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Néo-fondamentalisme, enfants d’El-Qaïda, néo-islamiste, islamisme horizontal... etc. La nouvelle vague est là avec son empire des signes : vêtements, fashion, boutiques spécialisées, look, commerces, chaînes satellitaires, intolérances et contre-croisades. Topographie d’une génération non spontanée de l’islamisme en Algérie.
«Manger les mangeurs du Ramadan»:
Le 29 septembre 2008, six Algériens sont condamnés, à Biskra, à 04 ans de prison ferme assortis de 100 000 DA d’amende pour «non-respect d’un fondement de l’Islam». L’information fera l’effet d’une bombe médiatique et divisera profondément l’opinion publique et les milieux médiatiques, qui vont traiter le faux fait divers selon les grandes lignes des fractures idéologiques de l’Algérie post-FIS. Les condamnés seront par la suite acquittés par le tribunal pénal près la cour de justice de Biskra, presque «sous pression», mais le «mal» est fait. Le syndrome Biskra vient de naître. Les quatre «inculpés», K. A. (42 ans), Z. S. (32 ans), A. F. (53 ans), A. A. (52 ans), K. K. (36 ans) et B. K. (45 ans), avaient été surpris dans un local de l’USB par une brigade de la Sûreté nationale en train de jouer aux cartes, une bouteille d’eau près d’eux, en plein mois de Ramadan, selon la presse. La «petite affaire» sera alors le point de rencontre entre le débat sur la liberté de culte en Algérie, les néo-conservatismes religieux qui ont réussi à pénétrer les institutions souveraines de l’Etat, les rapports d’ONG américaines qui désignent l’Algérie comme «un pays où le droit de croyance est bafoué» et le bilan douteux des années 90 et leurs traumatismes non surmontés. Les six biskris seront libres après le procès, mais on imagine déjà la suite de leur vie sociale sous le regard d’une société algérienne post-Fis, lourdement convertie à une nouvelle conception de la religion, encouragée par les messages de l’Etat au plus haut niveau et conséquente du manque de conceptions alternatives au religieux en Algérie depuis des décennies. Le syndrome Biskra aura même failli provoquer un effet domino avec les trois jeunes Algériens, originaires de Tizi Ouzou qui, eux aussi, seront accusés d’atteinte aux préceptes de l’Islam presque à la même période. Condamnés le 30 septembre de la même année par le tribunal de Bir Mourad Raïs (Alger) à une peine de 3 ans d’emprisonnement ferme, assortie d’une amende de 100 000 DA, ils seront rejugés lors d’un procès tout aussi symbolique sous une «loi flou» condamnant l’atteinte à l’Islam et défendu par des avocats forcés à faire la plaidoirie des libertés menacées en Algérie.
L’affaire Habiba, la crucifiée-femme:
L’année 2008 sera marquée par cette vague, qui connaîtra son paroxysme avec l’affaire «Habiba K.», une jeune fille de Tiaret convertie au christianisme et arrêtée pour... possession de bibles et prosélytisme religieux. L’affaire, là aussi, servira à un effet de loupe malsain sur les libertés religieuses en Algérie, les libertés civiles et les libertés de croyances. Le ministère des Affaires religieuses ne trouvera pas mieux que provoquer une indirecte chasse aux sorcières en dénonçant des évangélisations massives et des atteintes aux croyances «nationales», greffées sur des procès régionaux, accusant la Kabylie d’en être le berceau et des villes côtières à l’ouest d’en être la cible facile pour proximité néo-coloniale avec l’Occident. De quoi alimenter les courants montants et justifier les mises sous embargo «confessionnel» d’une Algérie aux positions idéologiques ambiguës malgré ses luttes antiterroristes inaugurales. Un pays impossible à ranger dans la colonne des pays à vocation «laïque» confirmée ou à assimiler à une république islamique basculante, pour l’opinion internationale. La jeune fille de 36 ans, convertie depuis l’année 2004, sera arrêtée lors d’un banal barrage de contrôle routier de la gendarmerie au niveau du col de Guertoufa, à la sortie ouest de Tiaret à son retour d’Oran, «en possession d’un lot de bibles» qui en fera une inculpée pour prosélytisme religieux, selon la loi Belaïz, confectionnée en catimini. Elle risquait jusqu’à trois ans de prison, mais son procès, immensément médiatisé, lui vaudra, par effet de pressions, un renvoi pour procédures et une fin «réaménagée». L’affaire fera la joie des milieux extrémismes de tous bords, évangélistes comme islamistes, et signera le label d’une année 2008 en pleines dérives.
