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Les travailleurs, qui réunissent les conditions de mise en retraite sans
condition d'âge avant la promulgation de la loi qui l'annule, pourront
bénéficier de cette mesure même après la promulgation du texte. Le ministre du
Travail, M.Tayeb Louh, s'est voulu rassurant en direction de ceux qui aspirent
à une retraite anticipée. « Dangereusement rassurant», nous a déclaré un
sociologue qui voit dans ce discours, une sorte d'invite indirecte aux cadres à
se presser de constituer leur dossier de retraite. Le ministre a indiqué que
l'annulation de l'ordonnance relative à la mise en retraite sans condition
d'âge, promulguée en 1997, ne concerne pas les personnes qui réunissent les
conditions de cette mesure avant la promulgation du texte l'annulant et ils
pourront de ce fait, bénéficier de la retraite « quand ils le souhaitent». Le
projet de loi sera examiné durant la prochaine tripartite à la fin du premier
trimestre 2010 et concernera uniquement les catégories qui ne réunissent pas
les conditions de mise en retraite sans condition d'âge avant la promulgation
de la loi. En d'autres termes, ceux qui réunissent les conditions disposent
toujours de la possibilité de partir en retraite anticipée. L'annulation de
l'ordonnance en question a pour but de « mettre un terme à la fuite des cadres
et de la main-d'oeuvre compétente et expérimentée des entreprises économiques
publiques pour intégrer le secteur privé et de préserver la production». De
bonnes intentions qui ne concordent pas, selon certains, avec la communication
officielle.
«C'est un appel à constituer des dossiers de retraite le plus vite possible», estime le sociologue, qui relève que si l'objectif officiel est d'éviter une «déperdition» des cadres d'un secteur public devenu exsangue, «on s'y prend très mal et on risque d'observer dans les prochaines semaines un phénomène de «déperdition qualitative» des cadres qui savent qu'ils peuvent trouver facilement de l'emploi au niveau du secteur privé». Pour notre sociologue, si l'on veut préserver ce qui reste de compétences dans le secteur public, on ne délivre pas ce genre de message « incitateur», on abroge la loi sans trop attendre et, bien entendu, on intéresse sérieusement les catégories de personnel ciblé. La communication du gouvernement est en effet bien curieuse. Quand il s'est agi de stopper les crédits à la consommation et le crédit auto, et pour éviter une course folle au crédit, le gouvernement a pris sa décision et l'a mise en oeuvre en quatre jours, après, les banques et les concessionnaires se sont retrouvés devant le fait accompli. Il y a, en effet, une contradiction entre ce discours se préoccupant du désencadrement du secteur public et ce quasi appel à ceux qui « réunissent les conditions» à constituer leur dossier. « Beaucoup de cadres sont encore dans le secteur public en estimant que la possibilité de partir en retraite anticipée est un acquis. Désormais, ils ont tendance à penser qu'il faut en profiter avant que la porte ne se referme». Il y a donc mécaniquement de la part des concernés un calcul d'opportunité qui pourrait déboucher sur de fortes migrations dans des perspectives plutôt rapprochées. Sur le fond, en mettant fin à la retraite anticipée ou sans condition d'âge, officiellement introduite en 1997 pour «libérer» du travail pour les plus jeunes, en réalité pour opérer des compressions d'effectifs dans le cadre du plan d'ajustement structurel, le gouvernement ne fait que constater, plus d'une décennie plus tard, qu'elle a un coût faramineux. La potion du FMI n'avait rien de magique. En permettant des départs anticipés à la retraite, l'ordonnance a favorisé une migration des cadres du secteur public vers le privé. Les 400.000 travailleurs partis en retraite anticipée auront couté plus de 360 milliards de dinars à la Caisse nationale des retraites. Et, ce n'est guère une surprise, les emplois détruits n'ont pas donné lieu à de la création d'emploi. Résultat mécanique de la mise en oeuvre de la retraite anticipée, une perte annuelle de cotisations de 1,5 milliard DA et des frais supplémentaires pour la prise en charge des jeunes retraités de 7,5 milliards par an. |
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