A moins de sept mois de la tenue du grand rendez-vous international du
GNL 16, prévu en avril 2010, Oran continue toujours de vivre au rythme des
incessants et inextricables problèmes liés de près ou de loin à sa «rurbanité».
Un concept né aux forceps puisque mis en valeur par ceux qui ont de tout temps
dénoncé la clochardisation de celle qui fut l'une des plus belles cités
d'Algérie. «Oran, un grand douar» est devenu, à la longue, le mot d'ordre des
amoureux et des nostalgiques de la ville qui se désolent de constater que plus
le temps passe plus la situation se détériore. La ceinture de misère qui
entourait jadis la ville, fruit d'un exode rural forcené conditionné par la
terreur maquisarde et des conditions de vie rudimentaires, est en train de
pousser vers l'intérieur des terres pour se retrouver au cœur même de la ville.
D'autres voix expliquent cette mainmise de la bidonvilisation sur la ville par
l'extension même de cette dernière, étouffée par une densité de la population
sans précédent, ce qui l'a amenée à intégrer cette ceinture pour en faire un
élément du décor urbain. Les quartiers sont devenus insalubres où l'insécurité
règne en maître des lieux. Même les projets structurants programmés pour
redonner à Oran sa place sur l'échiquier urbain national n'ont fait qu'empirer
les choses devant le peu de maîtrise dont font preuve les tenants de ces mêmes
projets. Celui du tramway, par exemple, est en train de battre tous les records
d'impopularité au vu des désagréments causés aux habitants. Pire, les Oranais
craignent un scénario à la Métro d'Alger qui paralyserait toute la ville.
L'alerte au gaz du début de semaine au Boulevard Mascara a ravivé les peurs et
relancé les interrogations sur la pertinence d'un tel projet alors que la
priorité devait être donnée à la réhabilitation des routes et particulièrement
à la mise en place d'un plan de transport à même de solutionner les problèmes
rencontrés. «Au lieu de prendre en otage toute une ville pour le tramway, les
autorités auraient mieux fait de réfléchir à une autre solution», s'emporte
Habib, 32 ans, chauffeur de taxi. «Ils ont creusé toutes les artères en les
bloquant, ils ne préviennent personne et, du jour au lendemain, ils ferment une
rue à la circulation», s'indigne Fouad, qui avoue ne plus pouvoir vivre dans ce
qu'il qualifie de grand douar. En effet, et contrairement à toutes les
déclarations officielles, plusieurs rues et boulevards ont été fermés la
semaine passée à la circulation en raison des travaux du tramway sans aucun
«préavis». Pourtant, le wali d'Oran avait promis de communiquer le nouveau plan
de circulation avant toute action de fermeture pour éviter les blocages. Le
premier responsable de l'exécutif a même affirmé que des dépliants seront
distribués aux conducteurs de bus et chauffeurs de taxi pour expliquer le nouveau
plan et déterminer les déviations possibles pour maintenir au maximum la
fluidité de la circulation au milieu urbain. Constatation sur le terrain,
aucune de ces procédures n'a été faite. Lors du dernier briefing de l'exécutif,
le wali a qualifié les désagréments causés par les travaux du tramway de «mal
nécessaire» et a appelé les gens de la presse à coopérer et expliquer aux
citoyens les avantages d'un tel projet. Il est à noter que selon les
déclarations des responsables du projet, d'autres boulevards seront également
fermés dans les prochains jours. La durée de ces fermetures varie entre 6 et 18
mois. Pour les «écolos», la question de l'arrachage des arbres est un crime
même si c'est pour l'intérêt général. «Déjà que la main verte est absente de
cette ville, qu'allons-nous faire maintenant que tous les arbres se trouvant
sur le tracé vont être déracinés», s'inquiète Samira, amoureuse de la nature.
Les commerçants sont également montés au créneau pour dénoncer «une perte de
leurs chiffres d'affaires» depuis le lancement des travaux du tramway. Ainsi,
une rencontre a regroupé la fin de la semaine dernière les représentants de
l'UGCA, l'union des chauffeurs de taxi, les représentants de l'entreprise Tram
Nour, responsable des travaux du tramway, et le wali d'Oran. Les craintes des
commerçants est de voir les travaux s'éterniser et de porter sérieusement un
coup à leurs différents commerces.