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Alors que pendant le dernier sommet, en novembre 2008 à Washington, les chefs d'Etat et de gouvernement des pays du G20 s'étaient accordés «sur la nécessité d'une réponse politique plus large fondée sur une coopération macroéconomique plus étroite, pour restaurer la croissance», leur réunion à Londres ce jeudi 2 avril, ils vont tenter de trouver des réponses à la pire crise économique et financière connue depuis les années 1930. Trois dossiers prioritaires seront examinés: la stabilisation des marchés financiers et bancaires; la réforme du système financier international et la relance de l'économie mondiale. Il se peut que soit aussi adoptée la liste noire des paradis fiscaux établie par l'OCDE. Un G20 à 20 millions d'euros N'empêche que l'organisation de cette réunion devrait coûter plus de 20 millions d'euros au pays hôte, si l'on croit les indications données lors d'un chat avec des internautes sur le site de Downing Street par le secrétaire d'Etat britannique aux AE, Mark Malloch-Brown : «Le coût a été estimé à 19 millions de livres. Une grande partie va aller à la sécurité, car nous avons beaucoup de dirigeants d'envergure en ville (...) Nous avons eu du mal à élaborer un sommet où les gens vont être accueillis avec l'hospitalité appropriée mais où le divertissement reste simple». Ce coût inclut les frais de personnel, de location de la salle, des forces de police (encadrement des manifestations notamment) ainsi que la sécurité autour du lieu de rencontre ; les forces de l'ordre ont mobilisé 2.500 policiers, par peur de débordements des manifestations lancées dès samedi dernier par les mouvements altermondialistes. Un Baptême du feu pour Obama L'homme le plus populaire de la planète, dont les initiatives économiques ont été attendues tant par ses compatriotes que par la communauté internationale, aura une semaine chargé : G20, OTAN, Union européenne, et puis la Turquie pour s'adresser au monde musulman. L'opinion internationale ne supporte plus un dirigeant américain donneur de leçons et, dans un monde de plus en plus globalisé, les milliers de milliards consacrés à la relance de l'économie américaine sont considérés comme devant profiter aussi au reste du monde. Mais Barack Obama avait récemment déclaré : «Les leaders du G20 ont la responsabilité de mener des actions fortes et coordonnées (pour stimuler la croissance)». Il est clair que cette tournée internationale d'Obama vise plus que le soutien aux solutions économiques. Elle cherche incontestablement à asseoir le «leadership» du jeune président démocrate, qui doit encore faire ses preuves sur le terrain international : «Le président va écouter autant que diriger», avait annoncé le porte-parole de la Maison-Blanche, ce week-end. Le sénateur démocrate John Kerry pense, quant à lui, que : «C'est une invitation à la désillusion. Le président devra pousser avec force pour dégager les obstacles hérités de George Bush», tellement la marge lui apparaît étroite - dans le contexte actuelle de crise - entre la volonté de montrer une unité retrouvée et celle de défendre des intérêts divergents des différents protagonistes du G20. Huit mesures du plan russe Le Kremlin a dévoilé la semaine dernière (sur son site Internet) ses propositions en vue du Sommet du G20, en insistant sur la nécessité de réformer un système économique mondial «unipolaire» et en voie de devenir «obsolète». «La crise financière mondiale actuelle est le résultat de l'effondrement du système financier existant en raison d'une mauvaise gestion, qui a négligé des risques importants», indique le texte publié. «Le système... doit être remplacé par un système basé sur l'interaction de plusieurs centres principaux», juge la présidence russe qui propose une série de huit mesures (détaillées dans le communiqué). Il est suggéré notamment l'adoption de normes macroéconomiques et budgétaires communes à tous les pays économiquement influents, ainsi que celle d'un cadre mondial pour la régulation et la supervision du système financier, comme par exemple ce qui touche aux agences de notation ou les fonds spéculatifs. Le nombre de monnaies servant de réserve dans les Banques centrales devrait pour le moins être accru - avec, si possible, la mise en place d'une «devise de réserve supra-nationale» (qui pourrait être émise par une des institutions