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Le 21ème sommet de la Ligue arabe s'ouvre demain à Doha : Sur fond de dissensions lourdes et persistantes

par K. Selim

Le sommet arabe de Doha, qui s'ouvre demain, a peu de chance, en dépit des ambitions du Qatar, d'être celui de la «réconciliation» arabe. La rencontre des chefs d'Etat arabes s'ouvrira avec deux absences annoncées, celle des présidents Abdelaziz Bouteflika et de Hosni Moubarak. Si, pour le premier, l'absence au sommet de la Ligue arabe s'explique par des raisons domestiques liées à l'élection présidentielle, celle du président égyptien est directement liée aux dissensions largement mises en évidence au cours de l'agression israélienne contre Ghaza. Le Caire a choisi un niveau de représentation très faible - le ministre des Affaires juridiques et parlementaires Moufid Chehab - au sommet, en signe évident de défiance à l'égard du Qatar, à qui l'on reproche pêle-mêle de jouer un rôle plus grand que son poids et le travail, en tout point remarquable, accompli par la chaîne Al Jazeera au cours du carnage subi par les Palestiniens à Ghaza.

L'attitude de l'Egypte, qui entend rester le seul «médiateur» dans la région, était prévisible. Le Qatar, tout en entretenant des relations fortes avec les Etats-Unis, a déployé un activisme diplomatique, qui lui a permis d'engranger des succès dans la crise libanaise, la rébellion chiite ou entre le Soudan et l'Érythrée. Le Qatar a accueilli, le mois dernier, des pourparlers entre Khartoum et le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), le groupe rebelle le plus actif du Darfour, qui se sont terminés par un accord de cessation des hostilités qui semble désormais perturbé par le lancement d'un mandat d'arrêt contre le président soudanais Hassan Al Bachir.



La «menace» iranienne



Ces succès diplomatiques ont suscité l'agacement du Caire qui a tout fait pour saboter le Sommet de Doha, organisé au cours de l'agression israélienne contre Ghaza. L'hostilité égyptienne à l'égard du Qatar recouvre cependant des questions fondamentales qui vont au-delà de « l'émirat d'al-jazira ». Il s'agit de divergences fondamentales entre pays arabes aussi bien sur la Palestine que sur la prétention des pays arabes dit « modérés » à mettre en avant une menace iranienne qui serait plus inquiétante qu'Israël. La réunion des chefs d'Etat syrien, égyptien et saoudien à Ryad, le 11 mars dernier, a permis une réconciliation superficielle, mais sur le fond, Damas et beaucoup d'autres pays arabes, dont l'Algérie, refusent de considérer l'Iran comme un ennemi. A l'opposé, un pays « lointain » mais très lié aux monarchies du Golfe, comme le Maroc, s'est lancé dans un activisme anti-iranien allant jusqu'à la rupture des relations diplomatiques avec l'Iran. Le « dossier de la réconciliation », examiné hier par les ministres des Affaires étrangères, est donc loin d'être mûr. Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a admis la persistance des divergences interarabes en estimant qu'il « faudrait les gérer dans le cadre d'un mécanisme à convenir ». Le Premier ministre qatari, cheikh Hamad Ben Jassem Al-Thani, a estimé qu'il faut « être à la hauteur de nos responsabilités et oeuvrer pour un resserrement des rangs ». Amr Moussa a souhaité que le 21ème sommet soit l'occasion de « saisir les différends » pour « en discuter librement et franchement, pour s'efforcer d'effacer pour toujours les préoccupations... Nous devons toucher à la racine des problèmes pour l'extirper pour toujours ». A l'évidence, le Caire n'est pas sur cette longueur d'ondes. On s'attend à ce que le sommet adresse un « message fort » aux factions palestiniennes et qu'il exprime son rejet du mandat d'arrêt contre le président soudanais Hassan Al-Bachir. La présence de ce dernier au Sommet de Doha restait, jusqu'à hier, entourée d'incertitude.

Défiant le mandat d'arrêt, M. Al-Bachir s'est rendu en Erythrée, en Egypte et en Libye ces derniers jours. Il a, par ailleurs, fait part de son intention de participer au sommet arabe de Doha.