Réunis hier à Bruxelles, les 27 ministres de l'Intérieur de l'UE
continuent de croire que la seule manière de stopper les flux migratoires
réside dans une approche sécuritaire, et uniquement sécuritaire.
Ce 21 septembre, les 27
ministres de l'intérieur des pays de l'UE ont eu à examiner, une énième fois,
leur «politique commune de l'immigration.» Intitulé de la rencontre qui relève
plus du discours politique démagogique que d'une approche juste et légale du
problème des migrations dans le monde en général, et de celui spécifique à
l'Europe en particulier. Depuis la première approche communautaire de
l'immigration contenue dans le traité d'Amsterdam (octobre 1998) à ce jour, l'Europe
n'a jamais étudié le problème de l'immigration que sous son seul aspect
sécuritaire. Cette vision d'un phénomène vieux comme l'humanité a évolué sous
la dernière présidence française de l'UE (juillet 2008 - décembre 2008) vers
une approche davantage sécuritaire doublée d'une politique sélective des
immigrés dont a besoin l'Europe. Le pacte européen sur l'immigration présenté
par la France, et adopté par le Conseil européen en octobre 2008, a scellé
définitivement toute chance de concertation avec les pays dits «pourvoyeurs» de
flux migratoires, alors même que ce fameux pacte affirme prôner la concertation
avec ces mêmes pays. Pour rappel, le pacte est résumé en cinq points
essentiels: l'utilisation de l'immigration selon les besoins de chaque pays d'accueil;
l'éloignement du reste des arrivants; le renforcement des contrôles aux
frontières; un partenariat avec les pays du Sud et une politique d'asile
commune. Si les trois premiers points sont assez clairs, les deux derniers ne
sont rien d'autre qu'une tromperie. Car, de concertation avec les pays du Sud,
il n'y en a point eu. L'Europe veut réduire les pays du sud méditerranéen en
particulier au rôle de gardiens de ses propres frontières. A ce jour, seuls la
Libye, le Maroc et le Sénégal ont signé des accords dans ce sens. Ces trois
pays ont érigé des centres de détention financés par l'UE sans autres
discussions. C'est cela la politique de concertation contenue dans le pacte
européen. Dans l'UE, c'est à peu près la même logique qui est adoptée, puisque le
nombre de centres de détention des clandestins est passé de quelques dizaines
dans les années 90 à 234 en 2005 pour atteindre les 300 actuellement. Et le
Parlement européen (PE) n'a pas fait exception lorsqu'il a adopté, le 18 juin
2008, la «directive retour» qui étend la durée de détention des «illégaux»
jusqu'à 18 mois et une interdiction de séjour jusqu'à 5 ans. Hier, à Bruxelles,
à l'appel du ministre français de l'Intérieur, l'UE s'est penchée sur les
moyens de renforcer l'agence «Frontex», cette véritable armada militaire
d'interception des chaloupes et rafiots en mer utilisés par les «fuyards» de la
faim et de l'oppression en Afrique. Créée en octobre 2004 sur initiative de la
France, Frontex regroupe des navires et avions de surveillance et d'interception
des flottilles de migrants sur la façade atlantique africaine et européenne. La
France, encore une fois, a proposé hier à Bruxelles d'organiser des
affrètements de vols groupés de reconduction des clandestins aux frontières.
C'est dire combien l'Europe n'arrive pas à se défaire de l'approche strictement
sécuritaire du phénomène migratoire. Pour mémoire, sur les quelque 200 millions
d'immigrés recensés actuellement de par le monde, l'UE en accueille mois de 8%,
soit 42 millions environ. Avec une telle proportion, l'UE se lance, depuis ce
fameux pacte sur l'immigration, dans l'autre approche, celle de la sélection
des immigrés en fonction de ses besoins. A bien y observer, la politique de
l'immigration adoptée par l'Europe n'a rien de commun ni dans l'esprit ni dans
la forme, avec les grands principes énoncés par l'ONU sur la question inscrite
comme «Objectif du millénaire». L'Organisation internationale de la migration
(OIM) de l'ONU prévoit le déplacement (migration), en raison de conflits, de
sécheresse... de plus d'un milliard d'individus dans le monde pour les 20 ans à
venir ! Et la construction de murs de protection par l'Europe apparaît comme
dérisoire face à un tel destin qui guette l'humanité.