Ce n’est pas l’Iran mais ce n’est plus l’Algérie des années 70 :
la dérive, et outre ces malheureux épisodes juridico-politiques, n’en est pas moins là comme une nouvelle culture chez des Algériens que les années 90 n’ont pas aidé à couper avec la fascination de «la régression féconde». Le recul des libertés est, aujourd’hui, l’objet de discussion de prédilection des derniers cercles intellectuels urbains. Ce basculement dans le néo-islamisme est visible dans les comportements, la pratique ostentatoire de la religion, les signes urbains et d’architecture, la vigilance «moralisatrice» entre voisins et jusque dans les barrages de contrôles routiers très «sensibles» à l’alcoolémie du chauffeur d’abord, pour des raisons d’infraction à l’interdit religieux plutôt qu’à l’interdit du code de la route. Les Algériens, qui ont vécu les fastes et les sévérités policières des années 70, découvrent aujourd’hui les spectacles de corps constitués se consacrant parfois à la chasse aux couples plutôt qu’à la sécurisation des citoyens. Le lien entre ce conservatisme sans issu, le manque de loisirs et le manque de libertés et les flux de harraga est encore non admis. Le phénomène de l’immigration clandestine est de préférence perçu à travers le prisme de l’économisme ou de l’emploi manquant qu’à travers le défaut de liberté et de sens. Ce nouveau courant est encore plus visible chez les jeunes Algériens, curieusement tentés par une pratique de repli face à un univers qui ne les sollicite pas, et chez les jeunes femmes, massivement converties au port du Hidjab que ne connaissaient pas leurs mères, d’abord pour des raisons de conviction et pour des raisons de protection contre les agressions d’une société de plus en plus violente envers les femmes. La liste des basculements des Algériens est longue et chacun en fait l’expérience sans, cependant, suffisamment de distance pour constater le phénomène ou l’accepter comme un fait de société en mal de références et pas comme l’expression d’une religion. La catastrophe de Berriane, l’éveil des antagonismes des rites et leur traitement par le bricolage seront là aussi les premiers épisodes d’une aggravation annoncée.
Des messages écrits au laser dans un ciel pas serein:
la société algérienne, et au-delà de ces épisodes dramatiques, semblait ainsi se diriger vers une sorte de culte de l’enfermement que même le Fis n’aurait pas pu rêver, au bout de dix ans de propagande seulement. Et si la lutte antiterroriste s’est faite au nom de la Laïcité et de l’Algérie moderne à sauver, la paix «obtenue» se fera au nom d’un compromis silencieux entre les détenteurs des Pouvoirs, eux-mêmes proies de la même fascination religieuse, et les nouveaux courants forts de la société algérienne, issus du basculement généralisé par le référent religieux. On en retrouvera les traces dans le projet inexplicable de la plus grande Mosquée d’Afrique, les discours politiques les plus officiels et l’embrigadement social dans une sorte de mission «pasdaran» des moeurs, voisinages, pratiques et habillement, sans parler de la codification stricte des médias et des productions culturelles ou l’instrumentalisation des mosquées et des Zaouïas pour besognes électorales. Trois décennies après sa sortie, le film «Les vacances de l’inspecteur Tahar» sera presque jugé comme un film osé aujourd’hui, signe d’une régression inféconde non encore contrebalancée. Ce néo-islamisme, et contrairement à son «aîné» politique de l’époque du FIS, n’a, selon les observateurs, ni leaders politiques attitrés, ni projets «de coup d’Etat», ni ambitions déstabilisatrices. Ce n’est pas un parti, mais un parti pris, en quelque sorte, et la réaction contre la dernière guerre contre les Palestiniens en a largement démontré le caractère informel mais cohérent, se passant des partis islamistes comme des imams consacrés. Politiquement, ce courant de fond est décapité et déconnecté de ses «prétendants» comme le Hamas ou Ennahda et autres offres partisanes ; socialement, il semble déjà avoir balisé son terrain, en partant des moeurs et jusqu’au Fashion et en contrôlant des segments économiques qui lui donnent encore plus de poids politique et social avec des commerces dits «identitaires» et «militants».
