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L'homme qui habitait dans un avion

par Kharroubi Habib

Quand le président Bouteflika a fait procéder à la révision constitutionnelle qui lui permet de briguer aujourd'hui un troisième mandat, les principaux partenaires étrangers se sont gardés d'exprimer le moindre commentaire désobligeant sur son initiative. C'était là l'indice que les responsables au pouvoir dans ces pays sont favorables à une reconduction du chef de l'Etat algérien dans ses fonctions.

Tout comme ils se sont tus à ce moment-là, ils s'abstiennent aujourd'hui de s'exprimer sur la validité en terme de démocratie sur l'élection présidentielle qui va avoir lieu en l'absence de partis de l'opposition, qui en dénoncent le caractère fermé, l'inéluctabilité du résultat pour cause du parti pris de l'administration en faveur du Président-candidat et de fraude annoncée.

C'est peu dire que les partisans du boycott de l'élection présidentielle ressentent de l'amertume de n'être pas entendus au niveau international. Ils paient pour avoir naïvement cru que les responsables politiques dans ce milieu placent les principes de la démocratie au-dessus des intérêts de leurs nations, s'agissant des relations avec des Etats comme l'Algérie.

Peut-être que certains de ces derniers auraient prêté une oreille un peu attentive aux doléances des opposants internes à une reconduction de Bouteflika, si l'élection présidentielle avait été effectivement boycottée par l'ensemble de la classe politique. Ce qui n'est pas le cas, puisque des partis d'opposition, tout aussi représentatifs de segments de l'opinion publique algérienne, ont décidé eux de participer. Ce qui donne argument à ces responsables étrangers à ne pas faire leur ceux des boycotteurs et à se contenter du «wait and see». Certains ont tout au plus consenti à faire savoir «qu'ils ont pris acte que certains partis de l'opposition ont décidé de boycotter cette élection», qu'ils «sont attachés à la consolidation de la démocratie en Algérie» et plaident pour «un bon déroulement du scrutin de la présidentielle».

La réalité est que les principales puissances en partenariat avec l'Algérie ont fait leur choix, qui est qu'ils sont favorables au statu quo politique en vigueur en Algérie sous la houlette du président Bouteflika. Plus qu'ils ne souhaitent un approfondissement de la démocratie en Algérie, les dirigeants de ces Etats apprécient surtout la poursuite de sa politique actuelle qui leur offre les opportunités de faire avancer leurs intérêts nationaux dans un pays redevenu relativement fréquentable et sécurisé.

L'intelligence politique de Bouteflika n'est pas étrangère au comportement international tel qu'il s'exprime sur cette élection présidentielle. Il a été un temps beaucoup glosé sur sa propension à «habiter dans un avion». Sans que les railleurs ne se rendent compte que sa dépense au plan international allait l'imposer en tant que «constructeur d'une Algérie nouvelle et attractive» aux yeux des principaux décideurs politiques de la planète. Là où le Président-candidat a vraiment réussi.