L'Union européenne a manifesté mardi son inquiétude devant la montée des
périls et de la menace des réseaux terroristes qui activeraient à partir du
Sahel, et dont les actions peuvent toucher l'Europe. Selon l'UE, la région du
Sahel risque de devenir un «refuge» pour les réseaux terroristes. Réunis à
Luxembourg, les ministres des Affaires étrangères des 27 pays de l'UE ont
souligné mardi que les événements récents «donnent à penser que la région
risque de devenir un refuge pour les réseaux terroristes et leurs activités».
Pour l'Europe communautaire, «cela constitue une menace sérieuse, avant tout,
pour la région du Sahel et sa population, mais aussi pour d'autres régions, y
compris l'Europe». L'activité terroriste développée à partir de cette région
tampon entre le sud des pays maghrébins et le Nord-Mali et Niger, avec un
prolongement vers le Sénégal via la Mauritanie, n'est pas un fait nouveau,
malgré les avertissements de l'UE. Plusieurs groupes terroristes y ont élu
refuge depuis quelques années, alors que l'organisation d'Al-Qaïda au Maghreb,
l'ex-GSPC algérien, semble y avoir établi plusieurs bases de repli et d'action.
L'Union européenne estime ainsi que les gouvernements européens souhaitent agir
en toute urgence pour renforcer les capacités des Etats de la région qui
doivent promouvoir «le développement et la bonne gouvernance», et dans le même
temps «lutter contre le trafic d'armes et de drogues et la traite des êtres
humains». Le communiqué des 27 montre, cependant, autant la naïveté candide des
Européens devant la menace du terrorisme dans cette région sensible de
l'Afrique comme pour les pays riverains, que leur propension maladive à
proposer l'ersatz de la démocratie et la bonne gouvernance là où il y a menace
contre la déstabilisation et la sécurité des Etats.
Par contre, Washington, qui a
buté contre le refus des pays de la région de déplacer le siège de l'Africom,
voit quant à elle juste en estimant réelle et potentielle la menace terroriste
pour la sécurité de la région. A l'issue de sa visite mercredi dernier à Alger,
le secrétaire d'Etat adjoint américain pour le Proche-Orient, Jeffrey D.
Feltman, a estimé que les Etats-Unis sont «inquiets» des problèmes de sécurité
au Sahel. Cependant, Washington, a-t-il dit, «ne veut pas se substituer» aux
pays de la région dans la lutte contre le terrorisme. «Nous sommes inquiets de
la question du terrorisme dans cette région. Nous croyons fermement qu'il est
de l'intérêt de tout le monde de résoudre le problème de la sécurité au Sahel.
Cela ne veut nullement dire que notre intention est de remplacer ces pays dans
leur rôle», a déclaré le haut responsable lors d'une conférence à l'ambassade
des Etats-Unis. Les Etats-Unis «respectent entièrement la souveraineté des pays
du Sahel», a-t-il ajouté. M. Feltman a également fait état «du soutien»
américain aux «efforts de l'Algérie» dans sa lutte antiterroriste. «L'Algérie a
une longue expérience» dans ce domaine, a-t-il également déclaré. Il est de
l'intérêt de Washington «d'appuyer les efforts de l'Algérie avec qui nous avons
une bonne coopération contre le terrorisme», a ajouté le responsable américain.
La position américaine vis-à-vis du terrorisme en général et de la menace d'un
Sahel infesté et base de repli des groupes terroristes en particulier n'a pas
changé: même en filigrane, Washington suggère toujours à ses interlocuteurs qui
ont la région sahélienne comme frontière l'installation d'une base militaire
pour contrôler cette vaste région de l'Afrique. Car elle reste une zone
potentielle pour la prolifération de toutes sortes de bandes criminelles, des
terroristes aux trafiquants de drogues, d'armes et de rebelles et autres
mouvements armés d'opposition. De quoi, en somme, déstabiliser durablement tous
les pays de la région. Avec en prime la prolifération des bandes armées dont
les services sont monnayables.