Alors que l'été, période de repos et de
farniente, n'est pas encore vraiment là, à Tiaret, il ne faut surtout pas se
lever tôt si... l'on veut gagner sa journée et pour cause... A l'heure du
laitier, la ville est encore plongée dans un sommeil profond.
Vers sept heures du matin, difficile de
dénicher une boulangerie ouverte au plus grand dam des lève-tôt. Même les
cafés, censés ouvrir à l'heure du coq comme ce fut le cas jadis, n'ouvrent pas
à Tiaret jusqu'à parfois sept heures passées. «Mais pourquoi, pardi !, une
ville qui compte près de trois cent mille âmes donne l'impression d'une cité
fantôme alors que le soleil est presque au Zénith», s'interroge, rageur, Ammi
Rabah, un retraité à la santé si éclatante qu'il est debout avant le premier
appel à la prière. Pour les commerçants, la situation est encore plus «cocasse»
puisque les plus travailleurs d'entre eux n'ouvrent boutique qu'après huit
heures passées pour baisser rideau dès midi tapantes. Ils ne rouvrent leurs
commerces que vers quinze heures pour aller se coucher vers dix-huit heures.
«Même les commerçants sont devenus des fonctionnaires, ne bossant pas plus de
quatre heures par jour pour le meilleur d'entre eux», commente, dubitatif, un
jeune homme de retour des Etats-Unis après une formation pointue en gestion des
entreprises. A Tiaret, une ville dont l'extension peu maîtrisée pose d'énormes
problèmes de gestion urbanistique, il est même difficile de trouver un médecin
ouvert après quinze heures passées. Sous d'autres cieux, «l'économie tourne
vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce qui non seulement donne du boulot à
tous mais permet aussi à une ville de se développer rapidement», se souvient
Djillali qui se dit stupéfait du contraste net d'une ville et ses rues bondées
de monde le jour et une cité fantôme dès le crépuscule. Malgré une amélioration
sensible des conditions sécuritaires, le Tiareti n'a plus le réflexe de sorti
flâner le soir. «Par une sorte de grégarisation, ici à Tiaret, tout le monde se
lève en même temps, mange en même temps et se couche le soir et en même temps,
d'où cette impression que la ville est inhabitée à plusieurs moments de la
journée», observe Kamel, un gargotier qui se fait du mouron de la chute drastique
de son chiffre d'affaires depuis des mois. Dans une ville qui compte un nombre
effarant de jeunes chômeurs, l'activité économique tourne au ralenti dans tous
ses segments. Et jusque dans la sphère privée où, même les commerçants et
autres professions libérales rechignent à s'acquitter d'une activité de
laquelle ils tirent pourtant leur pitance. Et avec l'été qui pointe déjà du
nez, la saison des vacances, ensuite le Ramadan en pleine canicule, puis l'Aïd
suivi de la rentrée scolaire pour déboucher sur l'Aïd El-Adha, la «récréation»
pour tous risque bien, il faut le craindre, d'aller jusqu'au bout de l'année,
encore une de gâchée...!