ce
dossier dans lequel se sont empêtrés les autorités marocaines d'occupation.
Jusque là discrète, la diplomatie américaine semble s'ébranler sur un dossier
devenu encombrant pour l'Espagne, mais surtout pour l'ONU. Aminatou Haidar
avait reçu au mois d'octobre, à New York, un prix de la Train Foundation pour
son engagement pacifiste en faveur des droits de l'Homme. De retour vers le
Sahara occidental à partir du territoire espagnol, elle a été refoulée par les
autorités marocaines à son retour. Elle exige depuis, à travers une grève de la
faim de revenir dans son pays. Washington, qui voudrait avoir du champ lors de
la reprise des négociations entre le Maroc et le Polisario, estime cependant
vital que le dossier de Aminatou Haidar soit vite résolu. Mais, selon Kelly, il
n'y aura pas de médiation américaine sur ce dossier. Il a indiqué à cet effet
que l'affaire Haidar est ?'avant tout un sujet bilatéral entre le Maroc et
l'Espagne''. Pour autant, le dossier devrait être évoqué prochainement à
Washington lors de la visite du chef de la diplomatie espagnol, Miguel-Angel
Moratinos, qui est attendu lundi dans la capitale fédérale américaine. En
Espagne, le dossier éclabousse le gouvernement Zapatero, mis à l'index par les
syndicats policiers. Samedi, le gouvernement de Zapatero et les syndicats
policiers se sont rejetés la responsabilité indirecte de la grève de la faim,
en Espagne, de la militante sahraouie. Deux syndicats policiers, le CEP et le
SPP, ont dénoncé dans un communiqué ?'l'hypocrisie politique'' du gouvernement
qui cherche à ?'éluder sa responsabilité'' et à ?'imputer à la police l'origine
du conflit international entraîné par l'entrée en Espagne d'Aminatou Haidar''.
A partir de Bruxelles, le chef du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero
avait indiqué vendredi que la décision d'autoriser Mme Haidar à entrer sur le
sol espagnol avait été prise par les autorités administratives et non par une
autorité politique. Aminatou Haidar a été admise sur le sol espagnol sans son
passeport, confisqué par les autorités marocaines, parce qu'elle était
titulaire d'un «permis de résidence», a répliqué M. Zapatero, soulignant qu'il
n'y avait pas eu d'intervention du pouvoir politique espagnol à cette étape.
Les deux syndicats policiers soulignent de leur côté que ?'le gouvernement a
empêché le retour de Mme Haidar au Maroc le jour de son arrivée'' en Espagne.
Selon ces deux syndicats, le gouvernement a toujours affirmé que Mme Haidar ne
pouvait reprendre un vol vers Layoun car elle ne possédait pas de passeport,
mais ils affirment que ?'cela aurait été possible avec un sauf-conduit''. Bref,
la grève de la faim de la militante des droits de l'Homme sahraouie a montré
toute la fragilité de la position de Madrid sur la question du Sahara
occidental, et, surtout, son peu d'empressement à faire pression sur Rabat pour
qu'il accepte d'appliquer les résolutions onusiennes, notamment l'organisation
et la tenue d'un référendum d'autodétermination dans ce territoire occupé par
le Maroc depuis 1975. Le Président sahraoui, Mohamed Abdelaziz, a prévenu, de
son côté, sur les conséquences fâcheuses que pourrait prendre la grève de la
faim de Aminatou Haidar.