L’islamic Fashion ou l’habit qui fait la barbe :
un commerce confessionnel alternatif, plus qu’un signe ostentatoire d’un engagement religieux ou politique. C’est le portrait type du nouveau islamiste «tiède», habillé selon un croisement vestimentaire entre traditions maghrébines, avec djellaba et chachia, «robe» saoudienne ou costume-cravate hamassien. Le néo-islamiste est aussi «BCBG», genre Amrou Khaled, le précurseur des talk-show religieux pour classes moyennes montantes, et s’éloigne relativement du look «sauvage» du barbu en kamis et «Nike» de combat, faux Turban et Siwak à la bouche. L’accoutrement «signe» à peine le message du repenti classique, post-réconciliation, que l’Etat autorise à revendre des babouches sur les trottoirs publics en guise de réintégration. «On a pu dire que cette démonstration, tendant à révéler la mode comme un sens, aboutit à ce que «le sens apparaît comme une mode», avait analysé la sémiologue de renom, Julia Kristeva. C’est dire que l’islamic Fashion fait dans le sens et la mode du sens à la fois. La différence entre le barbu hirsute des années 90 et le néo-islamiste se trouve être cependant dans l’industrialisation du filon. On n’en est plus à l’accoutrement mais à la filière. Et si les républiques islamiques et les Califats virtuels ont été un échec politique violent dans quelques pays arabes et pour la première génération d’islamistes, le «look» du genre se porte mieux et s’installe comme une valeur incarnant des authenticités nationales, des «Thawabites», et des folklores locaux : on y affirme une identité et une norme vestimentaire et pas seulement un militantisme politico-religieux. Le porteur d’un Seroual afghan n’est plus le signe d’un ralliement actif à une confrérie clandestine, mais une pratique choisie pour se conformer à une Tradition «imaginaire», mythifiée ou réelle, opter pour le confort de l’habit des ancêtres sublimés, ou signe d’une différence cultivée jusqu’au bout des comportements et des choix de consommation anti-occidentaux. Le look islamiste n’a pas de mannequins, ni de chaînes TV spécialisées, mais déjà des «rues», des fournisseurs et des entreprises, et des modèles sociaux et politiques. Et surtout, un avenir que les Chinois, entre autres, ont bien compris en inondant le monde musulman d’artefacts et de fashion «islamique». L’avantage de ce filon étant le coût modique avec des prix accessibles aux populations des économies pauvres et le «symbole», préféré par des opinions locales sans autre référants que le religieux depuis l’échec des nationalismes. Les pays sources de ce commerce restent principalement la Syrie, la Jordanie ou l’empire chinois et sud-asiatique de la contrefaçon et de l’imitation de masse. Le modèle «In» est reconnaissable au pantalon au-dessus de la cheville comme le veut la Sunna, la chachia selon le Maghreb ou le tarbouche et la Keffieh, selon les choix et, depuis peu, des babouches, héritières des «Nike» de la résistance de la génération FIS. Le look peut aussi varier à l’infini selon des compositions régionales, puisant dans le dressing marocain, tunisien et surtout saoudien. Et, ce sont ces variantes qui ont introduit la notion de «classe» dans le Fashion islamiste, prétendument égalitariste comme le veut l’utopie religieuse. Devenu industriel comme dit plus haut, ce look spécifique possède déjà ses patrons, ses grossistes, ses petits revendeurs et ses importateurs. Un beau monde qui, règle de différenciation oblige, ne peut pas s’habiller de même dans le cadre de la fraternité confessionnelle. Durant les prières du Vendredi, on y retrouve les traces du salariat universel et du luxe ostentatoire de quelques réussites sociales. Le catalogue est encore plus distinctif pour les femmes qui, depuis près de vingt ans, ont basculé vers le Mass-Hidjab qui chassa de l’espace vestimentaire algérien le Haïk, entre autres. Là, féminité oblige, l’islamic Fashion s’accommode des impératifs de la séduction au point de voir l’offre slalomer entre le hidjab de la pauvre qui y cache sa pauvreté et son corps et celui, élégant et sexy, de la Fashion victime conservatrice. Le commerce se porte bien là aussi et se traduit par des accoutrements à la limité de la crise d’identité et de la perte du sens : tchador iranien, burka afghane, hidjab «Rotana» (traduire : jean serré en bas et foulard sur la tête), hidjab maghrébin... etc.
