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Du politiquement (in)correct

par El Houari Dilmi

L'histoire fantomatique qui suit est déconseillée aux moins de sept ans et guère recommandée aux plus de soixante-dix-sept ans. Chalachou est un homme né avec un (mal)formation congénitale au cerveau, le condamnant, sa vie durant, à s'alimenter par la fosse nasale gauche avec un sérum fait à base d'une molécule de synthèse cent pour cent arabico-politico-zygomatique.

 Chalachou développe, avec l'âge, une addiction si poussée à la «chose» politique, qu'il connaît sur le bout de ses sept doigts tous les ministres de la République par leur sobriquet, les députés par la couleur de leurs cravates (im)portées, les maires par leur tour de taille au centième de millimètre près, et même tous les cols blancs (et bleus) par le nombre de crans de leur ceinture en cuir frelaté.

 Mais chalachou s'empiffre tant à la sauce «politicarde» qu'il contamina gravement son potache, encore au seuil de l'école... de la vie. Le rusé gredin de Chalachou, à l'esprit trop carré pour tourner en rond, livra, pour de rire, à son géniteur une «néo-théorie» ès sciences politiques, jamais enseignée dans aucun bahut au monde.

- Papa, à politiquement parler, quel est le rôle de ma mère dans la maison ?

- Eh bien, mon fils, ta maman, c'est la gouvernante en chef. Elle s'occupe des affaires internes de la maison, touille la cuisine quotidienne, essuie les carreaux brisés, me fait payer cash la facture «douloureuse» de l'électricité, du gaz, et même de la flotte. Ta mère puise même dans ses économies lorsque ma bourse est à sec. Fait le ménage quand la maison se renverse sens dessus-dessous. Elle rentre volontiers dans son tablier «naturel» de garde-champêtre quand toi et ton petit frère faites du boucan dans la maison. Et dans la rue...

- Papa, et toi, du point de vue politique, c'est quoi ta place dans la maison ?

- Moi, mon cher fils, mon rôle, c'est un peu comme le président, je m'occupe des affaires extérieures de la maison. Je gère le budget. Je définis la politique de bon ou mauvais voisinage avec nos colocataires. Je confère une partie de mon pouvoir à ta maman, une autre partie à toi, mon fils, et je garde pour moi seul le pouvoir de décider à tout moment du destin de chacun de vous dans le giron familial.

- Et moi, papa, vu sous l'angle politique, je suis quoi dans votre maison à toi et à ma maman ?

- Toi, mon fils, tu es un peu comme le peuple. Ta mère et moi gérons ton destin, te nourrissons, t'hébergeons, te blanchissons, payons cash ta croûte de pain bénit, te passons le flambeau, t'éduquons pour ne pas confondre entre ta mère et ton maire. Assurons ta bonne intelligence avec ton petit frère.

- Et mon petit frère justement, vu par le prisme trompeur de la chose politique, il est qui lui ?

- Ton petit frère, il est peu comme l'avenir. C'est pour lui que ta mère et moi trimions pour préparer le lit douillet de votre devenir. Fixons les règles du fonctionnement interne de la maison. Vous protégeons contre vous-même. Vous apprenons la civilité de ne pas manger avec la main gauche. A cohabiter pacifiquement avec les enfants de votre âge. A ménager le loup et le berger pour l'équilibre instable de notre foyer menacé, A..., à...

 Par un jour sans, le gredin de Chalachou rentre lessivé de l'école... buissonnière pour retrouver son petit frère «englué» jusqu'au cou dans sa couche-culotte, inchangée depuis trois jours...

 Fidèle à sa froide logique politico-paternelle, le gredin de Chalachou s'en va ainsi la langue pendue à son menton, apostropher son paternel, plongé à prendre les dernières mauvaises nouvelles du pays:

- Eh ! S'il vous plaît, appelez le chef du gouvernement (la maman), l'avenir ne sent pas trop bon...