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Ils passaient leurs journées à errer dans la ville d’Oran à bord d’une Renault Mégane, en quête de jeunes femmes sur le trottoir. Pour embarquer leurs «proies», ils alternaient violence (couteau sur la gorge et un spray de gaz lacrymogène dans le visage) et une ruse (néon de taxi amovible sur le plafond du véhicule). Ils conduisaient leurs otages dans des lieux reclus où ils les délestaient de leurs effets puis les violaient, à tour de rôle. Les kidnappeurs et violeurs en série rôdant à bord d’une Mégane «Béret» verte, qui ont semé la terreur à Oran et donné du fil à retordre à ses services de sécurité durant le mois de Ramadhan dernier, étaient hier au box des accusés du tribunal criminel pour répondre des chefs d’accusation d’«association de malfaiteurs, rapt, vol et viol». Onze femmes sont tombées sous les griffes de ces deux individus. Hier au procès, quatre d’entre elles ont eu le courage de venir affronter leurs deux kidnappeurs-violeurs. Dans ce qui suit, nous allons bien entendu donner des noms d’emprunt, des pseudonymes aux victimes. Pour les enquêteurs de la police qui ont eu à traiter ce dossier hors du commun, tout a commencé avec deux plaintes assez semblables, déposées le 17 septembre 2008 par deux jeunes femmes, Wassila et Manel. La première a été agressée, en début de matinée, sur la voie publique, par deux hommes. Couperet sur la gorge, elle leur a cédé facilement ses bijoux et une somme de 70.000 DA. La deuxième, en début de soirée, par deux hommes également, qui lui ont donné deux coups de poing en plein visage, puis l’ont aspergée de gaz lacrymogène avant de l’embarquer de force à bord de leur voiture. Quand elle s’est réveillée, elle s’est retrouvée quelque part au centre-ville, entourée d’une foule de gens, sa robe déchirée, ses boucles d’oreille et sa chaîne en or disparues. Dénominateur commun entre les deux faits: le même signalement, à quelques détails près, des deux agresseurs et la même bagnole, une Renault Mégane «Béret» de couleur verte, immatriculée 31. La série ne fait que commencer. Le lendemain, le 23 septembre, deux nouvelles victimes. Farah ne savait pas qu’elle venait de se jeter dans la gueule de l’ogre lorsqu’elle avait pris ce taxi «travesti», Mégane «Béret», à la rue de Mostaganem, aux environs de 23 heures. Sous la menace, elle ne pouvait que constater, muette, paralysée par la peur, le faux taxieur et son faux passager la détourner vers le fort de Santa Cruz. Là, elle a vécu une nuit terrible: intimidation, torture, sévices sexuels... Elle a néanmoins réussi à prendre le numéro d’immatriculation de la Mégane. Une heure et demie auparavant, Fatiha, embarquée à partir d’Eckmühl, a eu le même sort, à cette différence près que cette dernière n’a pas été victime de sévices corporels. Les enquêteurs ont maintenant un indice supplémentaire, théoriquement suffisant pour identifier leurs deux hommes: le numéro d’immatriculation. Mais l’action a butté contre des difficultés imprévues. L’enquête traîne quelques jours encore. Conséquence: d’autres femmes tombent dans le piège diabolique du «taxi» qui continue inexorablement de répandre l’horreur et l’anxiété dans les rues d’Oran en ce mois sacré. En l’espace de cinq jours, du 24 au 28 septembre, les deux criminels impénitents ont jeté leur dévolu sur sept autres jeunes femmes, parmi lesquelles, une lycéenne, Khadidja. «Je venais de sortir du lycée. Un homme est sorti d’une Mégane verte et s’est approché de moi. Il m’a demandé gentiment si je connaissais cette fille, qui s’était égarée, selon lui, et qu’il transportait. A peine me suis-je approchée du véhicule pour voir son visage que son copain a ouvert la porte et l’autre m’a poussée à l’intérieur. Ils m’ont pris mon portable, mon bracelet en or et m’ont jetée par terre à Courbet», raconte la lycéenne. Le représentant du ministère public a requis 12 ans de réclusion contre les deux accusés. A l’issue des délibérations, les deux accusés, D.L. et Z.S., tous deux âgés de 25 ans, résidant à Haï Yasmine, ont été condamnés à 5 ans de réclusion criminelle. |
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