Du cabas au...repenti :
en règle générale, constatée mais difficile à chiffrer, l’industrie du Fashion islamiste a été lourdement investie comme profession de survie par la génération des vétérans de la crise des années 90. Les repentis algériens occupent ce terrain, en héritage forcé des porteurs de cabas de Alep entre autres. La corporation bénéficie, selon les trabendistes «laïcs», d’une immunité politique qui leur offre de véritables sauf-conduits dans les points de contrôle routier. Dans les villes où ce commerce a son marché, les repentis, leur collègues, sympathisants ou voisins d’étalages, occupent des places publiques entières sans risquer les délogements fréquents par les forces de l’ordre souvent. Le filon appauvri de l’artisanat algérien y trouve un débouché, mais aussi les grosses importations à partir de la Syrie ou du Maroc.
L’empire de ces signes:
Le courant de l’Islamic Fashion répond aux quatre critères dégagés par Barbara Baines, dans son ouvrage de référence sur le sujet Fashion Revivals : l’histoire ancienne et classique, l’exotisme et l’influence du costume populaire. Un islamiste du XXème siècle obéit, dans ses habits, au réflexe idéologique de la restauration de l’Islam, de la tradition mythifiée, pour signer une opposition politique et sa propre différence et pour participer au «retour aux sources». Sans références fixes sur les modes vestimentaires des premières sociétés islamiques, l’islamiste se rabat donc sur des formules composites, entre l’habit traditionnel de son pays et ses formules bizarroïdes et exogènes, proches selon lui du temps des origines, comme ce sera fait de l’habit afghan. Tout un calendrier est à recomposer au vu du catalogue vestimentaire de ce courant : on peut facilement constater que cette errance vestimentaire de l’islamiste fashion et ses modes d’habillements, correspondant aux grandes périodes d’errances idéologiques des sociétés arabes et musulmanes et ses périodes de crise durant les cinquante dernières années. «Dans les sociétés traditionnelles, le port du vêtement est en général codifié et relativement stable. On note cependant, dans diverses civilisations, des périodes d’incertitude et de tension à l’égard des normes vestimentaires. C’est au cours de ces périodes, caractérisées par une certaine mobilité sociale, que l’on voit promulguer des lois somptuaires ou vestimentaires destinées à stopper au moins certaines manifestations de cette mobilité (E.B. Hurlock). D’une façon générale, le changement vestimentaire paraît avoir été très tôt un objet de conflits sociaux et idéologiques, étant considéré tantôt comme ouverture, renouvellement, progrès, tantôt comme transgression, impiété, snobisme ou décadence», résume-t-on dans l’encyclopédie Universalis à propos de la mode ajoutant que «parfois, elle en revêt l’aspect subversif, en particulier sous les régimes autoritaires, où les modes présentent souvent un caractère frondeur, voire oppositionnel». On est donc déjà loin du simple dandysme religieux.
