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La peine alternative de substitution, qui consiste en l'exécution d'une
activité d'intérêt général à la place de la peine de prison, est, selon le
chargé du projet en Algérie, à la recherche d'institutions pour sa mise en
oeuvre effective. « Quelles sont les types d'institutions publiques à même de
remplir cette fonction sociale essentielle à la solidarité et à la cohésion
sociale ? », s'est interrogé Salah Rahmani, le chargé du projet sur les modèles
alternatifs aux peines d'emprisonnement et de la réinsertion sociale des
ex-détenus, au cours de la journée d'études qui s'est déroulée hier au cercle
militaire de Béni Messous, sous l'égide du ministère de la Justice. Une journée
d'études qui a vu une présence importante de magistrats, procureurs, avocats,
représentants de la Sûreté nationale, de la Gendarmerie nationale et de juges
d'application des peines en tant que premiers concernés par l'application de la
peine alternative. La loi confère en effet aux juges d'application des peines
le moyen de faire exécuter des peines alternatives en substitution à
l'emprisonnement au profit de détenus primaires, à condition que la peine
prononcée contre eux n'excède pas une année. L'introduction de telles mesures
est récente dans la loi pénale du pays. Le ministre de la Justice, garde des
Sceaux, commence à mettre en place le cadre réglementaire après avoir signé, le
21 avril dernier, une circulaire «définissant et précisant, dit Rahmani, les
procédures du prononcé de la peine d'accomplissement d'un travail d'intérêt
général substituée à l'incarcération et clarifiant les modalités d'exécution à
suivre par le magistrat chargé de l'application des peines ».
Mais la question de son applicabilité sur le terrain reste entièrement posée. « Selon quels procédures et moyens, le juge de l'application des peines peut-il obtenir le partenariat social de ces institutions publiques ? », continue Rahmani de s'interroger. «Est-ce que l'institution judiciaire, pour prévenir tous les risques, doit élaborer un cahier des charges précis à opposer aux prestataires employeurs de la main-d'oeuvre ? », s'est-il encore demandé. L'intervenant estime que, « en un mot, la crédibilité du système alternatif à l'incarcération dépendra surtout de la capacité et de la volonté de ces institutions d'accueil à remplir leur rôle social d'utilité publique. » A ce débat, se sont joints des magistrats de pays européens (France, Norvège, Espagne) qui ont fait part de leurs expériences respectives en matière de prévention et de lutte contre la récidive. La grande question, selon Patrick Madigou, le président de l'Organisation européenne de probation, est de faire admettre ces alternatives au sein de la société, qui a, selon lui, du mal à les accepter. Carlos Mir Puig, magistrat à la 8ème section de l'Audience provinciale de Barcelone, parlera lui du contrôle judiciaire et des exécutions des peines et évoquera les peines complémentaires en faisant en sorte de satisfaire la société qui est « sans défense » et d'empêcher le condamné de retomber dans l'erreur. Il dira ainsi que l'idée est que le condamné doit demeurer dans la société et non en être marginalisé ni entièrement isolé. Les autorisations de sortie, la liberté conditionnelle (...) y contribuent. » Le directeur de l'administration pénitentiaire, Mokhtar Fellioune, reste pour sa part optimiste et se dit rassuré que la mise en oeuvre de la peine alternative ne va pas se heurter au refus de la société. « Les gens sont absolument favorables pour aider à la réinsertion des détenus, » a-t-il affirmé, en se référant aux traditions de solidarité qui caractérisent la société algérienne. Patrick Madigou suggère quand même d'éclairer l'opinion publique sur l'utilité de ce genre de peine et de la convaincre de ses bienfaits dont, entre autres, empêcher la récidive. Le directeur du projet algérien estime que « la prison aggrave toujours l'écart avec la population pour les jeunes condamnés primaires et risque de faire d'eux, en cas de récidive, de nouveaux désocialisés ». Nouvellement instituée, la peine alternative a suscité beaucoup de questionnements au cours de la rencontre d'hier. Des juges d'application des peines se demandent en effet « si les mesures concernant les peines alternatives ne vont pas déteindre sur l'aspect contraignant des peines pénales (classiques), les videraient de leur substance et n'encourageraient pas les auteurs à commettre des délits ». Notons que la substitution de l'emprisonnement par les peines alternatives est consacrée dans les pays de l'Union européenne. D'ailleurs, le projet y afférent a été initié en Algérie sous les hospices de l'UE à travers son programme MEDA 2. Fellioune regrettera, par ailleurs, que les juges ne recourent pas toujours à l'amende, au sursis, au contrôle judiciaire mais optent généralement pour l'emprisonnement. Il fera cependant savoir que « la détention préventive est carrément en baisse d'année en année ». |
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