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Musique andalouse: Des nuits de Ramadan particulières à l'Institut Cervantès

par Ziad Salah

Invitée par l'Institut Cervantes, dans le cadre des nuits de Ramadan, Manuela Cortès Garcia, de l'Université de Grenade, a séduit l'assistance par son érudition, sa maîtrise et sa passion pour l'histoire et la musique dite andalouse. Cette arabisante qui a vécu au Maroc, en Irak et en Egypte, et qui passe son temps à parcourir le monde arabe à la recherche des archives et des manuscrits, a consacré sa conférence au thème : «Les écoles musicales en Andalousie : maîtres et système pédagogique, théoriciens et poètes compositeurs». Dans son introduction, elle signalera, sans trop s'y attarder, l'orientalité de la musique andalouse et ses racines arabes se trouvant à Baghdad et El-Hidjaz. Elle déterminera l'époque d'émergence de cette musique en Andalousie, qui coïncide avec le règne de Abderahmane 1er. Elle rappelera que Ziryab a fondé la première école musicale à Cordoue. Sur la période considérée, allant du 9ème au 15ème siècle, quatre autres écoles verront le jour, chacune d'elles s'identifiant par le nom d'une ville. Ainsi, on aura l'école de Séville, l'école de Grenade, l'école de Saragosse et l'école du Levant. Concernant les historiens dont les oeuvres ont porté sur cette musique, la conférencière citera sept d'entre eux : Ibn Hayyan ; Ibn Bassim ; Tifashi ; Ibn Said ; Ibn Khaldoun et El-Maqqari. Au premier cité, qui a vécu au 9ème siècle, on doit « L'arrivée des Médinoises dans le palais d'Abderahmane 1er ». Il est le seul à avoir consigné le nom des 50 esclaves chanteuses devenues expertes en musique, et dont certaines reprenderont le flambeau de l'enseignement après la disparition de Ziryab. Sur l'école de Ziryab, grâce aux écrits disponibles, expliquera Mme Manuela Cortès Garcia, le système pédagogique élaboré par Ziryab dans son école n'est plus un secret : il fait de la mémorisation, notamment du Coran, une première exigence pédagogique. Il est le premier à avoir accordé une importance particulière au traitement de la voix. Sur l'école de Séville, la conférencière citera les travaux d'Ahmad Tifashi comme la référence incontournable. Séville est devenue un pôle de fabrication et d'exportation des instruments musicaux, ce qui témoigne de son importance dans l'histoire de la musique andalouse.

Concernant les théoriciens andalous, l'intervenante citera quatre d'entre eux : Al-Asfahani, auteur de « Kitab El-Aghani» ; El-Farabi, auteur de «Kitab El-Musiqa El-Kabira» ; Ikhwan Asafaâ auteur de «Rissalat El-Musiqa» et enfin Ibn Sina auteur de «Kitab El-Qanoun». Chez les deux derniers auteurs cités, on relève clairement des relations existantes entre la musique, la philosophie et l'astronomie, affirmera l'hôte de l'Institut Cervantès. Elle citera d'autres noms prestigieux du patrimoine arabo-andalou qui ont écrit sur la musique. On retiendra, entre autres, Ibn Hazm, Ibn Rochd (Averroes), Ibn Abdou Rabih et Ibn Baddja (Avempes). Ce dernier, dans son livre « Rissalat Al-Alhane », la musique est présentée comme une thérapie. Mais la conférencière citera au moins une référence plaidant pour l'interdiction de la musique : Ahmed Attartousi, « Rissalat Attahrim ». D'ailleurs, tout au long de son exposé, Mme Manuela Cortès Garcia ne manquera pas de préciser que tel ou tel auteur était d'obédience soufi. Certains d'entre eux ont été même tués pour leur opinion religieuse. S'agissant de la période mauresque, coïncidant avec la reconquista, la conférencière précisera qu'il n'existe que deux références, dont les auteurs sont méconnus de surcroît.

On retiendra des débats conséquents à la conférence de Mme Manuela Cortès Garcia que ce patrimoine commun au Maghreb et à l'Espagne reste encore à découvrir. Des manuscrits restent à découvrir, d'autres à traduire et le tout à resusciter et à faire découvrir au moins aux chercheurs et personnes intéressées. D'ailleurs, le mode de transmission oral de cette musique, avant l'effort de transcription fourni par Edmond Yafil, a retenu l'attention des intervenants lors des débats. La conférence de Manuela Cortès Garcia a été une invitation pour accorder de l'intérêt à un héritage que nous partageons avec nos voisins méditerranéens.