Les parfums des «Foutouhate» :
«Parfums de la Médine illuminée», «Parfums des Harameine», tous les Algériens ont remarqué le retour de l’un des plus vieux métiers de l’Orient stéréotypé : les parfumeurs. Des boutiques qui «collent» au courant des commerces identitaires et de la consommation selon des critères confessionnelles. Le filon est en mode depuis deux ans ou plus et s’appuie sur une vocation de distribution avec des magasins dans les villes algériennes et dans les quartiers marchands. Sa «touche» se résume à jouer sur l’authenticité de l’habillage des flacons et sur l’origine contrôlée et sécurisée du produit, contrairement aux revendeurs des parfums occidentaux outrageusement contrefaits. Le design est très étudié dans ces boutiques avec présentoirs spéciaux, des climats d’encens et des artefacts des Lieux saints. Le jeu de référence est lourd, visant une clientèle sensibilisée et très « confessionnelle ». Cette référence serait aussi due aux grands groupes de fournisseurs qui dominent le marché et que l’on retrouve dans des pays « spécialisés » comme les pays du Golfe, l’Arabie Saoudite et la Jordanie. Les nouveaux parfumeurs algériens sont approvisionnés par des sociétés spécialisées, qui ont leur monopoles sur le filon avec des enseignes identifiables « Al Haramain Perfumes », « HiFlower », « Ryad », « El Qods »..etc. Selon les gens du métier, ces fournisseurs assurent une première formation pour les jeunes parfumeurs algériens avant de les fournir en essences en quantité industrielle. Les parfums sont vendus après leur « composition » sous les yeux du client, par des revendeurs initiés, et selon les choix d’un gros catalogue comptabilisant jusqu’à 3.500 marques pour les parfums occidentaux et plus de 300 compositions pour les parfums dits « orientaux ». Les coûts sont très accessibles, comme attendu. Les 20 millilitres standard sont ainsi cédés à 300 DA, mais les commandes « spéciales », celles des flacons d’artisanat ou très recherchées avec boîtier de luxe, peuvent atteindre les 2.200 DA ou même plus. La composition se fait à base de l’essence choisie, d’un mélange avec de l’éthanol et d’un fixateur. La clientèle semble être si importante qu’elle imposa l’extension du réseau et l’installation de concurrents. On est là aussi très loin du Misk des années 90.
TV des guérisons miraculeuses, cyber-islamisme et du fast-Islam :
Le monocathodisme de l’Algérie et le verrouillage des médias lourds au seul profit de l’ENTV a provoqué le basculement de larges audiences au bénéfice de chaînes TV arabes et étrangères, en seconde position. Le network satellitaire fait partie désormais de l’offre télévisuelle des Algériens, de leur culture de consommation et de leur... religion. Le contrôle des mosquées en Algérie et la mise sous monopole du discours religieux a oublié, trop promptement, l’impact des chaînes religieuses sur des Algériens qui n’ont pas rompu avec ce discours et ses dérives. Dans cet espace free, on retrouve des chaînes religieuses « clean », d’autres politiquement marquées par les régimes qui soutiennent ces TV, d’autres encore destinées à rentabiliser la nouvelle sensibilité des sociétés arabes et musulmanes en offrant des « marchandises » immatérielles comme les Rokia par téléphone, les guérisons miraculeuses et les talk-show de prédications. Le Maghreb, et face au Moyen-Orient, restera longtemps en retard avant de se réveiller à cette nouvelle guerre des cieux. Le Maroc et la Libye seront les premiers pays à tenter d’y faire barrage avec des chaînes thématiques religieuses locales et l’Algérie n’en sentira la nécessité que depuis une année avec le lancement timide et tout récent de la nouvelle chaîne coranique. L’invasion du satellitaire religieux est important et peut être démontré par l’effet de mode dont a bénéficié une chaîne aussi surréaliste que celle de « El Hakika » et autres jumelles. Cet espace panarabe, sans contrôle et sans alternatif, se retrouve aussi dans les offres d’autres chaînes à référent politique confessionnel marqué, entre chiisme ou wahabisme, ou celle à audience sunniste mais selon les tendances locales du pays diffuseur. En parallèle à cette « invasion culturelle » pour reprendre un cliché des années 80, on retrouve aussi la tendance lourde du cyber-isalmisme pour les jeunes et celle de l’usage charlatan ou « scientiste » du religieux pour capter une part du marché de la détresse des Algériens ou de leurs misères de santé. Là aussi, depuis une décennie, le paysage est occupé par de nouveaux acteurs, entre le Taleb traditionnel, le chercheur de trésors, la clinique de Hidjama et des médecines alternatives, réelles mais avec un habillage religieux trop tendancieux, et les arnaques à factures lourdes en vies humaines parfois. La règle voulant que là où tout un Etat recoure aux Zaouïa pour lever des soutiens, le simple Algérien ne peut que se tourner vers le Taleb pour avoir droit à une guérison à moindre coût. |
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