A entendre les témoignages des rescapés, le
marin pêcheur, porté disparu lors du naufrage du chalutier «Tessala»
(immatriculé à Ghazaouet et non dénommé Ghazaouet) et appartenant à la société
MARPEC, mériterait bien un jour un hommage glorieux. Larbi Miloud, c'est de lui
qu'il s'agit, se serait comporté digne d'un commandant de bord d'un bateau qui
venait de couler. D'abord c'est lui qui en premier eut au nez l'odeur du brûlé
et qui a aussitôt donné l'alerte. Il serait aussi le premier à rejoindre le
mécanicien dans la salle des machines et l'aider pour essayer d'éteindre le feu
à l'aide d'extincteurs mais en vain. Et quand il fallait mettre à l'eau le
canot de sauvetage, il était là aussi. Et quand il fallait trouver une autre
solution de secours (le canot s'étant malheureusement retourné sur lui-même et
prit l'eau), c'est Miloud qui eut tout de suite l'idée d'utiliser (et de
lancer) à l'eau des ballons de filets (un dispositif de pêche flottant composé
généralement de 10 ballons liés par une corde), auxquels se sont agrippés les
11 hommes une fois sauté à l'eau et qui eurent la vie sauve grâce à l'équipage
du chalutier «Yasser Youb» immatriculé à Béni Saf, qui fut le premier à arriver
sur les lieux.
Selon toujours les mêmes affirmations, et
alors que les flammes continuaient de dévorer le bateau, Miloud était resté un
bon moment sur le pont avant de se jeter à l'eau. D'autres versions rapportent
qu'il était encore sur le pont, et même dans la salle des machines pour
d'autres, quand une explosion était entendue. Mais la version qui revient le
plus est que Miloud a bel et bien sauté à la mer, et aurait vainement nagé pour
se mettre au niveau de ses collègues, puis plus rien. La marée de l'aube de ce
mardi était, semble-t-il, trop forte pour les bras d'un être humain. Des
recherches furent aussitôt déclenchées et se sont même poursuivies jusqu'à
mercredi pour retrouver le disparu, sans aucun résultat. Jeudi matin, près de
la maison familiale, une tente était déjà dressée, signe que ses proches ont
peut-être perdu tout espoir de le revoir vivant. L'un de ses frères (Mohamed)
nous a dit que toute la famille est prête à accepter ce Mektoub illahi (destin
divin). Et d'ajouter: «Mon frère Miloud, 44 ans et père d'un enfant, était
parti la veille rejoindre l'équipage de Tessala à Bouzedjar ». Sur le pont, il
devait porter un survêtement uni, le pantalon de couleur rouge et la veste d'un
bleu mêlé au blanc. Avant de sauter à la mer, il se serait débarrassé de ses bottes
laissant derrière lui un bateau en flammes. Il était environ 06h15 du matin ce
mardi 14 avril 2009. Tessala ne s'était complètement engouffré, selon notre
témoin, que deux heures plus tard. Selon la famille, Miloud, comme le reste de
l'équipage, venait de reprendre la mer après quelques jours d'arrêt pour cause
de mauvais temps et de quelques pépins techniques.