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Le match qui fait peur

par Kharroubi Habib

Les autorités égyptiennes et algériennes, chacunes de leurs côtés, n'ont pas lésiné sur les moyens pour offrir à leurs équipes nationales les conditions d'une préparation technique et psychologique propice à la réalisation de la prouesse footballistique qu'elles veulent leur voir réussir le 14 novembre prochain.

 Jamais peut-être les sphères politiques dirigeantes dans ces deux pays n'ont manifesté autant d'intérêt à une manifestation sportive que celui qu'elles portent au match du 14 novembre. Ici et là, la victoire est ardemment souhaitée. Tant il est vrai qu'elles anticipent avec raison la tournure cauchemardesque dont une éventuelle défaite pourrait être le déclencheur dans leur pays respectif. Ce qui n'est pas à exclure dans les deux pays où, si les victoires sont l'occasion d'extraordinaires explosions de ferveur patriotique, les défaites sont souvent le prétexte à des manifestations antigouvernementales que n'explique pas la seule mauvaise performance sportive.

 Le contexte politique, social et économique peu réjouissant qu'est celui de l'Egypte et de l'Algérie ne plaide pas pour des réactions populaires qui vont se limiter à déplorer un résultat négatif. L'erreur dans les deux pays a été de politiser à l'extrême l'enjeu de la rencontre. Le retour de manivelle sera que leurs opinions populaires en feront de même en cas de défaite de leurs équipes nationales. Et pas seulement en prenant pour cible les joueurs et le pays qui en seront la cause. Il est normal par conséquent qu'à Alger et au Caire l'on appréhende ce que seront ce soir et cette nuit d'après-match du 14 novembre.

 En Egypte comme en Algérie, le mécontentement social a été mis en parenthèse, leurs opinions publiques ayant été habilement conditionnées pour les focaliser sur le destin de leurs équipes nationales dans les éliminatoires de la Coupe du monde de football. Inévitable donc qu'ici et là l'amertume d'une élimination fasse remonter la colère sociale comprimée pour cause d'union patriotique sacrée autour de ces équipes nationales.

 Les lendemains de désillusion après un rêve fracassé sont imprévisibles, quand ne restent plus que les affres d'une vie quotidienne aussi dure et âpre que celle à laquelle sont confrontées les populations algérienne et égyptienne. La passion du football qui habite chaque Algérien et chaque Egyptien est la seule forme d'expression de leur patriotisme que la mauvaise gouvernance de leurs régimes respectifs n'a pas entamé. Quand même celle-ci en vient à être ébranlée, quoi de plus normal que ces citoyens se laissent aller à des débordements en mêlant politique et sport.

 En ces temps incertains et de fronde populaire rampante dans les deux pays, il y a de quoi que le résultat du match de football du 14 novembre donne des sueurs froides aux autorités en place à Alger et au Caire.