Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

PVD et paradis Fiscaux

par Kharroubi Habib

Le G20 a eu beau déclarer la guerre aux «paradis fiscaux» dont l'existence empêche une réelle réforme du système financier international en perpétuant les plus graves excès du capitalisme financier et le blanchiment des opérations douteuses, voire criminelles en regard des législations des autres Etats de la planète, ils continuent de prospérer, même si les pays qui les abritent ont promis-juré de mettre un terme à leurs pratiques qui gangrènent l'économie mondiale. En fait, aucun système de sanction digne de ce nom n'a été décidé contre ces parasites, qui aurait contraint ces Etats à respecter leurs engagements.

Ces «paradis fiscaux», bien qu'officiellement déclarés obstacles à l'instauration d'un système financier international transparent et contrôlable dans son fonctionnement, continueront d'exister pour l'irrécusable raison que les puissants, politiques, financiers ou affairistes, ont besoin d'eux et continuent d'y avoir recours. Un rapport sur ces paradis fiscaux, commandé par le gouvernement norvégien à une commission d'experts, dont Eva Joly, l'ancienne et célèbre magistrate franco-norvégienne, a fait partie, a été remis à la mi-juin aux autorités d'Oslo. Le résultat du rapport est édifiant. Les experts quantifient les flux financiers illégaux qui transitent en moyenne annuelle par les paradis fiscaux de la planète à 10.000 à 12.000 milliards. Sommes phénoménales qui démontrent la massification du recours aux circuits opaques et incontrôlables qu'offrent ces paradis fiscaux.

Toutes les économies de la planète sont finalement concernées par cette effarante hémorragie provoquée par les pratiques illégales que permettent et protègent ces circuits. Les pays du Sud dits en «voie de développement» contribuent à ces flux quantifiés par les experts norvégiens. La part de «leur contribution» a été estimée par ceux-si à 20% des dépôts dans les paradis fiscaux, soit «une somme comprise entre 2.200 et 2.400 milliards», ce qui équivaut à «trente fois ce que les pays en voie de développement reçoivent sous forme d'aide».

L'on comprend que les dirigeants de ces pays aient observé une «prudente réserve» à l'égard de la charge menée par le G20 contre les paradis fiscaux. On le comprend d'autant mieux que le rapport établit que ces paradis fiscaux «favorisent la corruption et les escroqueries menées par les hommes politiques des PVD sur l'aide au développement, les ressources naturelles et les deniers publics», et qu'ils contribuent à «la gangstérisation des systèmes politiques de ces pays».

C'est l'évidence que les gouvernants du Sud n'ont pas intérêt à ce qu'il soit mis fin à l'existence de ces places financières, où en majorité ils abritent le fruit de leurs rapines, et qu'ils n'encourageront pas les initiatives internationales destinées à y mettre un terme. Il n'y a pas en effet pire menace pour eux que le dévoilement des transferts qui s'effectuent des pays en voie de développement vers ces paradis fiscaux.

Si tous les pays du monde sont victimes des évasions financières que permettent les paradis fiscaux, ceux du Sud le sont d'une façon plus dramatique car c'est leurs chances de sortir de la spirale du sous-développement qui en sont ruinées, du moment que ce sont leurs propres dirigeants étatiques qui ont ce comportement maffieux, encouragé par l'existence de places refuges au fruit de leurs accaparement et détournement des ressources financières nationales.