financières internationales). Le rôle et le mandat du FMI devront être revus et ses moyens fortement augmentés. Le communiqué insiste sur la nécessité de coordonner l'aide aux pays pauvres, très affectés par la crise, et d'améliorer les connaissances économiques et financières des populations. Enfin, la planète ne peut pas se permettre de négliger les questions de sécurité énergétique et d'économies d'énergie, souligne le Kremlin qui suggère de ne pas s'en tenir à ce seul sommet. Une autre conférence internationale devrait suivre «afin de trouver un accord sur les grandes lignes de la nouvelle architecture mondiale et permettre d'adopter des conventions internationales sur un nouveau cadre de régulation financière mondial». Il est important de situer le contexte dans lequel se situe ce plan russe. A l'époque du pétrole dégringolant du sommet de 147 $, le gouvernement russe luttait contre la crise en subventionnant les entreprises industrielles et agricoles ainsi que les banques, dépensait ses réserves de change pour défendre le rouble, et utilisait le reste pour stimuler la demande intérieure. Aujourd'hui, il est admis que l'économie russe se contractera durablement en 2009, que le déficit budgétaire (succédant à plusieurs années d'excédents) sera chronique - il est déjà de l'ordre de 7 % du PIB - et que l'inflation continuera de s'accélérer (en réponse aux restrictions drastiques des importations). L'austérité s'impose. C'est donc le moment d'appliquer les réformes structurelles et de faire avancer les programmes d'ouverture... économique. Le cours actuel du pétrole - aux alentours de 50 $ - n'est pas une bonne nouvelle. Aussi surprenant que cela paraisse, le vice-Premier ministre, M. Shuvalov, a souhaité le 25 mars (dans le Financial Times) «deux, trois ou même cinq ans» de matières premières à prix déprimés ! Car, selon lui, cette contrainte aiderait la Russie à accoucher d'un «nouveau modèle» économique. Le gouvernement, dit-il, envisage de sérieusement se libérer de la dépendance vis-à-vis des recettes d'exportation des hydrocarbures (et des fiscalités et parafiscalités qui leurs sont associées). C'est là, n'est-ce pas, un signe encourageant que la crise (dans laquelle se débattent beaucoup de pays pétroliers) puisse offrir une chance inespérée de réformes sérieuses. Un communiqué en 24 points en préparation Selon le Financial Times, un projet de communiqué final en 24 points circule déjà entre les dirigeants du G20. Il s'ouvre dans ces termes : «Au cours du dernier demi-siècle, une forte croissance et l'accroissement des échanges internationaux a entraîné d'innombrables emplois et la prospérité de nos citoyens. Nous sommes maintenant confrontés au plus grand défi pour l'économie mondiale dans les temps modernes, une crise qui affecte la vie des hommes, des femmes et des enfants dans le monde. A crise mondiale il est exigé une solution mondiale». Et ce projet de déclaration comprend 6 parties : a) Rétablir la croissance mondiale aujourd'hui (point 3 à 10) b) Une économie mondiale ouverte (points 11 à 13) c) Réformer les systèmes financiers pour l'avenir (points 14 à 17) d) Réformer les institutions financières internationales pour l'avenir (point 18) e) Construction d'un redressement durable (points 19 à 23) g) Réalisons nos engagements (24ème point). Il anticipe ainsi une reprise de la croissance de l'économie mondiale d'ici à la fin de 2010 et, avec les mesures de relance budgétaires mises en oeuvre, la production mondiale augmenterait de plus de 2 % et créerait plus de 20 millions d'emplois... Mais il reste vague quant au sujet d'un éventuel programme mondial supplémentaire de relance. Les membres du G20 sont : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, Etats-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie, Union européenne. Les chefs d'Etat et de gouvernement tenteront donc de prendre des décisions concrètes afin de combattre la plus grave crise économique mondiale. Les débats porteront (entre autres) sur les mesures en vue de la régulation des marchés financiers, dans le but d'éviter une répétition des faillites bancaires à l'origine de la crise actuelle ainsi que du renforcement des institutions économiques et financières internationales (FMI, Banque mondiale et Forum de stabilité financière). (*) Économiste |
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