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Les sentiments de dévotion et de respect -pour
Dieu et pour les choses de la religion, qui s'érigeaient en pratiques et en
traditions dans notre société et qui constituaient une sorte de protection et
de préservation, se désagrègent et se disjoignent petit à petit, au fil des
ans, comme le plâtre sous l'effet de l'humidité. Cependant, quand cela prend
des formes imaginaires durant le mois de carême censé être celui de la piété et
de la charité, actes d'amour du prochain, et de bonté. L'on comprend que ces
trois vertus théologales, considérées comme le ciment et la chair liant le
peuple, commencent à perdre de leur éclat et leur sens civilisationnel. Les
prémices de cet enclin à la dérive sont palpables et que beaucoup de gens
constatent sans peine. Nos marchés hebdomadaires à bestiaux ou ceux des fruits
et légumes, nos commerces, nos boutiques, nos rues, nos administrations...
constituent en somme des échantillons où se déroulent le désagrégement et
l'effritement de nos valeurs communautaires. Pourquoi les prix des produits de
large consommation flambent-ils subitement comme s'il y a eu auparavant une
annonce d'une mise en quarantaine interdisant les gens de sortir ?
L'observateur sillonnant les rues commerçantes de Aïn Témouchent, de Hammam Bou
Hadjar, de Béni Saf et autres de la wilaya n'a pas besoin de faire trop
d'efforts pour constater de lui-même sans être appelé à faire des
démonstrations tortueuses. Les mercuriales des fruits et légumes, des viandes,
des effets scolaires et des vêtements sont hautement plafonnées et intouchables
pour la quasi-totalité des ménages. Le haricot vert est cédé à 100 DA, la
courgette à 80 DA, la tomate à 80 et 90 DA. Le raisin a été coté à 110 DA, les
bananes introuvables, la pêche à 200 DA. Les viandes rouges ont été plafonnées
à 800 DA, le poulet à 285 DA et les oeufs à 11 et 12 DA l'unité. Le tablier a
été fixé entre 1.400 et 1.500 DA, le cartable variant entre 1.500 et 3.000 DA.
Notre curiosité nous a poussé à scruter de loin comment agissent les ménagères accompagnées de leurs progénitures devant les expositions des boutiques à Hammam Bou Hadjar, après une heure du f'tour. Elles défilaient une à une comme les grains d'un chapelet mais rares sont celles qui osent s'approcher tellement c'est cher. «On attend, dit une femme, la quarantaine environ, à ses deux fillettes, el houkouma va distribuer des trousseaux scolaires, des tabliers et des cartables». Le message a été bien reçu par deux autres femmes voulant s'approcher des articles cités par la première. Ces rumeurs d'une nature étrange sont rapidement semées dans les esprits des gens et germent précocement. Cependant, un hadji fraîchement de retour des Lieux saints de l'Islam raconte la première semaine du Ramadhan qu'il a passée à La Mecque. La tradition veut que tous les commerçants, toutes activités confondues, baissent les prix durant le mois du Ramadhan. Et en toute vraisemblance, tous les pays du Khalidj adoptent cette pratique pendant le carême. Et pourtant, nous n'importons pas autant de fruits, de légumes et de viandes comme les Khalidjis. Le paradoxe est criard. Aux souks hebdomadaires de Aïn Témouchent et de Hammam Bou Hadjar, le mouton est vendu et revendu plus de deux fois générant une augmentation de 10 à 15% d'une main à une autre. La même note s'affiche pour les fruits et légumes. Et entre le gros, le demi-gros et le détail, l'on passe parfois du simple au double. Une pratique qui n'est pas contrôlée et l'informel est à l'origine d'une grande partie de la flambée ravivée par la spéculation farouche. Peut-on parler des vertus: foi, espérance et charité ? |
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