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Et si c'était autrement...

par Aïssa Hirèche

Mahmoud Abbas est-il en train de bluffer ? Beaucoup de choses portent à croire que oui. D'abord l'insistance de la part de ses défenseurs qui semblent l'implorer de ne pas se retirer, une insistance si pressante et si bien montée qu'elle laisse entrevoir une préparation certaine. L'air sérieux de Yasser Abd Rabbou, qui eut la charge de la déclaration, ne change rien à la chose.

 Ensuite, le manque de réaction de certains pays arabes et surtout de l'Egypte officielle - qui, d'habitude, ne rate pas de telles occasions pour faire savoir son point de vue - laisse l'observateur un tant soit peu étonné parce que, et cela tout le monde le sait, le premier impliqué après les Palestiniens eux-mêmes dans cette affaire, c'est bien la diplomatie égyptienne, que ce soit pour sa proximité géographique, pour son implication directe dans les médiations (entre Palestiniens et entre Palestiniens et Israéliens) ou pour son intérêt dans la stabilité des sphères de pouvoir palestinien. De ce fait, le silence égyptien est plus qu'intrigant, à moins que les Egyptiens sachent un peu plus qu'ils ne veulent le dire.

 Par ailleurs, qu'on le veuille ou pas, Mahmoud Abbas a tellement joué un rôle qui n'est pas le sien qu'il a cessé, depuis longtemps, d'être maître de ses décisions et de ses mouvements. Nul ne peut croire que l'actuel président palestinien puisse cesser de jouer le rôle qu'il a si bien tenu jusqu'ici pour les Israéliens, les Américains et les Européens. Il n'est pas question d'un jugement quelconque, Abbas est mieux placé pour mieux connaître l'intérêt de son peuple. Il s'agit tout simplement d'une observation aux fins d'analyse et qui peut être démontrée de mille et une manières.

 Ainsi, Abbas ne pourra en réalité laisser tomber ses interlocuteurs qui, de leur part, ne voudraient surtout pas le perdre et courir le risque d'avoir affaire à quelqu'un de moins modéré que l'actuel président. C'est en tout cas une situation où les Israéliens ne risqueront jamais de se jeter, d'autant plus qu'ils font actuellement face à un problème sérieux d'un voisin appelé l'Iran. Et ce n'est pas la mollesse avec laquelle Israël a demandé à Abbas de revenir sur sa décision qui risque de tromper les observateurs.

 Sur un autre plan, les réactions trop timides de l'Europe et des Américains laissent croire que ces derniers savent ce qu'est en train d'exiger Abbas avec son geste. Certains vont jusqu'à dire que Abbas, par ce geste, veut faire pression sur Américains et Israéliens pour qu'ils le soutiennent plus. Peut-être, mais si c'était destiné aux Arabes eux-mêmes ? Si, par ce geste, Abbas voulait que les Arabes fassent plus de concessions à l'égard d'Israël ? N'est-ce pas ce qui a été demandé par Clinton au Maroc après tout ?