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Les avocats veulent avoir leur «Caisse»

par H. Saaïdia

Le projet de création d'une Caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) poursuit son petit bonhomme de chemin. Selon nos sources, cette réforme suggérée par la robe noire fait actuellement l'objet d'étude au niveau du ministère de la Justice. Pour sa part, l'auteur de l'idée, le barreau des avocats d'Oran, poursuit sa campagne en faveur de ce nouveau dispositif. Ainsi, le promoteur du projet organisera, le 2 mai à l'hôtel Sheraton d'Oran, un séminaire international pour mettre en lumière les vertus de la CARPA. Plusieurs organisations professionnelles étrangères y sont invitées : les barreaux français d'Aix-en-Provence, Toulouse, Poitier, Bobigny, les barreaux marocains de Casablanca et de Tanger et le barreau tunisien de Sousse, a-t-on appris auprès du bâtonnier Maître Ouahrani El-Houari.

Objectif principal de ce projet «importé», tient à souligner le bâtonnier - par honnêteté et respect du droit d'auteur - : «sécuriser les fonds, effets ou valeurs reçus par l'avocat à titre temporaire (par exemple, indemnité d'éviction, pension alimentaire, prix d'une transaction mobilière ou immobilière...) pour le compte de ses clients, personnes physiques ou morales». En effet, «tous les fonds, valeurs ou effets perçus par les avocats pour le compte de leurs clients seront déposés sur un compte ouvert au nom de la CARPA, dans les écritures d'une banque ou d'une caisse de dépôts et consignations où seront centralisés les dépôts et les opérations », explique notre interlocuteur. L'idée d'instaurer cet instrument en Algérie n'est pas « fantaisiste », loin de là. C'est un besoin qu'impose la réalité. L'expérience a montré que l'argent et autres effets de commerce remis en main propre à l'avocat, qui peut les manier à sa guise, n'étaient pas toujours et forcément en lieu sûr. L'élément confiance, comme seule garantie, s'est avéré insuffisant ; les affaires de malversation impliquant la robe noire enregistrées çà et là étant trop nombreuses pour être confinées dans des « cas isolés ». Une autre clé de sécurité que procure la CARPA : les écritures liées à l'activité de chaque avocat sont retracées dans un sous-compte individuel au nom de l'avocat. Les mouvements comptables sont gérés affaire par affaire à l'intérieur de chaque sous-compte cabinet. Les avocats ne peuvent procéder à des règlements pécuniaires à leurs clients que par l'intermédiaire de la CARPA, celle-ci étant un acteur obligatoire des règlements pécuniaires. L'avocat ne peut prélever sur ce compte que les honoraires qui lui sont dus et avec l'accord de ses clients, et en outre, uniquement par un transfert sur son compte professionnel, soit par chèque, soit par virement. Par ailleurs, il ne peut y avoir de transfert de fonds entre le sous-compte individuel ouvert dans une caisse et les sous-comptes ouverts dans d'autres caisses au nom de l'avocat lorsque celui-ci dispose de plusieurs cabinets, non plus que des transferts d'un sous-compte affaire à un autre. Aussi, les règlements des sommes revenant aux clients ne sont pas réalisés par des chèques établis par l'avocat lui-même, mais, à sa demande, par la CARPA. La CARPA a ainsi la possibilité de vérifier, opération par opération, que la provision est constituée, ce qui permet d'éviter tout incident de paiement et offre aux justiciables la garantie que les fonds leur revenant leur seront effectivement versés. Par ailleurs, et contrairement à ce qui se passe dans d'autres professions, dont les membres bénéficient parfois des intérêts produits par des fonds appartenant à des tiers, le bâtonnier plaide pour cette idée : « il est plus conforme à l'éthique des avocats d'attribuer ces intérêts, générés par les agios bancaires des comptes CARPA, obtenus grâce au concours de la profession, au Barreau tout entier. Autre argument mis en avant par les partisans du projet : «La CARPA, comme soupape de sécurité juridique, incitera davantage les investisseurs étrangers à s'installer sur le marché algérien. Nous connaissons plusieurs multinationales qui sont réticentes à l'idée d'investir en Algérie pour la simple raison que cet instrument n'y existe pas».