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Université : Le logement de la colère

par B. Mokhtaria

L'instruction du ministère de l'Enseignement supérieur ordonnant l'abrogation du décret 06-208 du 13 juin 2006, fixant les modalités de transfert du droit au bail des logements à caractère social, et le gel de toutes les opérations liées à son application risque de compromettre la prochaine rentrée universitaire. Le Conseil national des enseignants du supérieur (CNES) s'insurge contre cette note et menace de recourir à la grève si la tutelle campe sur sa position. «Cette mesure risque de raviver le brasier et nous ne sommes pas prêts à baisser les bras sur le gel de toutes les opérations liées à ce décret. C'est une question de principe. Le logement est synonyme de stabilité pour l'enseignant. Nous n'allons pas se laisser faire», a déclaré hier le premier responsable du CNES, M. Rahmani.

 C'est toute la corporation qui est en ébullition suite à cette note que le représentant du CNES dit n'avoir pris connaissance que par voie de presse. Réaction immédiate après cette nouvelle, le syndicat a rendu public un communiqué où il «regrette et s'indigne de cette démarche unilatérale excluant une fois de plus les partenaires sociaux». «Au moment où la communauté universitaire», dira le CNES dans ce communiqué, «attendait la concrétisation des engagements des pouvoirs publics sur la question du logement pour parachever un processus entamé depuis la promulgation du décret 06-208 du 13 juin 2006 fixant les modalités de transfert du droit au bail des logements à caractère social affectés aux administrations, institutions et organismes publics - la question des 3.000 logements domaniaux et OPIPES étant restée non résolue -, voilà que l'on apprend à travers la presse qu'une instruction du Premier ministre datée du 20 juillet 2009 ordonne tout simplement l'abrogation du dit décret et le gel de toutes les opérations liées à son application».

 Selon le premier responsable du CNES, ils sont 6.000 enseignants bénéficiaires de logements plus les 10.000 nouveaux acquéreurs qui n'auront pas droit, suite à ce gel, à la propriété de leurs logements. «La majorité des enseignants ont dépensé entre 25 et 30 millions de centimes pour les travaux et voilà que maintenant ils n'ont pas droit d'être propriétaires puisque l'Etat veut récupérer ses biens», dira le même interlocuteur. Pour le syndicat, cette décision du ministère est considérée comme «une fuite en avant» qui «remettra sans aucun doute en cause le caractère de partenariat construit ces dernières années avec la tutelle et pour lequel le CNES n'a lésiné sur aucun effort».

 Il souligne qu'il «ne s'agit nullement pour les enseignants chercheurs de villas cossues des quartiers résidentiels, acquises au dinar symbolique, mais il s'agit juste de modestes logements sociaux de type F2 et F3 des banlieues populaires chèrement payés à la sueur du front et à la suite de longues luttes syndicales des plus éprouvantes». Sur les engagements du ministère, le CNES a tenu à rappeler que «la primauté de l'annonce de ce décret abrogé - puisque les enseignants chercheurs étaient les plus touchés par cette mesure - a été faite de manière exclusive au CNES lors d'une réunion avec le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique le 30 mai 2006 sanctionnée par un PV cosigné par les deux parties. La question du logement à caractère social ayant toujours été au centre des préoccupations du secteur et l'une des principales revendications des partenaires sociaux compte tenu de la spécificité de l'enseignement supérieur».

 Le CNES se dit, toutefois, disponible pour un dialogue sérieux et constructif mais avertit que la rentrée universitaire s'annonce sous de mauvais signes. Avant le 30 septembre, date de la présentation d'un nouveau décret sur le logement dont le syndicat ignore le contenu, le CNES compte réunir son bureau national et informer toutes les sections pour décider ensuite des actions à entreprendre.